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JUILLET PIERRE (1921-1999)

Pierre Juillet, le conseiller de l'ombre par excellence, a suivi Georges Pompidou de Matignon à l'Élysée, puis accompagné les premiers pas de Jacques Chirac sur le devant de la scène politique.

Né en 1921 dans la Creuse, où il conservera toujours une gentilhommière et un élevage de moutons, Pierre Juillet n'a pour tout bagage qu'une licence en droit. Cela le conduit naturellement à devenir avocat, en 1945, une profession qu'il n'exercera pourtant qu'une quinzaine d'années. Car la politique l'appelle. Très jeune, il s'était déjà engagé dans la Résistance, puis avait adhéré en 1947 au Rassemblement du peuple français (R.P.F.) créé par le général de Gaulle. Il épouse d'ailleurs, quatre ans plus tard, une des secrétaires de l'homme du 18 juin.

En 1958, il est chef de cabinet d'André Malraux, qui inaugure la fonction de ministre des Affaires culturelles. Mais c'est dans l'ombre de Georges Pompidou qu'il va faire l'essentiel de son parcours. À Matignon, il présente à son nouveau patron Marie-France Garaud, qui va devenir son alter ego et formera avec lui ce qu'on appellera un « couple infernal ». Pompidou élu président, il bataille contre un autre duo de conseillers, formé par Édouard Balladur et Michel Jobert. Il obtient du chef de l'État, en 1972, le renvoi de Jacques Chaban-Delmas, que Mme Garaud et lui-même vouent aux gémonies, et il veille à la carrière d'un jeune ministre nommé Jacques Chirac.

C'est encore pour faire pièce à Chaban qu'il pousse Chirac à lancer son « Appel des 43 » (parlementaires U.D.R.) et à soutenir indirectement la candidature de Valéry Giscard d'Estaing dans la course à l'Élysée. Quand Jacques Chirac devient Premier ministre, le couple Juillet-Garaud revient à Matignon. Mais c'est deux ans plus tard la rupture avec Giscard, la fondation du Rassemblement pour la République (R.P.R.), et la bataille pour la mairie de Paris. Pierre Juillet est alors si assuré de son influence que, un jour où Chirac le remercie de l'avoir aidé à conquérir la capitale, il réplique du tac au tac : « C'est la première fois que l'on voit un cheval remercier son jockey. »

Après les élections législatives de 1978, il tente encore, cette fois en vain, de barrer la route à Chaban qui brigue le perchoir de l'Assemblée nationale. Mais l'influence du couple demeure, d'autant plus forte que Jacques Chirac est victime d'un grave accident de la route en novembre 1978. Le 6 décembre, Pierre Juillet et Marie-France Garaud lui font signer sur son lit d'hôpital ce qui restera dans l'histoire comme « l'Appel de Cochin », un texte dans lequel le président du R.P.R. stigmatise « le parti de l'étranger » incarné par Giscard. La campagne européenne de 1979 tourne au fiasco pour la liste R.P.R. conduite par Chirac (16 p. 100 des voix, contre 28 p. 100 à la liste U.D.F. emmenée par Simone Veil).

Sur l'insistance de sa femme, mais aussi de barons du gaullisme qui, tel Alexandre Sanguinetti, stigmatisent « la bande des quatre » (Juillet, Garaud, Pasqua, Guéna), Jacques Chirac se sépare le 11 juin 1979 du « couple infernal ». Pierre Juillet s'en retourne à ses moutons de la Creuse et à la Compagnie générale des voitures à Paris, dont il est le président-directeur général depuis 1964, et jusqu'en 1987. Il ne sortira plus qu'une seule fois de sa réserve, lors du procès de Maurice Papon en 1997, pour dénoncer le discours du Vél' d'Hiv' prononcé deux ans plus tôt par son ancien poulain et réaffirmer que « Vichy n'était pas la France ».

— Bruno DIVE

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Écrit par

  • : journaliste éditorialiste à Sud Ouest

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Bruno DIVE. JUILLET PIERRE (1921-1999) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

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