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LÉVINAS MICHAËL (1949- )

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Métamorphose musicale, hybridation et synthèse sonore

Le compositeur a élaboré un système musical dans lequel il n'est pas rare de retrouver des éléments du fantastique ou du merveilleux. La féerie, l'onirisme ou le rêve se retrouvent dans le choix même des titres : Ouverture pour une fête étrange, La Conférence des oiseaux, Par-Delà, pour grand orchestre (1994).

Allant toujours plus loin dans l'imaginaire, illusionniste, explorateur de la matière sonore, Michaël Lévinas utilise comme élément de théâtralité des métaphores musicales. En 1977, il compose ainsi Voix dans un vaisseau d'airain, Chant en escalier, pour voix, flûte, cor, piano et bande magnétique ; par l'utilisation de figuralismes – harmoniques, acoustiques ou électroacoustiques –, il nous raconte une histoire étrange et mystérieuse en créant un univers musical fantastique : une femme monte un escalier, pour tomber au fond de la cage ; elle se relève, monte à nouveau puis tombe à nouveau. La répétition de l'action est figurée par une marche harmonique dont « la modulation en anneau entre la flûte et la voix évoque la profondeur de la cage d'escalier ». Les cris de la femme qui monte et tombe sont figurés par des trilles de pistons de cors doublés par des sons de caisse claire réverbérée, l'ensemble produisant une sensation de vertige.

Dans Les Rires du Gilles, la métaphore du rire, parfois traduite en pleurs, est figurée par une cymbale qui s'esclaffe et sanglote en tombant dans une cage d'escalier, puis tourne sur elle-même dans un mouvement de toupie.

Dans les années 1970, Michaël Lévinas n'avait pu faire aboutir toutes ses idées en raison de la précarité des moyens électroacoustiques de l'époque. Grâce à un travail effectué à l'IRCAM portant sur l'hybridation des timbres, il réussit, dans La Cloche fêlée, pour orchestre (1988), à « faire rentrer le son de l'orchestre à l'intérieur d'un transitoire d'attaque de gong ». Mais c'est avec son opéra GO-gol qu'il va le plus loin dans son travail sur l'hybridation des timbres instrumentaux et l'exploration des micro-intervalles. Il insiste sur le fait que « l'informatique sert à développer des tendances qui existaient depuis toujours dans l'orchestration ». Il poursuit l’exploration du timbre, à travers des contrepoints complexes, dans Les Lettres enlacées IV, pour quintette à cordes (2000), Se briser, pour ensemble (2008), Évanoui, pour un double orchestre et électronique (2009) et L’Amphithéâtre, pour orchestre (2012).

Libérée du sérialisme, la génération à laquelle appartient Michaël Lévinas a découvert la science de l'acoustique et cultivé une sensibilité au son de plus en plus aiguisée. Gratuit, le matériau s'exprime librement ; désormais, le compositeur possède une emprise directe sur lui.

— Juliette GARRIGUES

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Écrit par

  • : musicologue, analyste, cheffe de chœur diplômée du Conservatoire national supérieur de musique de Paris, chargée de cours à Columbia University, New York (États-Unis)

Classification

Pour citer cet article

Juliette GARRIGUES. LÉVINAS MICHAËL (1949- ) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Article mis en ligne le et modifié le 26/01/2018

Autres références

  • HYBRIDATION, musique

    • Écrit par
    • 558 mots

    En musique, l'hybridation désigne des combinaisons sonores singulières, inouïes au sens propre, obtenues par mélange de sons et de timbres produits par des familles instrumentales différentes ou, depuis la fin des années 1980, en recourant à toutes les possibilités de l'électronique et de l'informatique....