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HAWTHORNE NATHANIEL (1804-1864)

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L'exploration souterraine

La pente de l'imagination hawthornienne conduit irrésistiblement vers les régions souterraines, les régions interdites de la conscience malade, malheureuse. La santé et l'optimisme du Nouvel Adam américain, sûr de lui et confiant dans l'avenir, n'existent qu'à l'extrême limite du spectre moral hawthornien. Pas plus que Faulkner, Hawthorne ne croit à l'avenir. Sa conscience vit au passé. Passé psychologique plus encore qu'historique. Il s'agit d'une époque de la conscience américaine, époque de superstition, de persécutions, d'hallucinations collectives, de crimes perpétrés au nom de croyances fanatiques. Ce passé n'est pas seulement à ses yeux un moment pittoresque de l'histoire des États-Unis, c'est avant tout une province de l'esprit, une province allégorique, une région secrète et ténébreuse. Même le microcosme colonial qui gravite autour d'Endicott, le champion de l'indépendance américaine, est un reflet intérieur : Hawthorne nous le peint « en abyme » dans le miroir de l'armure du héros puritain. Tout est inclus dans le cercle magique de l'imaginaire. Les tribulations des héros hawthorniens, leurs itinéraires capricieux sont du domaine de l'onirisme. Wakefield qui erre par les rues, se fuyant lui-même, refusant le bonheur, est une conscience enfermée dans son propre dédale. Le jeune Robin, à la recherche de son parent, le major Molyneux, se perd dans le même labyrinthe nocturne peuplé de masques, de figures fantasmagoriques et de démons, pour découvrir enfin l'identité ambiguë de son père symbolique. Le révérend Hooper se couvre le visage d'un voile noir qui symbolise la noirceur secrète de l'âme et la solitude de l'individu incapable d'échapper à son cauchemar intérieur. Le jeune sieur Brown, en pleine lune de miel, quitte son épouse pour s'enfoncer au cœur de la forêt et se rendre au sabbat des sorcières.

La seule hantise du péché ne saurait rendre compte de la complexité de cette œuvre où se trouvent inextricablement mêlées dans un rêve unique une expérience adamique à rebours (de l'innocence à la connaissance du mal), une crise de croissance, une expérience perverse, presque sadique (au sens magnifique du terme) et une expérience esthétique. Ethan Brand, enfin, nous montre un héros de la même trempe qui pousse jusqu'à ses conséquences dernières l'alchimie maléfique et se détruit par le feu qui émane de la nuit même de la conscience oppressée.

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Écrit par

  • : professeur de littérature américaine à la faculté des lettres de Clermont-Ferrand

Classification

Pour citer cet article

Jean NORMAND. HAWTHORNE NATHANIEL (1804-1864) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Article mis en ligne le et modifié le 14/03/2009

Média

Nathaniel Hawthorne - crédits : Hulton Archive/ Getty Images

Nathaniel Hawthorne

Autres références

  • LA LETTRE ÉCARLATE, Nathaniel Hawthorne - Fiche de lecture

    • Écrit par
    • 1 061 mots

    Les expériences et les tendances contradictoires de Nathaniel Hawthorne (1804-1864), écrivain qui est peut-être le plus représentatif des États-Unis du xixe siècle, convergent dans La Lettre écarlate, son meilleur roman, publié en 1850, et que Henry James considérait, quarante ans plus tard,...

  • ÉTATS-UNIS D'AMÉRIQUE (Arts et culture) - La littérature

    • Écrit par , , , , , , et
    • 40 118 mots
    • 25 médias
    ...; ou bien ce héros n'est-il qu'un usurpateur, un Jay Gatsby, par exemple, qui renie ses parents, invente sa nouvelle identité et se fait bootlegger ? Hawthorne avait depuis longtemps proclamé que la lignée des propriétaires de la maison aux sept pignons (The House of the Seven Gables, 1851) ne fondait...
  • JAMES HENRY (1843-1916)

    • Écrit par
    • 2 121 mots
    • 2 médias
    ...qui la domine, et de nombreux prétendants refusés. Ce portrait qui se construit par touches est inoubliable, tout comme celui d'une autre puritaine, Hester Prynne de La Lettre écarlate : James a d'ailleurs plus d'une affinité avecNathaniel Hawthorne, auquel il consacra un livre en 1879.