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SOREL GEORGES (1847-1922)

Sorel apparaît comme un homme libre et méconnu. Ce fils d'un bourgeois, commerçant malheureux, et d'une mère très pieuse est un philosophe révolutionnaire, fidèle au socialisme prolétarien découvert à l'âge mûr. Cet affamé de lectures a perçu très intensément la décadence de la société et la ruine des valeurs ; son œuvre nombreuse n'a d'autre but que d'y faire face avec un courage toujours repris. À la racine de sa pensée déconcertante, on trouve d'abord un technicien, féru de mathématiques, ayant pris conscience de l'importance de l'industrie, de la bourgeoisie qui l'a promue et de l'activité humaine qui la sous-tend, puis un moraliste puisant ses leçons dans un pessimisme au cœur duquel jaillit le désir d'une rénovation de l'homme. Tout ce que Sorel a rejeté s'inspire d'un tel dessein. Au premier regard, ses attitudes politiques successives semblent contradictoires. On a voulu tirer son héritage dans des sens opposés. Il manqua souvent de rigueur théorique, et l'aspect mystique de son message lui a valu les sarcasmes, les sollicitations ou l'oubli. Il a cependant le mérite de n'appartenir à personne.

Un technicien philosophe

Né à Cherbourg, Georges Sorel, cousin de l'historien Albert Sorel (1842-1906), a été élève à l'École polytechnique, puis longtemps ingénieur des Ponts et Chaussées, principalement en Algérie et à Perpignan. En 1892, il démissionne et s'installe à Boulogne-sur-Seine où il mène jusqu'à sa mort une existence modeste, mais très engagée dans les problèmes de son temps.

Son union avec Marie David, issue d'une famille pauvre de paysans catholiques, a pour lui une grande importance. Sa famille n'ayant pas consenti à cette mésalliance, il ne se maria jamais, mais il dédie ses Réflexions « à la mémoire de la compagne de ma jeunesse [...] ce livre tout inspiré de son esprit ». Elle mourut prématurément en 1897.

Au moment de sa démission, Sorel a déjà publié, outre de nombreux articles, deux ouvrages : Contribution à l'étude profane de la Bible (1889) et Le Procès de Socrate (1889). Lecteur de Marx, de Proudhon, de Nietzsche, il suit les cours de Bergson au Collège de France. Sa pensée, quelque peu touffue et où perce son autodidactisme, « brasse » tous ces apports plus qu'elle n'en tire une harmonieuse synthèse. Les événements aussi le guident et lui donnent à réfléchir, notamment la naissance du syndicalisme révolutionnaire, ainsi que le succès ambigu remporté par les socialistes parlementaires et qui accompagne la révision du procès de Dreyfus. Une série d'écrits marque cette évolution.

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Pour citer cet article

Louis SOUBISE. SOREL GEORGES (1847-1922) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • JULLIARD JACQUES (1933-2023)

    • Écrit par Joël ROMAN
    • 1 010 mots
    ...origines du syndicalisme d’action directe, 1971 ; Autonomie ouvrière. Études sur le syndicalisme d’action directe, 1988). Il met en avant la figure de Georges Sorel, à qui il consacre un colloque en 1982. À partir de 1983, il anime avec Shlomo Sand les Cahiers Georges Sorel, qui deviennent la revue...
  • PROGRÈS

    • Écrit par Bernard VALADE
    • 8 628 mots
    • 2 médias
    Lorsque en 1906 paraissent, dans Le Mouvement socialiste, les études de Georges Sorel sur Les Illusions du progrès, les doutes se sont déjà multipliés concernant l'identification de l'accroissement des connaissances positives au progrès moral, du développement des sciences au progrès social....

Voir aussi