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CHARLEMAGNE (742-814)

Une tragique disparité

L'effet le plus certain de la dignité suprême que Charlemagne avait reçue fut de lui faire prendre conscience de l'accroissement de ses responsabilités : empereur, dirigeant l'empire chrétien, il se considéra plus encore que dans le passé comme répondant devant Dieu de la manière dont vivait le peuple soumis à son autorité. Nul doute aussi qu'il n'ait subi l'influence du souvenir de la Rome impériale qui avait donné ses lois au monde : il ne faut jamais oublier que la renaissance de l'Empire est inséparable de la redécouverte de la tradition antique par les érudits de la cour. Autant de raisons qui firent déployer à Charlemagne à partir de 802 une activité législative intense pour fixer le droit ecclésiastique et séculier de l'empire ; signalons par exemple le travail de correction et de complément de plusieurs lois nationales (loi salique, loi des Ripuaires, loi des Bavarois) et la mise par écrit d'autres lois (ainsi celles des Frisons, des Chamaves, des Saxons et des Thuringiens). À cela s'ajoute l'effort immense, pathétique même, pour promouvoir le triomphe des principes chrétiens dans le jeu des institutions et dans la vie quotidienne. Renforcement des obligations nées de la prestation du serment de fidélité que prêtèrent pour la troisième fois les sujets en 802 ; défense des hommes libres contre l'oppression des grands et les exactions des fonctionnaires ; interdiction de l'accaparement des vivres et de la hausse illicite des prix ; condamnation du principe de se faire vengeance soi-même ; recommandation de l'arbitrage : autant de mesures qui montrent l'empereur au service de la paix, définie d'après saint Augustin comme l'accord dans l'ordre, et qui doit reposer sur la bonne volonté collective que les textes appellent « concorde » ou « unanimité ». Tel semble être le contenu essentiel de l'idée impériale à la fin du règne de Charlemagne. Le malheur fut que l'immense majorité des hommes se révéla absolument incapable de comprendre ces notions et que l'empereur n'eut pas les moyens d'en imposer l'application. Il y a là une tragique disparité entre un concept grandiose et la réalité.

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Écrit par

  • : professeur à la faculté des lettres et sciences humaines de Dijon

Classification

Pour citer cet article

Robert FOLZ. CHARLEMAGNE (742-814) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Médias

Charlemagne - crédits : Hulton Archive/ Getty Images

Charlemagne

700 à 800. De 'Abd al-Malik à Charlemagne - crédits : Encyclopædia Universalis France

700 à 800. De 'Abd al-Malik à Charlemagne

Empire carolingien - crédits : Encyclopædia Universalis France

Empire carolingien

Autres références

  • COURONNEMENT IMPÉRIAL DE CHARLEMAGNE

    • Écrit par Pascal BURESI
    • 212 mots

    Le couronnement de Charlemagne consacre le rôle européen du monarque. Sacré roi des Francs en 754, à l'initiative de son père, Pépin III dit le Bref, et en même temps que lui, Charles accède au trône en 768 ; il le partage avec son frère Carloman jusqu'à la mort de celui-ci, en...

  • AIGLE IMPÉRIALE

    • Écrit par Hervé PINOTEAU
    • 542 mots

    Oiseau de Zeus puis de Jupiter, patron de Rome, l'aigle fut employé par les Barbares qui le considéraient comme le symbole de l'Être suprême (Édouard Salin). Des indices prouvent que Charlemagne l'employa au sommet du mât de ses navires (denier de Quentovic, après 804) et en mit...

  • AIX-LA-CHAPELLE

    • Écrit par Francis RAPP
    • 871 mots
    • 1 média

    Chef-lieu de district dans le Land de Rhénanie-du-Nord - Westphalie, Aix-la-Chapelle (en allemand, Aachen), dont la population était de 243 330 habitants en 2014, est une ville thermale et un centre culturel au riche passé.

    Le nom d'Aix-la-Chapelle (en latin Aquae Grani, ou Aquisgranum) est...

  • AIX-LA-CHAPELLE, histoire de l'art et archéologie

    • Écrit par Noureddine MEZOUGHI
    • 1 001 mots
    • 2 médias

    Aix connut son apogée quand Charlemagne s'y installa définitivement, en 794. Il entreprit alors la construction d'un vaste palais sur un plan régulier imité de l'Antiquité romaine. L'ensemble a malheureusement disparu, à l'exception de la célèbre chapelle...

  • ALCUIN, lat. ALBINUS FLACCUS (730 env.-804)

    • Écrit par Marcel PACAUT
    • 193 mots
    • 1 média

    Clerc anglo-saxon, né à York, Alcuin fut dans cette ville l'élève d'Aelbert, auquel il succéda à la tête de l'école cathédrale. Il fut alors regardé comme l'un des maîtres de la culture chrétienne anglaise. En 782, il est appelé par Charlemagne pour présider l'école...

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Voir aussi