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LOLLARDS

Provenant du moyen allemand lollaert (de lullen, marmotter, chantonner à voix basse), l'appellation de lollards fut d'abord donnée à certains groupes d'Europe continentale suspects de cacher des croyances hérétiques sous un souci d'intensifier la dévotion ; mais, après 1382, elle fut attribuée par dérision et resta attachée aux partisans de John Wyclif (1328-1384), dont les écrits, plusieurs fois condamnés par l'Église, devaient inspirer, outre la pensée des lollards eux-mêmes, celle des hussites, et apparaître longtemps comme la préfiguration de la réforme luthérienne, notamment par leurs attaques contre l'Église établie et les biens ecclésiastiques.

Le premier groupe lollard se forma autour de quelques collègues de Wyclif, à Oxford, conduits par Nicolas de Hereford. Il fit des adeptes en dehors de la ville universitaire et inspira peut-être les tendances anticléricales de la révolte des paysans qui, massacrant nobles et clercs, envahirent Londres en 1381. Les lollards furent alors durement combattus par Richard II et par Guillaume de Courtenay, archevêque de Canterbury. Un concile réuni à Londres en 1382 condamna plusieurs de leurs propositions. Cependant, le mouvement continua de se propager parmi les habitants des villes, les marchands, la gentry et même le bas clergé. Plusieurs personnages de la Cour et quelques membres de la Chambre des communes lui apportèrent leur appui.

L'avènement d'Henri IV, en 1399, fut marqué par une vague de répression contre l'hérésie. En 1401 fut promulgué le premier décret anglais qui condamnait les hérétiques au bûcher (De haeretico comburendo). Le premier martyr lollard, William Sawtrey, fut en fait brûlé quelques jours avant cet événement. En 1414, un soulèvement lollard, que menait sir John Oldcastle, fut rapidement écrasé par Henri V. La rébellion entraîna de sévères représailles et marqua la fin de l'influence politique ouverte des lollards. Les doctrines de Wyclif étaient, d'ailleurs, solennellement condamnées par le concile de Constance (1414-1418).

Contraint à la clandestinité, le mouvement, soutenu par quelques membres du clergé, se répandit donc en se limitant surtout au milieu des marchands et des artisans. Vers 1500, il connut une renaissance et, en 1530, le vieux courant lollard avait déjà commencé à se fondre avec les nouvelles forces protestantes. Sa tradition servit le développement de la Réforme et disposa l'opinion à accueillir favorablement la législation anticléricale qu'allait établir le roi Henri VIII.

Dès le début, le mouvement lollard eut tendance à négliger les subtilités scolastiques de Wyclif, lequel probablement n'écrivit qu'un très petit nombre des célèbres brochures qu'on lui avait tout d'abord attribuées. On trouve l'exposé le plus complet des premiers enseignements lollards dans les Douze Conclusions qui devaient être présentées au Parlement de 1395. Selon ce document, l'Église d'Angleterre se trouvait asservie à sa « marâtre, la grande Église de Rome » ; le sacerdoce, tel qu'il était conçu alors, ne correspondait pas à ce que le Christ avait établi ; le célibat des prêtres favorisait des péchés contre nature ; le « prétendu miracle » de la transsubstantiation rendait les hommes idolâtres ; les prélats devaient s'interdire d'être des juges ou des chefs temporels. Les Conclusions condamnaient les prières pour les morts, les pèlerinages, les offrandes aux images ; elles déclaraient que la confession à un prêtre n'était pas nécessaire au salut, que la guerre était contraire au Nouveau Testament et que le vœu de chasteté des moniales avait pour conséquence les horreurs de l'avortement et de l'infanticide.

Mouvement d'hommes apostoliques, en fait mal défini et mal organisé, en dépit de l'influence qu'il exerça, le[...]

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  • Universalis : services rédactionnels de l'Encyclopædia Universalis

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Pour citer cet article

Universalis. LOLLARDS [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • ARUNDEL THOMAS FITZALAN (1353-1414)

    • Écrit par Paul BENOÎT
    • 327 mots

    Archevêque de Canterbury et chancelier d'Angleterre. Le père de Thomas Arundel, Richard est un des cinq régents du royaume en 1355 ; son frère aîné, Richard, est membre du Conseil royal pendant la minorité de Richard II et l'un des ses gouverneurs. Thomas, évêque d'Ely dès 1374, rejoint...

  • HENRI IV DE LANCASTRE (1367-1413) roi d'Angleterre (1399-1413)

    • Écrit par Roland MARX
    • 338 mots

    Connu plutôt sous le nom de Henri Bolingbroke, fils de Jean de Gand, Henri IV usurpe le trône en 1399 et fonde la nouvelle dynastie des Lancastre. Son action a été menée contre Richard II, coupable de l'avoir banni et d'avoir confisqué à son profit les biens de Jean de Gand à la mort de celui-ci...

  • HENRI V (1387-1422) roi d'Angleterre (1413-1422)

    • Écrit par Roland MARX
    • 378 mots
    • 1 média

    Très tôt mêlé aux affaires du royaume et sans doute l'un des responsables de la politique continentale plus vigoureuse adoptée par son père vers la fin de sa vie, Henri V demeure surtout le grand vainqueur anglais de la guerre de Cent Ans. Deux ans après être monté sur le trône,...

  • ROYAUME-UNI - Histoire

    • Écrit par Universalis, Bertrand LEMONNIER, Roland MARX
    • 43 835 mots
    • 66 médias
    ...Scot et de Guillaume d'Occam au xive siècle, les audaces théologiques de John Wyclif, qui, dans les années 1370-1380, fait naître le mouvement des lollards sur un fond d'antipapisme, de rejet de la tradition et de précoce affirmation du droit des princes et du libre-arbitre des individus, font...

Voir aussi