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PICART LE DOUX JEAN (1902-1982)

La réaffirmation des fonctions murales et monumentales de la tapisserie, l'étude attentive de ses techniques spécifiques, principes défendus par Jean Lurçat à la suite de sa redécouverte de l'Apocalypse d'Angers en 1929, ont été le point de départ de l'œuvre de cartonnier de Jean Picart le Doux.

Né à Paris le 31 janvier 1902 dans une famille d'artistes – son père était le peintre Charles Picart le Doux –, il fait ses études au lycée Condorcet et doit à seize ans apprendre un métier. C'est vers la reliure et les techniques typographiques que se dirige d'abord le jeune Picart le Doux, tout en suivant le soir des cours de dessin. Après avoir travaillé quelque temps dans une banque, puis chez l'éditeur Albin Michel, il est directeur technique aux éditions d'art Jeanne Walter de 1925 à 1931.

Se consacrant alors à des travaux d'art graphique, il se fait connaître dans le monde de la publicité et de l'illustration. Il obtient en 1942 le grand prix de l'Affiche de théâtre, ayant auparavant exposé ses premières œuvres à la galerie Billiet-Worms et à l'Exposition internationale de Paris de 1937.

La rencontre avec Jean Lurçat en 1939 va modifier radicalement son orientation artistique. L'action menée par ce dernier pour faire reconnaître la tapisserie en tant que genre artistique autonome alors que dominaient les « peintures tissées » (Braque, Picasso, Rouault, Dufy...) a déterminé en effet toute une génération : Picart le Doux mais aussi Saint-Saëns, Lagrange, Wogensky participeront à ce renouveau fondé sur l'étude approfondie des techniques de lissage, la limitation volontaire de la palette à une trentaine de tons (on en comptait plus de 14 000), le retour à un point robuste (5 fils au centimètre au lieu de 10). Ce mouvement, stimulé par la fondation, en 1947, de l'Association des peintres cartonniers de tapisserie dont Picart le Doux devient vice-président, s'organise à l'époque autour de Lurçat et de Denise Majorelle, qui ouvre en 1950 à Paris la galerie La Demeure, entièrement consacrée à la tapisserie. Fort de ce parrainage, Picart le Doux entame alors une carrière de peintre cartonnier, après un séjour à Aubusson auprès d'un maître lissier qui lui enseigne la technique de la basse lisse. Vers la fin de sa carrière (1961-1971), il se fera le défenseur de ce retour aux techniques anciennes dans le cadre de son enseignement à l'école des Arts décoratifs de Paris.

L'œuvre abondante laissée par Picart le Doux est d'inspiration profondément humaniste. L'exaltation de l'homme s'exprime par l'association de sa représentation avec celles de symboles cosmogoniques aussi bien que d'éléments terrestres primordiaux. Blé, vigne, soleil, poissons, étoiles, signes du zodiaque... sont autant d'emblèmes nécessaires à la traduction de la vie comme principe idéal. « Le malheur est toujours absent de mes tapisseries », affirme Picart le Doux. Les sujets les plus métaphysiques, L'Homme et la Pensée (1957), Le Temps (1962), La Justice (1966), les thèmes les plus graves sont traités avec une simplicité sereine. Nulle zone d'ombre, nul mystère dans cet univers tellurique, ordonnancé à la manière d'un jardin à la française, d'une fugue musicale ou d'un poème. Les symboles, au graphisme de plus en plus épuré, y sont limpides. Avec Cosmogonie (1948), il introduit pour la première fois dans son œuvre tissée un fragment de texte. Goethe, puis Agrippa d'Aubigné, Valéry, Rilke, Apollinaire, Saint-John Perse, Senghor, Eluard, Whitman, Desnos deviendront tour à tour prétexte et matière à l'inspiration (Juin ton Soleil..., 1957, Hommage à Federico García Lorca, 1964). Le principe des cartons numérotés ou peints, en référence à une gamme de couleurs préétablies, a permis aux[...]

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Pour citer cet article

Sophie DESWARTE. PICART LE DOUX JEAN (1902-1982) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • TAPISSERIE

    • Écrit par Pascal-François BERTRAND
    • 7 938 mots
    • 8 médias
    ...Derain, Matisse...). Tirant les enseignements des expériences tentées depuis la seconde moitié du xixe siècle, les peintres, tels que Marc Saint-Saëns et Jean Picard Le Doux, se rassemblèrent autour de Jean Lurçat pour fonder en 1947 l'Association des peintres-cartonniers de tapisserie ; Denise Majorel,...

Voir aussi