BENGALI LITTÉRATURE
Carte mentale
Élargissez votre recherche dans Universalis
La littérature bengali contemporaine
La fiction
Les romanciers contemporains ont su faire quitter au roman le cadre « bourgeois » et urbain qui avait été longtemps le sien pour s'intéresser aux pêcheurs, aux tisserands, aux populations tribales et aux chômeurs. Mahasveta Devi (1926-2016) est aujourd'hui la romancière la plus célèbre et celle qui a reçu le plus de prix. Elle a été largement traduite en anglais mais aussi, plus timidement, en français. Militante des droits des populations tribales, elle insuffle dans ses romans et nouvelles une dimension épique. Dans La Mère du numéro 1084 (Hājāra curāmā, 1970), elle exprime la douleur d'une mère dont le fils, qui s'était lancé dans le mouvement gauchiste par idéalisme, a été tué par la police. On trouve chez cette romancière un certain excès de sentimentalité, mais aussi une force et une technique narrative remarquables.
Le roman historique compte de nombreux adeptes. L'auteur le plus célèbre est sans nul doute Sunil Gangopadhyay (1934-2012), qui mène de front une œuvre littéraire importante et une carrière de journaliste dans l'hebdomadaire populaire Desh. Il a brossé de vastes fresques évoquant les événements qui ont mené à l'indépendance du Bangladesh (East-West, 1990-1991), ou encore l'effervescence culturelle de Calcutta au xixe siècle (Those Days, 1997). On peut préférer The Youth (1967), roman proche de l'autobiographie, dans lequel il évoque les années de sa jeunesse, lorsque les tabous ne résistaient pas à l'exigence de liberté. Debesh Ray (né en 1936) a transporté la campagne du nord du Bengale sur la scène littéraire dans un roman riche en personnages de paysans et d'artisans ignorés des intellectuels de la capitale (Tistaparer brittanta [L'Histoire des rives de la Tista], 1988). Syed Mustafa Siraj (1930-2012) évoque dans ses nombreux romans les problèmes d'identité des musulmans du Bengale indien. Il faut encore mentionner la romancière Ashapurna Devi (1902-1995), qui a décrit les luttes des femmes de classe moyenne à la recherche d'un minimum d'indépendance. Écrivain prolifique et populaire, elle a remporté de nombreux prix. Auteurs appréciés d'un large public, Bimal Mitra, Sirshendu Mukhopadhyay, Samaresh Mazumdar traitent des problèmes de la classe moyenne. La fiction bengali contemporaine flatte le goût de son lectorat pour les belles histoires un peu mièvres. Les périodiques qui publient les romans en feuilletons recherchent des intrigues dotées de nombreux personnages et à rebondissements multiples. D'autres auteurs, plus exigeants, tel Lokenath Bhattacharya (1927-2001), peinent à trouver un public hors des cercles intellectuels.
La nouvelle est un genre toujours très apprécié et le Bengale a connu, par le passé, d'éminents auteurs. Les écrivains bengali s'y montrent plus à l'aise que dans le roman, d'autant qu'une écriture originale et plus personnelle est souvent recherchée. Le cadre de la nouvelle s'est déplacé loin de Calcutta et hors des classes moyennes. Les auteurs aiment désormais à dépeindre le milieu des ouvriers agricoles et des petits propriétaires éloignés des grandes agglomérations. Les dialectes y sont mis en valeur, ainsi que les particularismes locaux. Les auteurs sont sensibles aux problèmes de la société rurale contemporaine. Parmi les meilleurs nouvellistes, citons, parmi bien d'autres, les noms de Abul Basar, Abhijit Sen, Bhagirath Misra, Dibyendu Palit, Sadhan Chattopadhyay, Anil Ghorai, Amar Mitra. Anita Agnihotri et Nalini Bera sont des nouvellistes confirmées.
La poésie
La poésie bengali a adopté un tour personnel. Elle parle de révolte, individuelle ou collective, de doute existentiel et de mal de vivre. Après une génération où l'idéologie communiste, garante d'un avenir meilleur, prédominait, et dont Samar Sen (1916-1987) et Subhash Mukhopadhya (1920-2003) furent d'excellents représentants, leurs successeurs réunis autour de la revue Krittibas, se livrèrent à l'excès inverse, prônant l'individualisme, contestant la morale bourgeoise, l'intellectualisme et l'engagement révolutionnaire. Par la suite, assagis et quelque peu embourgeoisés, les plus doués d'entre eux se sont transformés en poètes officiels. Sakti Chattopadhyay (1933-1995) est ainsi devenu aux yeux du public une véritable star tout en restant simple et bohème.
Des poètes intellectuels tels que Arun Mitra (1909-2000), Sankha Ghosh (né en 1932), Sanjay Bhattacharya (mort en 1969), Alok Sarkar et Lokenath Bhattacharya s [...]
1
2
3
4
5
…
pour nos abonnés,
l’article se compose de 8 pages
Écrit par :
- France BHATTACHARYA : professeur émérite de l'Institut national des langues et civilisations orientales
- Jharna BOSE : maître ès arts, université de Jadavpur, Calcutta
Classification
Autres références
« BENGALI LITTÉRATURE » est également traité dans :
CAṆḌĪ-DĀS BADU (XIVe-XVe s.)
L'un des poètes les plus célèbres du Bengale, Badu Chandîdâs (Caṇḍī-Dās) vécut à des dates imprécises, probablement situées entre 1350 et 1450. On dit de lui qu'il fut l'humble desservant d'un temple de la Déesse dans le village où il naquit (district de Birbhum). Ses contemporains furent cependant frappés par la fréquence de ses « extases », dont il sortait en chantant des cantiques inspirés : ce […] Lire la suite
CAREY WILLIAM (1761-1834)
Né dans le Northamptonshire, William Carey rejoignit, en 1779, l'Église baptiste, dans laquelle il devint pasteur tout en gardant son métier de cordonnier. Ses sermons ( Expect Great Things from God, Attempt Great Things for God ) et son ouvrage intitulé Enquiry Into the Obligations of Christians to Use Means for the Conversion of the Heathens , rédigé alors qu'il est à Leicester, marquent le reno […] Lire la suite
GĪTA-GOVINDA
L'un des plus célèbres poèmes lyriques de la littérature sanskrite. Attribué avec la plus grande vraisemblance à un brahmane bengali du xii e siècle, nommé Jayadéva, le Gīta-Govinda (« célébration du bouvier Krishna ») est, en fait, un petit drame à deux personnages, Krishna et Rādhā, auxquels s'ajoutent quelques comparses. Avatāra (« incarnation ») du dieu Vishnu, le jeune prince Krishna parcour […] Lire la suite
INDE (Arts et culture) - Langues et littératures
Dans le chapitre « Le marathe, le bengali et le singhalais » : […] D'autres langues indo-aryennes ont développé des littératures importantes : le marathe, le bengali, le singhalais. Les débuts de la littérature marathe remontent au xii e siècle avec le poète Mukundarāja qui vulgarisa les principes du Vedānta . Au xiii e siècle, Jnañdev, le « Dante du pays marathe », commenta librement en vers la Bhagavadgītā ; Nāmdev ( xiv e s.), dans ses chants, exprime en t […] Lire la suite
NASREEN TASLIMA (1962- )
Écrivain bangladeshi, Taslima Nasreen fut contrainte de s'exiler en raison de ses écrits controversés qui, aux yeux des fondamentalistes musulmans, jetaient le discrédit sur l'islam. Son sort a souvent été comparé à celui de Salman Rushdie, l'auteur des Versets sataniques (1988). Fille de médecin, née le 25 août 1962 à Mymensingh, dans le Pakistan oriental (auj. Bangladesh), Taslima Nasreen ent […] Lire la suite
L'OFFRANDE LYRIQUE, Rabindranath Tagore - Fiche de lecture
Parue en 1913, L'Offrande lyrique ( Gītānjali ) du poète indien Rabindranath Tagore (1861-1941), Prix Nobel de littérature la même année, est essentiellement ressentie par les Européens, dans le contexte de la Première Guerre mondiale, comme une invitation à soutenir les valeurs essentielles de l'existence humaine. Pour les lecteurs indiens, cet ouvrage représente le dépassement de la foi brāhma […] Lire la suite
PASTORALE, genre littéraire
Dans le chapitre « Les amours de Kṛṣṇa et de Rādhā » : […] Rādhā n'apparaît pas dans les Purāṇas , récits légendaires composés en sanscrit – ou du moins son nom ne s'y trouve pas. Mais dans les provinces orientales, au Bengale et au Bihar, dès le xiv e siècle, se développe une remarquable littérature composée essentiellement de chansons sur le thème des amours de Kṛṣṇa et Rādhā. Le décor est toujours le même : la solitude boisée du Vṛndāban, émaillé de f […] Lire la suite
RAY SATYAJIT (1921-1992)
L'Inde est un pays connu pour être le plus gros producteur de films au monde, à travers deux centres (Madras et Bombay) qui distillent des œuvres mythologiques ou d'action, chantées ou dansées. Satyajit Ray s'est toujours tenu éloigné des règles de l'industrie du cinéma commercial et a choisi de demeurer fidèle à sa ville (Calcutta, où il naît en 1921), à sa région (le Bengale), à sa langue et à s […] Lire la suite
ROY RĀM MOHAN (1772-1833)
Brahmane, né dans une famille orthodoxe du Bengale, l'un des représentants les plus intéressants de ces hindous qui s'efforcèrent d'harmoniser le Dharma (la « norme » universelle, la « loi » religieuse traditionnelle) et les valeurs positives de la civilisation occidentale. Rām Mohan Roy se prépara à un emploi de fonctionnaire à la cour des souverains moghols, ce qui le conduisit à étudier dans sa […] Lire la suite
TAGORE RABĪNDRANĀTH (1861-1941)
De son vivant, Tagore fut considéré comme le plus mystique des poètes et le plus poète des mystiques. Tandis que l'Inde retrouvait dans ses accents le souffle védique, l'Occident était séduit par l'un des rares écrivains indiens que de nombreuses traductions – réalisées en anglais par l'auteur lui-même – mettaient à sa portée. Non que Tagore fût le seul écrivain de langue bengali, mais son rayon […] Lire la suite
Voir aussi
Pour citer l’article
France BHATTACHARYA, Jharna BOSE, « BENGALI LITTÉRATURE », Encyclopædia Universalis [en ligne], consulté le 23 avril 2022. URL : https://www.universalis.fr/encyclopedie/litterature-bengali/