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OZOUF MONA (1931- )

Philosophe étudiant l'histoire, chercheur pensant l'éducation, essayiste réfléchissant sur le roman – on pourrait ajouter Française née en Bretagne –, Mona Ozouf a suivi un itinéraire dont les tensions apparentes prennent sens dans une grande quête de l'unité. Présenté, avec une précision distanciée, dans son ouvrage Composition française, ce parcours retrace expériences et épreuves vécues, transposées par la grâce de l'écriture en véritable philosophie humaniste.

Née en 1931 dans les Côtes-du-Nord, au sein d'un foyer d'instituteurs militants alliant préoccupations pédagogiques et défense de la langue bretonne, Mona Sohier est confrontée très jeune à une épreuve dramatique, la mort de son père âgé de trente-trois ans. Proche du communisme et laïque, il était propagandiste d'une culture bretonne traditionnelle, qu'il avait apprise et que l'école qu'il représentait rejetait de facto. Son épouse, bretonnante, s'était dévouée, en revanche, à l'enseignement du français dès la maternelle.

Ce faisceau de forces conjuguées et antagonistes constitue le creuset de la formation de la jeune fille. Excellente élève de l'école républicaine, elle suit, logiquement, le cursus méritocratique, via l'École normale supérieure jusqu'à l'agrégation de philosophie, sans cesser de s'imprégner de la culture celtique. Fille de son temps et de son milieu, elle épouse un historien, Jacques Ozouf, qui l'introduit dans un groupe de jeunes intellectuels engagés au Parti communiste, parmi lesquels François Furet et Emmanuel Le Roy Ladurie. La proximité avec le Parti communiste s'arrête en 1956, mais l'intérêt pour l'espace public ne cessera jamais.

Mona Ozouf entre au C.N.R.S. comme historienne, et y achève sa carrière en tant que directeur de recherche. Son œuvre, abondante, se structure autour de trois grandes thématiques unifiées par ses interventions publiques. Commencées avec Jacques Ozouf, les études historiques consacrées à l'école, aux enseignants et au rapport avec la nation ont mis en relief l'invention et la permanence de valeurs collectives incarnées par des personnes conscientes de leurs responsabilités, dans la fabrication d'une morale publique, considérée comme politique. L'attention portée notamment aux mémoires et aux biographies insiste sur la rencontre entre dimensions individuelle et collective. L'histoire de la Révolution française représente évidemment le pôle le plus important et sans doute le plus visible de l'œuvre. Paru en 1976, son livre La Fête révolutionnaire fait date par son sujet, entre histoire classique et anthropologie, comme par son traitement, entre érudition et réflexion de philosophie politique. Il inaugure une série d'analyses de la Révolution, jalonnée par des études spécifiques entourant des ouvrages conséquents, tous porteurs d'une vision organisée et engagée.

D'emblée, Mona Ozouf s'est située hors de l'historiographie universitaire commune à l'époque, en récusant le « jacobinisme » vu comme socle et horizon. En concordance, voire en communauté d'écriture, avec François Furet, elle entreprit de mettre en lumière les ressorts politiques de l'entreprise révolutionnaire, unifiée, selon elle, par un projet de régénération sociale contraignant, reprenant à son compte la sacralité de la monarchie déchue pour asseoir son pouvoir et imposant un cadre de pensée irrespectueux des différences régionales et sociales. La dénonciation de l'abstraction révolutionnaire, qui échoue à imposer des utopies philosophiques aussi grandioses qu'inadaptées ou manipulatrices, traverse les ouvrages individuels ou collectifs de Mona Ozouf. La démonstration aboutit, dans le livre dédié à l'épisode de Varennes, à la description des contradictions et des contraintes qui rendent les protagonistes incapables[...]

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Jean-Clément MARTIN. OZOUF MONA (1931- ) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

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