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DIOPHANTE D'ALEXANDRIE

De la vie de Diophante, nous ne connaissons presque rien : Alexandrin, il vécut après Hypsiclès et avant Théon d'Alexandrie, c'est-à-dire après la première moitié du iie siècle avant notre ère, et avant la seconde moitié du ive siècle de notre ère. Nos certitudes s'arrêtent là, pour céder la place à de simples conjectures. Deux témoignages tardifs tentent en effet de préciser davantage les dates de Diophante. Le premier revient à Michel Psellus (1020-1105 ?) dont, au xixe siècle, l'historien des sciences Paul Tannery a restitué et commenté un fragment, pour conclure que Diophante aurait été l'ami d'un certain Anatolius, lequel a été identifié – toujours par Tannery – comme Anatolius d'Alexandrie ; il s'agit de celui qui devint en 270 évêque de Laodicée (Syrie), que l'historien Eusèbe de Césarée loue pour ses connaissances scientifiques, et dont le mathématicien Jamblique a conservé certains fragments des travaux arithmétiques. Poussant plus loin sa conjecture, Tannery, non sans audace, fait de Diophante un mathématicien chrétien directement disciple de Denys, évêque d'Alexandrie de 248 à 265.

La plupart des historiens de la science hellène, comme Friedrich Otto Hultsch et Thomas Heath, n'ont pas retenu cette conjecture. L'autre témoignage est celui du bio-bibliographe du xiiie siècle, Abū al-Faraj, qui affirme sans donner ses sources que Diophante vivait sous le règne de Julien l'Apostat (361-363). Mais il peut s'agir là d'une confusion entre le mathématicien et un rhéteur du même nom.

À défaut de nouveaux arguments décisifs, nous nous contenterons, pour l'heure, d'admettre qu'il s'agit d'un Alexandrin, dont la vie s'écoula probablement entre le deuxième et le troisième siècle et dura, si l'on en croit un célèbre épigramme de l'Anthologie palatine attribué à Métrodore de Byzance (ive siècle), quatre-vingt-quatre ans.

Une œuvre dispersée

De l'œuvre mathématique attribuée à Diophante, la tradition manuscrite grecque nous a transmis six livres d'un ouvrage sur les Problèmes arithmétiques, et, d'autre part, un chapitre d'un livre sur les Nombres polygones. Les Arithmétiques, qui ont assuré à Diophante son grand destin historique, devaient comprendre treize livres, selon les termes mêmes de l'auteur au préambule du premier livre. Mais, comme seuls six livres avaient été conservés en grec, les historiens, depuis le xixe siècle – G. H. F. Nesselmann, Henry Thomas Colebrooke, Hermann Hankel, Paul Tannery, Charles Henry, Thomas Heath et d'autres – ont avancé plusieurs hypothèses pour tenter d'expliquer la perte des sept autres livres, voire parfois pour essayer de définir leur contenu.

Or, on savait, par les bio-bibliographes arabes du xe siècle, qu'il existait une traduction arabe des Arithmétiques, par Qusṭā ibn Lūqā de Baalbek, et datant de la seconde moitié du ixe siècle. Au xixe siècle, l'historien des sciences Franz Woepcke a remarqué que al-Karajī, mathématicien arabe de la fin du xe siècle, a résumé les trois premiers livres de cette traduction qui, globalement, correspondent aux trois premiers livres du texte grec tel qu'il nous est parvenu. En 1971, Roshdi Rashed a pu retrouver à Meshed, en Iran, quatre livres de la traduction arabe, tous perdus en grec, et il a établi qu'ils suivent, dans l'ordre, les trois premiers livres du texte grec. Cette découverte a ruiné toutes les interprétations évoquées plus haut.

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Pour citer cet article

Roshdi RASHED. DIOPHANTE D'ALEXANDRIE [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • ARITHMÉTIQUES (Diophante)

    • Écrit par Bernard PIRE
    • 188 mots

    Diophante d'Alexandrie, parfois appelé le « père de l'algèbre », est connu par son ouvrage les Arithmétiques, qui traite des solutions des équations algébriques. On ne sait pratiquement rien de sa vie et ses dates de naissance et de mort sont très controversées. Les Arithmétiques...

  • PRIX ABEL 2016

    • Écrit par Yves GAUTIER
    • 1 168 mots
    • 2 médias
    ...démonstration devient des plus ardues. Tous les cubes ne sont pas la somme d’un cube… Certes, Fermat avait écrit en latin en marge d’un exemplaire des Arithmétiques de Diophante, qui donne la description de tous les cas possibles, sa célèbre citation : « J’ai une démonstration extraordinaire de cette...
  • ALEXANDRIE ÉCOLE MATHÉMATIQUE D'

    • Écrit par Jean ITARD
    • 1 754 mots
    • 1 média
    Mais c'est encore à cette école que l'on doit un autre aspect de l'analyse représenté par les Arithmétiques de Diophante d'Alexandrie. Il s'agit de l'analyse indéterminée, dite de nos jours encore « analyse diophantienne ». Ses procédés sont identiques à ceux de notre algèbre...
  • ÉQUATIONS ALGÉBRIQUES

    • Écrit par Jean ITARD
    • 5 672 mots
    Indiquons enfin que les systèmes d'équations affines se rencontrent dans la littérature grecque, principalement chez Diophante d'Alexandrie (iiie siècle env.). Ce n'est d'ailleurs qu'un aspect mineur de l'œuvre du grand algébriste. Diophante ne procède pas par fausses positions. Il utilise une...
  • FERMAT PIERRE DE (1601-1665)

    • Écrit par Universalis, Catherine GOLDSTEIN, Jean ITARD
    • 4 103 mots
    Mais le domaine où il triomphe est celui de l'analyse indéterminée. Les mathématiciens du xvie siècle avaient retrouvé les livres arithmétiques de Diophante. Xylander les avait traduits en latin et S. Stevin en français. R. Bombelli, Gosselin, Viète s'en étaient inspirés dans leurs travaux. Le mathématicien...
  • Afficher les 7 références

Voir aussi