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L'ÎLE AUX CHIENS (W. Anderson)

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Stop motion

Ce qui frappe au premier abord est l’identité visuelle tout à fait singulière de son film. Certes, le réalisateur a déjà utilisé l’animation stopmotion pour enchanter le bestiaire de son Fantastic Mr Fox. Cette technique, qui permet de filmer des marionnettes image par image dans des décors en modèles réduits, semble avoir été créée pour lui. Burlesque lent ; goût pour le détail et la symétrie ; symphonie des couleurs et des textures : tels sont les invariants de tous ses longs-métrages, même ceux qu’il a réalisés avec des acteurs en chair et en os.

Pour autant, si l’on retrouve cette magie décorative dans L’Île aux chiens, une autre évidence s’impose : seule la stopmotion pouvait porter l’histoire d’Atari et de ses copains-cabots à un tel point de justesse. Non seulement parce que son côté artisanal renforce la dimension rétrofuturiste de l’intrigue, mais surtout parce que ses miniatures admirablement expressives renvoient aux enjeux mêmes du film. Pour Wes Anderson, c’est bien du côté des chiens (et des enfants) que se nichent l’altruisme et la solidarité. Or, grâce à son perfectionnisme et au travail de ses animateurs surdoués, nous voilà convaincus de l’« humanisme » de ses héros. Un casting vocal de rêve achève de nous séduire : Bill Murray, Scarlett Johansson, Tilda Swinton, Edward Norton, Jeff Goldblum, Greta Gerwig ou Frances McDormand dans la version originale ; Vincent Lindon, Isabelle Huppert, Romain Duris, Mathieu Amalric, Léa Seydoux, Daniel Auteuil ou Jean-Pierre Léaud dans la version française.

Ultime argument plaidant en faveur d’un film-étape, tout à la fois familier et différent ? L’hommage au Japon, bien sûr. Dans un premier temps, ce clin d’œil exotique semble aller de soi, tant le goût de la discipline dans le cadre, voire de l’image sans perspective, rapproche Wes Anderson d’un certain art pictural nippon. Pourtant, sa référence est moins l’estampe que le cinéma japonais.

De fait, le réalisateur américain revendique clairement les influences d’Akira Kurosawa (Chien enragé, 1949 ; Les salauds dorment en paix, 1960), de Shōhei Imamura (La Femme insecte, 1963) et même de Hayao Miyazaki (pour le message écologique de ses contes). Il s’agit pour lui de s’imprégner de l’esprit de leurs films, plutôt que de leurs manières de filmer, afin de livrer une vision futuriste du Japon telle qu’elle aurait pu être conçue dans les années 1960. De l’art du recyclage, et pas seulement pour des raisons esthétiques : ce rétro-futurisme lui permet de s’extraire résolument des territoires intimistes de ses premiers films pour répercuter nombre d’inquiétudes très actuelles.

— Ariane ALLARD

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Ariane ALLARD. L'ÎLE AUX CHIENS (W. Anderson) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Article mis en ligne le et modifié le 24/09/2018

Média

<em>L’Île aux chiens</em>, W. Anderson - crédits : 20th Century Fox - American Empirical Pictures - Indian Paintbrush - Scott Rudin Productions - Studio Babelsberg ; Prod DB/ AllPix/ Aurimages

L’Île aux chiens, W. Anderson