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THIERRY DE FREIBERG (1250 env.-env. 1310)

Maître dominicain qui, au xiiie siècle, en dépit de l'entrée d'Aristote dans les universités, se montre fidèle au néo-platonisme. Reçu dans l'ordre des Frères prêcheurs, Thierry de Freiberg gagna Paris en 1285, où il devint maître en théologie en 1297. Malgré les fonctions qu'il remplit dans son ordre, il écrivit de nombreux ouvrages portant sur des questions aussi bien philosophiques que scientifiques : la lumière, les couleurs, les moteurs célestes, la nature divine, les anges, la volonté humaine, la connaissance. Sa pensée reste fascinée par les thèmes caractéristiques du néo-platonisme latin, comme celle de Guillaume de Moerbeke, de Berthold de Moosburg, de Maître Eckhart, de Jean Tauler et Henri Suso. Thierry s'inspira principalement de l'Elementatio theologica de Proclus, dont la doctrine lui paraît conciliable avec saint Augustin et avec Aristote.

Le système qu'il propose consiste à intégrer des éléments aristotéliciens et thomistes à une métaphysique émanatiste et à une psychologie augustinienne. La procession est une procession causale à partir d'un principe premier qui est l'Un. Viennent ensuite les intelligences, les âmes et les corps. Seules les premières peuvent recevoir le nombre de l'acte créateur, car elles sont des agents intelligibles et éternels au-dessus desquels Dieu demeure, dépassant toute éternité. Les corps célestes appartiennent au temps, mais ne sont pas périssables ; les substances terrestres seules sont mortelles. De la même manière que tous les êtres procèdent directement ou indirectement de Dieu, ils reviennent vers lui. Cette conversio est interprétée par Thierry dans un sens pluraliste et finaliste. L'individuation n'est pas due à un principe quantitatif, mais à un principe qualitatif : l'âme, conçue comme la forme substantielle du corps, ne se distingue pas de ses facultés. L'intellect agent est une intelligence pure dérivée du Logos. L'être et l'agir ne sont qu'un. La connaissance de la vérité et l'activité morale elle-même ne sont possibles que par la connaissance des raisons éternelles. Mais notre connaissance humaine de ces raisons divines est inadéquate du fait de notre corps, qui demeure un obstacle au plein épanouissement de l'âme.

Par ailleurs, Thierry reprend néanmoins certaines thèses thomistes telles que unité de la forme substantielle, passivité de la matière première, impossibilité intrinsèque d'une matière sans forme et possibilité intrinsèque d'une création ab aeterno. Il conserve les doctrines scolastiques des deux entendements, de l'irréductibilité de la sensation et de la pensée, de la composition de la matière et de la forme. Mais il combat la distinction réelle entre l'essence et l'existence, suivant en cela Henri de Gand et Godefroid de Fontaines.

On pense que Thierry de Freiberg eut pour auditeur et disciple un autre dominicain allemand, Berthold de Moosburg, dont l'œuvre principale est une Expositio in elementationem theologicam Procli (1320 env.) et qui déclare se rattacher à l'école d'Albert le Grand.

— Denis COUTAGNE

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Denis COUTAGNE. THIERRY DE FREIBERG (1250 env.-env. 1310) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

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