Abonnez-vous à Universalis pour 1 euro

GIRODET-TRIOSON ANNE LOUIS GIRODET dit (1767-1824)

Girodet fait partie, avec Drouais, Gérard, Fabre et Gros, de la première génération des élèves de David, qui étudièrent avant la Révolution dans son atelier, non d'ailleurs sans rivalités. Mais, comme les plus doués d'entre eux, il sut s'affranchir de son maître et développer une veine très personnelle, tout en s'inscrivant dans le même cadre théorique et en suivant, au moins à ses débuts, une carrière académique analogue à la sienne.

Né dans une famille aisée, très vite orphelin mais adopté par son tuteur, le docteur Trioson, qui eut soin de son éducation à Paris, Girodet entra chez David en 1785. Après deux tentatives infructueuses, il obtint le grand prix de peinture en 1789, et il séjourna en Italie de 1790 à 1795, d'abord à Rome puis, en raison des guerres révolutionnaires, à Naples, Gênes, Florence et Venise. Il avait dans le même temps obtenu un considérable succès en France, en exposant au Salon de 1793 Le Sommeil d'Endymion (1791, Louvre, Paris). Ce nu masculin à l'érotisme ambigu, complaisamment offert dans une lumière lunaire irréelle, rompait volontairement avec les thèmes héroïques et vertueux alors à la mode : « Je tâche de m'éloigner de son genre [de David] autant qu'il est possible », écrivait Girodet, ce qui ne l'empêcha pas de donner, l'année suivante, un tableau nettement plus orthodoxe par le sujet, la composition et la facture, Hippocrate refusant les présents d'Artaxerxès (1792, Faculté de médecine, Paris).

Portrait de Napoléon I<sup>er</sup>, Girodet-Trioson - crédits : Erich Lessing/ AKG-images

Portrait de Napoléon Ier, Girodet-Trioson

De retour en France, il se consacra, pour vivre, à l'illustration des ouvrages d'auteurs classiques, Virgile, Anacréon, Sapho (il devait toujours s'intéresser à l'estampe, et il compte ainsi parmi les promoteurs de la lithographie en France sous la Restauration). Il exécuta aussi des portraits, parmi lesquels celui de Mademoiselle Lange en Danaé (The Minneapolis Institute of Arts), allégorie satirique qui fit scandale au Salon de 1799. Le public et la critique furent encore plus surpris par les extravagances d'idée et de manière de L'Apothéose des héros français morts pour la patrie pendant la guerre de la liberté (1802, commandé pour la Malmaison, où le tableau est aujourd'hui encore conservé), un des premiers sujets inspirés des poèmes d'Ossian, peints en France : David alla même jusqu'à dire à ce sujet, selon Delécluze : « Girodet est fou [...]. Ce sont des personnages de cristal qu'il nous a faits là. » Girodet poursuivit dans cette voie originale, lui valant une renommée accrue, avec la Scène de déluge (1806, Louvre), qui remporta contre Les Sabines, de David, le prix décennal en 1810, ou Les Funérailles d'Atala (1808, ibid.), toile inspirée de Chateaubriand, dont il peignit d'ailleurs le portrait (1807-1809, musée de Saint-Malo). Le gouvernement impérial lui passa de nombreuses commandes, auxquelles il sut parfois donner un tour très personnel (La Révolte du Caire, 1810, Musée national du château de Versailles ; décoration des appartements de l'empereur et de l'impératrice à Compiègne à partir de 1809), réservant aux autres commandes un traitement plus convenu (Napoléon recevant les clés de Vienne, 1808, Musée national du château de Versailles ; portraits de Napoléon en costume impérial, dont vingt-six, sur une commande initiale de trente-six, furent exécutés entre 1812 et 1814). La Restauration lui demanda deux portraits de généraux vendéens, parmi les meilleurs d'une série destinée au château de Saint-Cloud (Bonchamps et Cathelineau, 1824, tous deux au musée de Cholet). Son Pygmalion et Galatée (château de Dampierre, coll. du duc de Luynes) avait été particulièrement remarqué au Salon de 1819.

À sa mort, Girodet était tenu pour un des très grands maîtres de l'école française, prolongeant de façon originale la tradition classique. On comprend[...]

La suite de cet article est accessible aux abonnés

  • Des contenus variés, complets et fiables
  • Accessible sur tous les écrans
  • Pas de publicité

Découvrez nos offres

Déjà abonné ? Se connecter

Écrit par

  • : ancien élève de l'École normale supérieure, professeur à l'université de Paris-IV-Sorbonne

Classification

Pour citer cet article

Barthélémy JOBERT. GIRODET-TRIOSON ANNE LOUIS GIRODET dit (1767-1824) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Média

Portrait de Napoléon I<sup>er</sup>, Girodet-Trioson - crédits : Erich Lessing/ AKG-images

Portrait de Napoléon Ier, Girodet-Trioson

Autres références

  • GIRODET (exposition)

    • Écrit par Barthélémy JOBERT
    • 1 012 mots

    La magistrale rétrospective Girodet, 1767-1824, tenue au musée du Louvre du 22 septembre 2005 au 2 janvier 2006, avant de gagner, légèrement modifiée, l'Art Institute de Chicago, le Metropolitan Museum de New York, puis le musée des Beaux-Arts de Montréal, a remporté à Paris un succès public mérité...

  • ROMANTISME

    • Écrit par Henri PEYRE, Henri ZERNER
    • 22 170 mots
    • 24 médias
    Il y a des cas, bien entendu, où poésie picturale et inspiration littéraire convergent. C'est grâce à Chateaubriand que Girodet peignit l'un des premiers tableaux romantiques : Les Funérailles d'Atala (1808), romantique par la tonalité sombre aussi bien que par l'exotisme du sujet. Ossian...
  • ORIENTALISME, art et littérature

    • Écrit par Daniel-Henri PAGEAUX, Christine PELTRE
    • 10 996 mots
    • 8 médias
    ...partie aux costumes, cette composition qui inspirera Delacroix est une œuvre essentielle dans l'orientalisme pictural. Autre élève de David, Anne Louis Girodet de Roucy-Trioson (1767-1824) nourrit d'exotisme un style qu’il veut différent de celui du maître, quêtant l'authenticité auprès de modèles...

Voir aussi