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LÉVINAS MICHAËL (1949- )

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Une œuvre à la dimension théâtrale

Selon le compositeur, toute son œuvre tendrait vers une dimension théâtrale. Il refuse en effet la notion « du musical comme seule élaboration du son » et instaure les matériaux sonores dans des lieux qu'il investit et qu'il occupe comme au théâtre. Dans le Deuxième Concerto pour un piano-espace (1980), la théâtralité intervient directement dans l'espace, redimensionné et repensé pour le piano.

Michaël Lévinas utilise également la technologie comme un élément de mise en scène du son. Le son instrumental est défini par lui comme l'« immédiateté », et se présente comme un élément pur avec lequel on ne peut jouer ou tricher alors que la technologie devient en quelque sorte « une mise en scène du son ». Dans Contrepoints irréels III-Rencontres (1980), il travaille la polyphonie de manière à mettre en scène l'idée de l'écho : les embouchures des flûtes se répondent par l'intermédiaire d'une boîte d'écho.

Au milieu des années 1990, Michaël Lévinas déclare que « c'est à l'opéra, paradoxalement, que tend toute [son] œuvre instrumentale » et commence la composition de GO-gol. L'œuvre, en deux actes, pour sept solistes, chœur mixte, chœur d'hommes et grand orchestre, d'après un livret de Frédéric Tristan remanié et adapté par le compositeur lui-même, est créé le 21 septembre 1996 à la Filature de Mulhouse, dans le cadre du festival Musica de Strasbourg, dans une mise en scène de Daniel Mesguich. Le grand orchestre est fusionné avec une partie électronique réalisée à l'IRCAM et dont le dispositif intervient en temps réel dans le déroulement musical. Grand connaisseur de la littérature russe, Michaël Lévinas s'est inspiré du roman Le Manteau de Nicolas Gogol. L'histoire concise et simple nous raconte la vie d’Akaki Akakievitch, petit fonctionnaire modeste et souffre-douleur de ses collègues, particulièrement raillé pour son manteau usé. Il décide alors de se faire confectionner un manteau neuf, ce qui lui vaut une invitation à une réception dans les beaux quartiers de Saint-Pétersbourg. En rentrant chez lui, il se fait dérober son manteau, demande alors de l'aide à un important personnage, qui le congédie. Malade, il meurt, mais réapparaît sous la forme d'un spectre qui détrousse les passants de la ville.

En 1998, à la suite d'une commande conjointe de la Comédie-Française et de l'Orchestre de Paris, l'opéra Euphonia est créé au Théâtre du Vieux-Colombier, à Paris, dans une mise en scène de Jean-Pierre Miquel. C'est à partir de la nouvelle utopique Euphonia ou la ville musicale, écrite par Hector Berlioz et parue dans la Revue et gazette musicale en 1844 puis dans Les Soirées de l'orchestre en 1852, que Michaël Lévinas assure l'adaptation théâtrale et la musique. Véritable allégorie du totalitarisme, Euphonia narre l'histoire d'une ville du même nom dont tous les habitants sont entièrement voués à la musique. Le compositeur Shetland, placé à la tête de la cité, a un projet politique unique : donner une représentation parfaite du chef-d'œuvre absolu de Gluck, Alceste. Mais le bel ordre de la cité sera perverti par une femme, et tout se terminera mal, dans un bal fantastique et tragique mené par un piano géant.

À partir de 1999, Michaël Lévinas travaille à l'adaptation puis à la composition de l'opéra Les Nègres, d'après la pièce éponyme de Jean Genet. Cinq années lui seront nécessaires pour achever cet opéra, commande conjointe de l'Opéra de Lyon et du Grand Théâtre de Genève. Cet ouvrage pour treize solistes, chœur, orchestre et dispositif électroacoustique, est créée le 20 janvier 2004 à Lyon, sous la direction de Bernhard Kontarsky et dans une mise en scène de Stanislas Nordey, fin connaisseur de l'œuvre de[...]

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Écrit par

  • : musicologue, analyste, cheffe de chœur diplômée du Conservatoire national supérieur de musique de Paris, chargée de cours à Columbia University, New York (États-Unis)

Classification

Pour citer cet article

Juliette GARRIGUES. LÉVINAS MICHAËL (1949- ) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Article mis en ligne le et modifié le 26/01/2018

Autres références

  • HYBRIDATION, musique

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    • 558 mots

    En musique, l'hybridation désigne des combinaisons sonores singulières, inouïes au sens propre, obtenues par mélange de sons et de timbres produits par des familles instrumentales différentes ou, depuis la fin des années 1980, en recourant à toutes les possibilités de l'électronique et de l'informatique....