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SANDERS PHAROAH (1940-2022)

Pharoah Sanders - crédits : Philippe Gras

Pharoah Sanders

Porté par une profonde quête spirituelle et un goût prononcé pour l’expérimentation, le saxophoniste américain Pharoah Sanders a contribué à l’apogée du free jazz, notamment à travers sa collaboration avec John Coltrane au milieu des années 1960.

Farrell « Pharoah » Sanders naît le 13 octobre 1940 dans une famille modeste de Little Rock (Arkansas), une ville imprégnée du blues du Mississippi. Sa mère joue de l’harmonium, et son père pratique également la musique. Dès l’enfance, il s’initie à plusieurs instruments – tuba, batterie, flûte, clarinette –, notamment à l’église, et joue du saxophone ténor dans l’orchestre de son lycée. En 1959, il s’établit à San Francisco où il fait ses premières armes dans divers groupes de rhythm and blues aux côtés de Richard Boone, Ed Kelly, Smiley Winters ou encore Robert Porter. À compter de 1962, il s’installe à New York où, sans le sou, il mène une vie difficile. Il s’ouvre à l’avant-garde de son temps, écoutant Sonny Rollins, Eric Dolphy et Ornette Coleman. Au saxophone ténor, il est le partenaire de Billy Higgins, Sun Ra – qui lui attribue le surnom de « Pharoah » –, Don Cherry, John Gilmore et Rashied Ali.

À partir de 1965, Pharoah Sanders devient l’un des compagnons musicaux de John Coltrane qu’il accompagne jusqu’à sa mort, en 1967. Avec de longues tirades tourmentées aux saxophones ténor et soprano, il aventure son jeu instrumental dans une fureur difficilement contenue et jusqu’à des limites insoupçonnées. Une sonorité écorchée, râpeuse, un registre plongeant des aigus perçants aux graves caverneux enflamment un jazz libertaire en lutte pour les droits civiques. Dans des improvisations torturées et tumultueuses, Pharoah Sanders passe de la convulsion à l’extase, de la transe qui exorcise ses démons à la sérénité. Il participe aux derniers enregistrements de John Coltrane chez Impulse! : Ascension, Selflessness, Om et Meditations(1965), Cosmic Music, Live at the Village VanguardAgain! (1966) et Expression (1967).

S’il s’inscrit à l’évidence dans la descendance coltranienne, il la prolonge en terres inconnues et s’affirme comme l’une des personnalités les plus marquantes de sa génération. Plusieurs albums en témoignent dès cette époque : Symphony forImprovisers et Where Is Brooklyn? (Blue Note, 1966), deux opus signés Don Cherry, et Pharoah’s First (ESP-Disk, 1964), Tauhid ou encore Karma et son morceau « The Creator Has a Master Plan » (Impulse!, 1966 et 1969), qu’il enregistre en tant que leader.

Les années 1970 constituent un temps fort de sa créativité et de sa production discographique. Maître du jazz spirituel, il puise alors dans les traditions orientales et africaines pour conjurer les tensions qui divisent les hommes et transformer sa musique en véritable expérience mystique, élargissant, par un étonnant mélange de philosophies où domine le soufisme, les horizons du free jazz. Il poursuit une étroite collaboration avec Alice Coltrane – Ptah, the El Daoud et Journey inSatchidananda (Impulse!, 1970) – et signe, le plus souvent en compagnie du pianiste Lonnie Liston Smith et du contrebassiste Cecil McBee, quelques albums mémorables : Jewels of Thought (1969), DeafDumb Blind (1970), Thembi (1971), Black Unity (1971), Love in Us All et Elevation (1973), Village of ThePharoahs (1973), tous chez Impulse!. Il enregistrera également par la suite avec des musiciens traditionnels venus du monde entier, comme le Marocain Mahmoud Guinia, le Sud-Africain Bheki Mseleku, la Japonaise Yoko Ito Gates et le Nigérian Babatunde Olatunji.

Au cours des années 1980, l’intérêt du public et des médias semble s’assoupir au gré de diverses tentatives avortées du musicien pour faire évoluer son style vers le jazz rock, le hard bop, l’électro ou même le disco. Pharoah Sanders semble retrouver, à l’orée des années 1990,[...]

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Pour citer cet article

Pierre BRETON. SANDERS PHAROAH (1940-2022) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Média

Pharoah Sanders - crédits : Philippe Gras

Pharoah Sanders

Autres références

  • FREE JAZZ

    • Écrit par Eugène LLEDO
    • 656 mots
    • 3 médias

    Caractérisée par le retour à l'improvisation collective, cette « New Thing » est une expression esthétique qui correspond à une prise de conscience politique des musiciens afro-américains. Elle connaît son apogée dans les années 1960 grâce à Albert Ayler, Ornette Coleman et Cecil...

Voir aussi