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KUHLAU FRIEDRICH (1786-1832)

Ce compositeur est curieusement passé à la postérité grâce à son répertoire pour flûte, encore très joué de nos jours. Il convient d'emblée de dissiper un malentendu : la spécialité de Kuhlau n'est pas la flûte dont, contrairement à certaines allégations, il n'a vraisemblablement jamais joué lui-même. Ses nombreuses partitions pour cet instrument ont correspondu le plus souvent à des commandes purement alimentaires. (Et il s'est fait, semble-t-il, beaucoup aider par le flûtiste de l'Orchestre royal de Copenhague, où il a passé la majeure partie de sa vie.)

Kuhlau est né à Uelzen, près de Hanovre. Son père était membre de l'harmonie d'un régiment dont les déplacements expliquent qu'on retrouve Kuhlau dans sa jeunesse successivement à Lüneburg, puis à Brunswick et enfin à Hambourg, où il parfait son éducation musicale auprès de Christian Friedrich Gottlieb Schwencke, alors cantor de l'église Sainte-Catherine. Un premier concerto est malheureusement perdu tandis que quelques œuvres chorales et de musique de chambre subsistent de cette période de jeunesse. L'arrivée des troupes napoléoniennes à Hambourg en 1810 pousse Kuhlau à s'enfuir à Copenhague. Il ne se doute pas qu'en s'installant dans la capitale du Danemark, où il restera jusqu'à sa mort, il allait contribuer à relancer la vie musicale de ce pays avant que Niels Gade n'en reprenne le flambeau. L'année suivante (1811) voit naître son Concerto pour piano en « ut » majeur (très ou trop proche de celui de Beethoven). En 1814, son premier succès scénique, le singspiel Roverborgen (Le Château des voleurs), signale l'intérêt de Kuhlau pour l'opéra. Viendront successivement Trylleharpen (La Harpe magique) en 1817, Lulu en 1824 (une œuvre fondée sur le même conte oriental qui a inspiré Schikaneder pour La Flûte enchantée de Mozart), William Shakespeare en 1826, Hugo og Adelheid en 1827 et, surtout, le célèbre Elverhøj (La Colline aux elfes) en 1828, œuvre populaire par excellence au Danemark et qui puise largement dans les thèmes du folklore local (elle se termine, ni plus ni moins, par une citation intégrale de l'hymne national danois). Dans l'intervalle, Kuhlau aura rencontré Beethoven à Vienne en 1825 (ce dernier l'appellera en plaisantant le « grand canonnier », tant il est vrai que Kuhlau a excellé dans l'art du canon musical !) et se sera taillé une réputation de pianiste concertiste, notamment en Suède. La fin de son existence sera plus sombre ; dès 1830 une série de catastrophes s'abat sur lui : ses parents décèdent, puis, la dernière année de sa vie, il perd tous ses biens personnels dans l'incendie de sa maison de Lyngby où disparaîtront hélas bon nombre de ses partitions. Atteint d'un « mal de poitrine » consécutif aux émanations des fumées toxiques, il ne s'en remettra pas. Les nombreux duos, sonates, variations, soli et autres thèmes et variations de Kuhlau écrits pour la flûte ne doivent pas faire perdre de vue que le meilleur de son talent s'est souvent exercé au piano, pour lequel il laisse une centaine d'œuvres (à deux ou quatre mains) dont beaucoup témoignent d'un talent original. Mais Kuhlau aura surtout influencé durablement la vie musicale danoise, notamment en introduisant des œuvres de Weber et de Beethoven dans le répertoire des concerts donnés à Copenhague, en créant la tradition des œuvres pour chœurs d'hommes que l'on retrouvera jusqu'après Nielsen et, enfin, en dispensant un enseignement sur lequel s'est fondée l'école danoise qui lui a succédé.

— Michel VINCENT

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Écrit par

  • : maître en lettres modernes et linguistique générale, chargé de cours à la faculté des lettres et sciences humaines d'Aix-en-Provence, producteur à Radio-France, directeur antenne musique, Radio France Internationale

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Pour citer cet article

Michel VINCENT. KUHLAU FRIEDRICH (1786-1832) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

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