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LOPE DE VEGA CARPIO FELIX (1562-1635)

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La comedia

Mille cinq cents pièces religieuses et profanes, au dire de l'auteur, dont moins de cinq cents nous sont parvenues. Un tel nombre conduit d'ordinaire à faire des considérations qualitatives ou des classements assez problématiques. Plutôt que de privilégier quelques titres, élevés au rang de chefs-d'œuvre, il faut saisir dans sa totalité ce théâtre où la personnalité déterminante de son plus éminent créateur finira par se perdre dans le grand « poème collectif dans lequel tout le monde réclame sa part et son droit à collaborer » (A. Castro).

En 1609, Lope de Vega tire le bilan de ce nouveau théâtre dont il a su rassembler les expressions éparses dans toute la Péninsule. L'Arte nuevo, en dépit de son ton polémique et de son ironie, est révélateur d'une double démarche. Le dramaturge y apparaît comme un artisan, exerçant une activité de pane lucrando ; il s'agit de faire (hacer) plus que d'écrire une comedia. D'où le caractère pragmatique des indications sur le moyen de se gagner les faveurs du public. Mais ce texte va plus loin qu'un simple recueil de préceptes pratiques. Lope de Vega n'est pas seulement le brillant improvisateur qui en une journée écrit une pièce de trois mille vers. Le travail énorme qu'il fournit crée des automatismes qu'on a pris trop souvent pour du naturel ou de la facilité. L'Arte nuevo contient surtout une esthétique du théâtre où Lope, dénonçant certaines conventions aristotéliciennes, propose la troisième voie de la tragi-comédie, mieux adaptée au public des corrales. Mais ce faisant il instaure d'autres conventions, celles d'une nouvelle dramaturgie capable de répondre à l'attente d'une société dominée par l'idéal monarchique et aristocratique.

La comedia lopesque remplit une fonction. Ses trois actes sont les étapes qui du spectacle du désordre de la vie amoureuse, politique, sociale conduisent au retour de l'ordre souhaitable. Ordre du mariage, de l'honneur recouvré, de la révolte justifiée par le roi. L'Arte nuevo est en réalité un nouvel art d'escamoter les conflits et d'exorciser la violence. Dans la tragi-comédie, le rire se mêle aux larmes, mais la catharsis se veut à la mesure d'une société en crise.

— Bernard GILLE

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Écrit par

  • : agrégé d'espagnol, maître assistant à l'U.E.R. d'études ibériques de l'université de Paris-IV

Classification

Pour citer cet article

Bernard GILLE. LOPE DE VEGA CARPIO FELIX (1562-1635) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Article mis en ligne le et modifié le 14/03/2009

Autres références

  • AUTO SACRAMENTAL

    • Écrit par
    • 3 125 mots
    • 1 média
    L'étonnant foisonnement des comédies de Lope de Vega et de ses émules multiplia les sources d'inspiration des autos. Maître Joseph de Valdivielso, théologien poète, fut le premier à pouvoir publier un recueil de Douze Autos sacramentales et douze comédies divines (1622). Il exploite...
  • COMEDIA, Espagne

    • Écrit par
    • 2 605 mots
    ...théâtre érudit à l'imitation de Plaute ou de Sénèque ; et enfin une farce populaire donnant dans la caricature et le divertissement dansé rustique. Lope vint, qui avait essayé sa plume dans quelques-unes de ces formes. En 1607, il lit dans une académie de Madrid – un salon littéraire – son ...
  • ESPAGNE (Arts et culture) - La littérature

    • Écrit par , et
    • 13 749 mots
    • 4 médias
    ...dans la poésie mélodique, éperdument éprise de nature et de délectable paix, de fray Luis de León (1527-1591), lui aussi tout nourri d'Antiquité. Lope de Vega, dont l'œuvre lyrique est immense, emploiera aussi la poésie à une réflexion sur les incertitudes de sa fortune personnelle et à l'expression...
  • FUENTEOVEJUNA, Felix Lope de Vega - Fiche de lecture

    • Écrit par
    • 812 mots

    Comme Peribañez et le Commandeur d'Ocaña (1614), ou Le Meilleur Alcade, c'est le roi (1635), deux pièces composées par le grand dramaturge espagnol Felix Lope de Vega Carpio (1562-1635), Fuenteovejuna est un drame de commandeurs. Écrite vers 1612-1614 vraisemblablement, cette pièce...