Abonnez-vous à Universalis pour 1 euro

SEMENOVA MARINA (1908-2010)

Méconnue en Occident mais célèbre et vénérée en Russie, la ballerine Marina Timofeïevna Semenova a incarné près d'un siècle de danse russe. Elle aura joué un rôle fondamental dans la survie d'un art ébranlé par la révolution russe, dans son éclat au cours des années staliniennes comme dans sa transmission aux générations suivantes.

Marina Semenova est née le 12 juin 1908 à Saint-Pétersbourg. Dès l'âge de dix ans, elle intègre l'école du ballet de Petrograd (nom donné à la ville de Saint-Pétersbourg de 1914 à 1924, avant qu'elle soit rebaptisée Leningrad puis à nouveau Saint-Pétersbourg) et sera la première danseuse entièrement formée par Agrippina Vaganova (1879-1951), alors directrice de l'école et connue pour sa technique d'enseignement. Le premier succès de la jeune Semenova commence à sa sortie de l'école en 1925 avec son rôle dans La Source (musique de Léon Minkus et Léo Delibes, chorégraphie d'Achille Coppini d'après un livret d'Arthur Saint-Léon), où elle fait preuve de vivacité et de précision technique, ce qui lui permet d'intégrer le ballet du théâtre d'État de Leningrad (ex-théâtre Mariinsky qui deviendra plus tard le Kirov) directement au rang de soliste, à l'âge de dix-sept ans. Marina Semenova y restera de 1925 à 1930 et connaîtra cinq années de gloire.

D'emblée, la jeune soliste se voit confier les rôles principaux des chefs-d'œuvre de Marius Petipa : Odette-Odile dans Le Lac des cygnes (musique de Piotr Ilitch Tchaïkovski), Nikya dans La Bayadère (musique de Léon Minkus), Aurore dans La Belle au bois dormant (musique de Tchaïkovski), le rôle-titre de Raymonda (musique d'Alexandre Glazounov), Aspicia dans La Fille du pharaon (musique de Cesare Pugni). Sa virtuosité impressionne mais ce sont surtout son style et sa manière d'interpréter ces rôles très romantiques qui vont marquer le public et l'histoire de la danse. Semenova apporte en effet à ces personnages de jeunes femmes souvent victimes une dimension héroïque, volontaire et maîtresse d'elle-même qui va également plaire aux officiels soviétiques qui considéraient le ballet classique comme une émanation décadente du régime tsariste. Or Semenova prouvait le contraire, et le ballet dans sa forme pré-révolutionnaire lui doit une part de sa survie en Russie soviétique.

Semenova, devenue la première star du ballet soviétique, est une danseuse chérie par Staline et réclamée par le ballet du Bolchoï de Moscou dès 1930. Elle arrive dans cette ville en tant que prima ballerina, avec son mari Victor Semenov, danseur et professeur. Elle y dansera jusqu'en 1952, illuminant les rôles du répertoire classique par sa bravoure teintée d'une réflexion approfondie sur la psychologie de ses personnages et la musicalité du mouvement, éléments fondamentaux acquis auprès de Vaganova. Aux ballets du répertoire d'abord dansés à Leningrad, Semenova ajoute les rôles de Kitri dans Don Quichotte (musique de Minkus, chorégraphie d'Alexandre Gorski d'après Marius Petipa), Giselle (musique d'Adolphe Adam, chorégraphie de Gorski d'après Jean Coralli et Jules Perrot), Macha dans Casse-Noisette (musique de Tchaïkovski, chorégraphie de Vassily Vaïnonen). Elle participe également à toutes les grandes créations soviétiques des années 1930 et 1940 qui font la part belle au « dramballets », œuvres très théâtralisées et souvent politiques. Semenova reprend les rôles principaux de La Fontaine de Bakhtissaraï (musique de Boris Asafiev, chorégraphie de Rostislav Zakharov) ou du Pavot rouge (musique de Reinhold Glière, chorégraphie de Vasily Tikhomirov et Lev Laschilin). Mais surtout, les deux grands chorégraphes du Bolchoï, Vaïnonen et Zakharov, font appel à Semenova qui crée des rôles pour le premier dans Flammes de Paris (musique de[...]

La suite de cet article est accessible aux abonnés

  • Des contenus variés, complets et fiables
  • Accessible sur tous les écrans
  • Pas de publicité

Découvrez nos offres

Déjà abonné ? Se connecter

Écrit par

Classification

Pour citer cet article

Ariane DOLLFUS. SEMENOVA MARINA (1908-2010) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )