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VALENCIENNES PIERRE HENRI DE (1750-1819)

En dépit d'une formation dans l'atelier d'un peintre d'histoire, Gabriel Doyen, Pierre Henri de Valenciennes se consacre entièrement au paysage. C'est un peintre qui a beaucoup voyagé et qui possède une véritable culture encyclopédique. Sa carrière marque ses efforts pour faire triompher le genre du paysage historique : admis à l'Académie royale de peinture et de sculpture, grâce à De Machy (1787), il expose au Salon puis fait paraître en 1800 Éléments de perspective pratique à l'usage des artistes, suivis de réflexions et conseils à un élève sur la peinture et particulièrement sur le genre du paysage (Paris, an VIII). Devenu professeur de perspective à l'École impériale des beaux-arts, il obtient peu avant sa mort la création d'un prix du paysage historique (1816), supprimé en 1863, car il n'a plus de raison d'être au moment du triomphe du naturalisme. Curieusement Valenciennes ne serait guère connu par ses paysages composés auxquels on a reproché une certaine confusion et l'aspect terne du coloris, comme Cicéron découvrant à Syracuse le tombeau d'Archimède (1787, musée de Bourg-en-Bresse). Mais le peintre a laissé de très nombreuses études (musée du Louvre) dont il se sert pour composer ensuite ses tableaux. C'est par elles qu'il est surtout connu. Il s'agit de véritables petites peintures à l'huile, faites d'après nature, et non plus d'aquarelles ou de sanguines. Le sujet est en général tiré de paysages romains (Le Cyprès, Les Deux Peupliers). On y trouve à la fois un réel sens de l'observation de la nature, une science des volumes suggérés par touches presque carrées, et surtout une extrême audace de la lumière (Le Chemin au soleil, aux environs du lac de Nemi). Il est impossible, devant ces œuvres, de ne pas évoquer Corot et les paysagistes romantiques. Parfois même la nature revêt une force dramatique, un souffle accentué par la vigueur de la touche (Soleil couchant).

Valenciennes possède une nouvelle sensibilité devant la nature, mais, au contraire de ses études, son paysage composé animé par l'homme est « toujours habitable et encore habité », selon les théories de Zampieri et de Poussin. L'artiste impose à sa sensibilité le langage rationnel d'une recherche d'un beau idéal prôné par le néo-classicisme de Winckelmann et de Quatremère de Quincy. Pour eux, comme pour Valenciennes, il n'y a de nature que « parée des richesses de l'imagination ». Se méfiant du hasard et des accidents de la nature, auxquels son intérêt n'est que trop porté, Valenciennes a connu l'inconfortable position (celle des grands artistes de son époque) d'être partagé entre deux émotions esthétiques : la tradition du paysage ordonné, intellectuel et sensible (pour H. Focillon) et l'expression romantique (pour L. Venturi). Son art annonce maints développements de l'art du paysage : Corot en a connu l'enseignement par ses héritiers et plus près de nous, André Lhote a retrouvé dans son Traité du paysage (Paris, 1939) les lois fondamentales énoncées par Valenciennes.

— Jean-Pierre MOUILLESEAUX

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Écrit par

  • : historien de l'art, chargé de mission à la Caisse nationale des monuments historiques et des sites

Classification

Pour citer cet article

Jean-Pierre MOUILLESEAUX. VALENCIENNES PIERRE HENRI DE (1750-1819) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • BARBIZON ÉCOLE DE

    • Écrit par Jacques de CASO
    • 3 471 mots
    • 7 médias
    ...études » d'après nature, la simple articulation des masses du paysage que les peintres simplifiaient en larges aplats de tons. En fait, ces artistes, Valenciennes ou d'Aligny, s'interrogeaient sur la rénovation de la peinture de paysage dans des termes que partageaient leurs contemporains anglais – ceux-là...
  • COROT JEAN-BAPTISTE CAMILLE (1796-1875)

    • Écrit par Adrien GOETZ
    • 1 651 mots
    • 7 médias

    Zola voyait en Corot un précurseur de Pissarro et de Jongkind, le premier à avoir rompu avec le paysage classique hérité de Poussin, pionnier de la peinture de plein air et du “sentiment vrai [...] de la nature” (Mon Salon. Les paysagistes, 1868). Ce jugement, fondé essentiellement sur les paysages...

Voir aussi