ESPAGNE (Le territoire et les hommes) Économie

Capitale Madrid
Population 48 347 910 habitants (2023)
    Produit intérieur brut par habitant (PIB par hab.) 33 509 $ (2023)

      Alors que l'elle apparaissait encore en 1975 très en retard par rapport aux autres pays européens, marquée par les séquelles de la guerre civile (1936-1939) et les années d'autarcie qui ont suivi, l'Espagne depuis lors a connu une évolution impressionnante : elle s'est démocratisée, elle est devenue un membre qui compte au sein de l'Europe communautaire et plus tard de la zone euro. Jugée avec condescendance jusqu'au début des années 1990 comme un pays du « Club Med », l'Espagne a ensuite été vantée pour ses performances économiques et l'assainissement de ses finances publiques, avant d'être à nouveau la cible des marchés financiers, à la suite de la crise financière de 2008 et de l'éclatement de la bulle immobilière qui ont rapidement détérioré les comptes publics. L'économie espagnole doit désormais trouver de nouveaux ressorts pour poursuivre son rattrapage.

      Un processus tardif de convergence

      À partir de 1939, l'instauration du régime franquiste se traduit par un fort repli isolationniste de l'Espagne, avec pour corollaire la recherche d'une croissance autosuffisante : les importations sont rationnées, tout comme les flux d'investissements étrangers. Après la Seconde Guerre mondiale, l'Espagne est exclue du plan Marshall et reste à l'écart du développement technologique que connaissent alors la plupart des pays européens, et donc du relatif rattrapage de ces pays vis-à-vis des États-Unis. L'État espagnol intervient dans tous les domaines, avec en particulier le contrôle des salaires et des prix d'un certain nombre de produits. Les barrières tarifaires conduisent à des prix des importations extrêmement élevés, contribuant à une persistance de l'inflation. C'est le cas notamment dans le secteur des biens d'équipement, ce qui limite l'investissement des entreprises. La croissance, faible durant les années 1940, s'accélère cependant dans les années 1950, avec une ouverture progressive de l'économie. Mais c'est véritablement le plan de stabilisation de 1959 qui met fin au modèle autarcique espagnol. Le pays libéralise alors peu à peu les échanges commerciaux et réduit les entraves à la mobilité des capitaux. Ce processus se poursuit tout au long des années 1960 et favorise une croissance plus élevée (investissements étrangers dans l'industrie, réduction de l'inflation...). Jusqu'au milieu des années 1970, la croissance est forte, alimentée par un investissement dynamique, qui permet aux entreprises espagnoles de voir leur productivité se rapprocher de la moyenne européenne. La mutation de l'économie est en marche, avec une forte baisse de l'emploi dans l'agriculture entre 1960 et 1975, du fait d'un exode rural plus tardif qu'ailleurs en Europe : une partie de ces travailleurs retrouve un emploi dans les secteurs industriels et surtout dans des services en pleine expansion ; une autre partie choisit d'émigrer, principalement en Europe. Le taux de chômage reste donc très faible durant cette période.

      Instauration de la démocratie et adhésion à la C.E.E. (1975-1995)

      Une modernisation coûteuse dans un contexte de crise

      Après la mort de Franco en 1975, un régime démocratique se met en place. Mais l'économie espagnole est touchée de plein fouet par les deux chocs pétroliers et le ralentissement économique mondial. La croissance espagnole décélère nettement jusqu'au milieu des années 1980. L'inflation accélère fortement, entraînant les salaires par le jeu de clauses d'indexation de ces derniers sur les prix.

      Après les élections de juin 1977, la signature en octobre du pacte de la Moncloa marque le début d'une nouvelle politique économique : une réforme fiscale est mise en place, avec notamment un impôt progressif sur le revenu et la richesse, et la politique monétaire se resserre pour combattre l'inflation. Parallèlement, un long processus de décentralisation est amorcé, avec la création de dix-sept communautés autonomes (hors les enclaves africaines de Ceuta et Mellila), dont les responsabilités en matière de dépenses et de recettes n'ont pas cessé de croître depuis lors.

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      Le début des années 1980 voit l'émergence en Espagne d'un chômage de masse, avec une rapidité et une ampleur inégalées en Europe. Le taux de chômage passe ainsi de 1,9 p. 100 en 1975 à 17,7 p. 100 en 1985 (fig. 1). Entre 1977 et 1985, l'économie espagnole perd 1,6 million d'emplois, principalement dans l'agriculture, dont le déclin se poursuit, et dans l'industrie, alors en pleine reconversion. Dans le secteur de la construction, les destructions d'emplois sont également importantes et les créations d'emplois dans les services (principalement dans le secteur public) sont trop faibles pour absorber l'excédent de main-d'œuvre. Durant cette période, la part de l'emploi agricole dans l'emploi total continue de diminuer, passant de 19 p. 100 en 1977 à 15,5 p. 100 en 1985, et celle de l'emploi industriel (hors construction) entame sa décrue (26 p. 100 en 1977, 22 p. 100 en 1985), tandis que la part des services dépasse pour la première fois les 50 p. 100 (tabl. 1).

      Espagne : chômage depuis 1970 - crédits : Encyclopædia Universalis France

      Espagne : chômage depuis 1970

      Espagne : emploi par secteur d'activité - crédits : Encyclopædia Universalis France

      Espagne : emploi par secteur d'activité

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      Cette contre-performance en matière d'emploi tient à plusieurs facteurs. D'abord, le ralentissement économique est nettement plus marqué et durable en Espagne que dans le reste de l'Europe. Ensuite, l'ajustement est supporté essentiellement par l'emploi alors que la décélération des gains de productivité est peu marquée. En particulier, la reconversion industrielle opérée au début des années 1980 induit d'importants plans de restructuration, entraînant des licenciements massifs. C'est le cas dans certaines activités en déclin, du type construction navale ou sidérurgie, mais aussi dans les industries traditionnelles qui commencent à souffrir de la concurrence des pays asiatiques avec la baisse des barrières tarifaires (textile, chaussure...). De plus, avec le retour de la démocratie, le développement du système d'indemnisation du chômage incite les chômeurs à se déclarer davantage. Cette normalisation des comportements de recherche d'emploi met au jour un chômage jusque-là « déguisé » (notamment dans le domaine agricole). Enfin, l'Espagne cesse d'être un pays d'émigration, les opportunités d'emplois dans les autres pays européens se réduisant avec le ralentissement global.

      Le chômage de masse et l'expansion des programmes sociaux confèrent à l'État un rôle de plus en plus important en termes de financement de la protection sociale. Le développement d'un État-providence s'accomplit ainsi en Espagne avec quelques décennies de retard sur ses voisins européens. Entre 1975 et 1985, la part des dépenses publiques dans le P.I.B. passe de 26,3 p. 100 à 43,1 p. 100.

      Espagne : P.I.B. par habitant - crédits : Encyclopædia Universalis France

      Espagne : P.I.B. par habitant

      Les années 1975-1985 sont donc des années de transition, marquées par la poursuite du processus de modernisation de l'économie, avec un rattrapage de la productivité. Mais la contraction de l'emploi est telle que le P.I.B. par tête recule fortement par rapport à la moyenne européenne (fig. 2).

      C.E.E. et ouverture économique

      L'entrée de l'Espagne dans la Communauté économique européenne (C.E.E.), en 1986, coïncide avec une phase d'expansion. Après la période de rationalisation industrielle du début des années 1980, la seconde moitié des années 1980 voit se créer environ 2 millions d'emplois, conduisant à une réduction du taux de chômage. Un mouvement temporaire cependant, puisque dès 1993, le chômage repart à la hausse dans un contexte de récession.

      L'adhésion à la C.E.E. fait bénéficier l'économie de ressources supplémentaires, avec les fonds structurels européens et ceux de la politique agricole commune (P.A.C.), puis avec les fonds de cohésion à partir de 1993. Cette manne, bienvenue dans un contexte budgétaire difficile, rend possible la modernisation d'infrastructures souvent obsolètes et le développement de nouveaux équipements.

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      À la suite du démantèlement des barrières tarifaires, l'ouverture de l'économie espagnole s'accroît peu à peu, avec pour conséquence une nette hausse des importations : leur part dans le P.I.B. passe de 10 p. 100 au début de l'année 1986 à 22 p. 100 en 1995. La progression des exportations s'est, elle, avérée plus tardive. Les années 1980 marquent aussi, comme dans la plupart des pays européens, le début de mutations profondes concernant les marchés financiers (diversification des instruments d'épargne, déréglementation des taux d'intérêt...). Les restrictions sur la circulation des capitaux s'amenuisent. Dans ce contexte, les investissements directs étrangers en Espagne connaissent une croissance soutenue. L'entrée du pays dans la C.E.E. incite les multinationales à s'y implanter pour profiter à la fois d'une main-d'œuvre à bas coûts et d'un accès au marché européen. Ces investissements concernent surtout l'industrie, et en particulier l'automobile, la chimie ou l'agroalimentaire. L'économie espagnole est bénéficiaire de cette ouverture : ses parts de marché à l'export s'accroissent nettement. Mais, dans le même temps, l'Espagne devient plus sensible à la contrainte extérieure.

      Or, pour combattre l'inflation, la politique monétaire se resserre. La hausse des taux d'intérêts permet d'attirer des capitaux étrangers qui, certes, financent le déficit courant, mais entraînent aussi une appréciation de la peseta au sein des marges de fluctuation imposées par le système monétaire européen (S.M.E.). De réels problèmes de compétitivité en découlent, accentués par la croissance élevée des coûts salariaux. Ce n'est qu'avec les quatre dévaluations de la peseta par rapport à l'écu entre 1992 et 1995 (de 23 p. 100 au total) que l'Espagne rétablit son avantage compétitif. Après la récession de 1993, ce sont les exportations qui favorisent la reprise économique, profitant pleinement des dévaluations de la peseta. L'Espagne entre alors dans un cycle de croissance durable.

      Une décennie de croissance forte (1995-2007)

      Succès de l'intégration à la zone euro

      Pour pouvoir intégrer la zone euro, l'Espagne met tout en œuvre pour respecter les critères de Maastricht, qui imposent une relative convergence nominale des futurs pays de cette zone monétaire intégrée. Les efforts de l'Espagne se révèlent payants, puisque, en 1997, elle respecte la plupart de ces critères (inflation, taux d'intérêt, parité de la monnaie et déficit public), à l'exception de celui qui concerne la dette publique. La conjonction d'une politique monétaire expansive et d'une politique budgétaire restrictive lui permet de faire partie, en 1999, de la première vague des pays adoptant l'euro.

      Deux facteurs sont principalement à l'origine de la forte baisse des taux d'intérêts réels depuis 1995 et de leur faiblesse durable dans les années 2000. En premier lieu, après le resserrement monétaire observé entre 1994 et le début de l'année 1995, le processus de désinflation a permis aux autorités monétaires de réduire progressivement les taux d'intérêt courts à partir de la fin de 1995. En second lieu, l'assainissement budgétaire et la stabilisation des anticipations de change dans un contexte désinflationniste ont rassuré les marchés financiers quant aux perspectives de participation de l'Espagne à l'Union économique et monétaire (U.E.M.), ce qui s'est répercuté à la baisse sur les primes de risque, contribuant ainsi à la convergence des taux longs espagnols vers les taux allemands. De ce fait, l'Espagne respecte dès 1997 les conditions relatives au taux d'inflation et aux taux longs pour entrer dans la zone euro. Finalement, entre le dernier trimestre 1995 et le premier trimestre 1999, la baisse des taux (aussi bien courts que longs) a été de 6,3 points de pourcentage.

      Espagne : déficit public - crédits : Encyclopædia Universalis France

      Espagne : déficit public

      L'assainissement budgétaire a été spectaculaire en Espagne à partir du milieu des années 1990. Le déficit est ainsi passé de 6,6 p. 100 du P.I.B. en 1995 à 1,4 p. 100 en 1999 (fig. 3). Trois facteurs expliquent cette amélioration :

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      – La conjoncture a été favorable. La croissance des recettes a été non négligeable (+ 1,1 point de P.I.B.), du fait du dynamisme des revenus et de la consommation. De plus, la baisse du taux de chômage a entraîné une réduction de la part des prestations sociales dans le P.I.B.

      – La baisse des charges d'intérêt a été importante (— 1,7 point de P.I.B. entre 1995 et 1999), en lien surtout avec la baisse des taux mais aussi avec la réduction de la dette.

      –  – La politique budgétaire a été restrictive : avec une réduction de 1 point des transferts en capital, de 0,7 point de la masse salariale (avec le gel des salaires des fonctionnaires et le non-remplacement d'une partie des agents partant à la retraite) et de 0,4 point de l'investissement public.

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      À ces éléments viennent s'ajouter l'apport des fonds structurels et les recettes issues des privatisations qui ont contribué à l'amélioration de la situation des finances publiques. L'Espagne a longtemps été le pays de la zone euro qui absorbait le plus de fonds européens. Quant au processus de privatisations, il avait débuté au milieu des années 1980, mais il a pris de l'ampleur à partir de 1996 avec le retour au pouvoir des conservateurs.

      Une croissance dopée par l'immobilier

      Espagne : taux de croissance du P.I.B. - crédits : Encyclopædia Universalis France

      Espagne : taux de croissance du P.I.B.

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      De 1995 à 2007, la croissance a été particulièrement élevée en Espagne, avec un rythme de 3,6 p. 100 en moyenne contre 2,3 p. 100 dans la zone euro (fig. 4). Cette performance a permis au P.I.B. par habitant de se rapprocher de la moyenne européenne de l'Union à Quinze, en passant de 79 p. 100 en 1995 à 94 p. 100 en 2007 (fig. 2). Durant cette période, la baisse du taux de chômage a été impressionnante.

      L'amélioration du solde public, qui avait été très forte entre 1995 et 1999, s'est poursuivie jusqu'en 2007, date à laquelle l'Espagne affichait même un excédent public de 1,9 p. 100 du P.I.B. et une dette de 36 p. 100. Les performances espagnoles surpassaient alors largement les résultats de la zone euro (avec un déficit de 0,6 p. 100 et une dette de 66 p. 100 en 2007). C'est principalement la vigueur de la croissance qui explique cet assainissement espagnol, avec des recettes fiscales très dynamiques et des prestations chômage en forte baisse. De plus, les fonds structurels et les fonds de cohésion ont représenté 0,9 point de P.I.B. par an en moyenne sur cette période.

      Espagne : inflation - crédits : Encyclopædia Universalis France

      Espagne : inflation

      Les deux moteurs de la croissance espagnole ont été l'investissement et la consommation des ménages, portés par des taux d'intérêt bas. Depuis 1999, la politique monétaire de la Banque centrale européenne s'est révélée très accommodante pour l'Espagne, au regard de son différentiel d'inflation avec la zone. Les tensions inflationnistes auraient justifié, dans un contexte de politique monétaire nationale, des taux plus élevés. En effet, entre 1999 et 2007, l'inflation moyenne a été de 2,9 p. 100 en Espagne, contre 1,9 p. 100 dans la zone euro (fig. 5). Les taux d'intérêt courts, qui n'ont pratiquement jamais cessé de baisser à partir de 1995, ont même été négatifs entre 2002 et 2006.

      Espagne : composantes du P.I.B. - crédits : Encyclopædia Universalis France

      Espagne : composantes du P.I.B.

      La baisse des taux d'intérêt a permis aux entreprises de s'endetter fortement. Le taux d'investissement des entreprises a ainsi augmenté jusqu'en 2000 (pour atteindre 30,8 p. 100 de leur valeur ajoutée), constituant un fort soutien à la croissance. À partir de 2000, l'investissement en construction, et en particulier l'investissement logement, a pris le relais d'un investissement défaillant des entreprises, limitant nettement le ralentissement de l'économie (tabl. 2). En 2004, le taux d'investissement des entreprises est reparti à la hausse, favorisé par le redémarrage européen et une consommation des ménages plus vigoureuse, avec un pic de 36,2 p. 100 de leur valeur ajoutée en 2007.

      La consommation a aussi été dynamique. L'appartenance à la zone euro, c'est-à-dire à un environnement macroéconomique et financier plus stable que précédemment, a d'autant plus poussé les ménages à diminuer leur épargne que le taux de chômage diminuait lui aussi. Le taux d'épargne des ménages est ainsi passé de 14,3 p. 100 de leur revenu disponible en 1996 à 11,2 p. 100 en 2000, niveau auquel il s'est pratiquement stabilisé jusqu'à la fin de 2007. Quant au taux d'endettement des ménages, son augmentation a été bien plus forte que dans la zone euro (atteignant 130 p. 100 du revenu disponible des ménages à la fin de 2007, contre 96 p. 100 en moyenne dans la zone euro), permettant de financer un investissement logement élevé. Dans un contexte de taux d'intérêt historiquement bas et d'allongement de la durée des prêts, la croissance élevée de la masse salariale associée à la baisse du taux de chômage a poussé à la hausse la demande de logements et les prix immobiliers (+ 200 p. 100 entre le début de 1997 et la fin de 2007). D'autres facteurs structurels ont également joué, comme la rareté des terrains disponibles, les flux d'achats étrangers ou les avantages fiscaux liés à l'achat immobilier. Mais le phénomène a peu à peu pris l'allure d'une bulle spéculative nourrie par les anticipations de hausse future, s'éloignant de l'évolution des déterminants fondamentaux. En 2007, les prix apparaissaient clairement surévalués, avec un risque de correction à la baisse important.

      Envers du décor

      Dans ce contexte de croissance élevée, la réduction du chômage espagnol a été vive, ce dernier passant de son pic à 20 p. 100 à la mi-1994 à un creux de 8,2 p. 100 en 2007. Le taux de chômage espagnol, qui était nettement supérieur à la moyenne de la zone euro depuis le milieu des années 1980, s'était alors rapproché de celle-ci (7,5 p. 100 en 2007). Ainsi, 7,2 millions d'emplois ont été créés entre 1995 et 2007. Un tiers des créations d'emplois au sein de la zone euro est donc le fait de l'Espagne durant cette période. Les services expliquent plus de 70 p. 100 de ces créations nettes d'emplois, la construction presque 20 p. 100 et l'industrie près de 10 p. 100.

      Il faut cependant relativiser ces bons résultats, en précisant que les emplois créés sont souvent peu productifs et que la croissance des salaires réels par tête est très faible. En effet, la conjonction de créations d'emplois peu qualifiés dans leur grande majorité et d'une forte immigration (qui représente un tiers des emplois créés durant cette période) limite les pressions salariales qui pourraient apparaître avec la forte réduction du taux de chômage. Mais l'élément déterminant est le maintien d'une inflation élevée, qui érode les salaires nominaux. Le rattrapage du P.I.B. par tête repose alors entièrement sur les performances en termes d'emplois, le niveau de la productivité espagnol s'écartant au contraire du niveau moyen européen. Ainsi, de 1995 à 2007, la productivité du travail a stagné en Espagne, alors qu'elle progressait de 1 p. 100 dans la zone euro. Et cette faiblesse concerne tous les secteurs : la productivité n'a progressé que de 0,7 p. 100 dans l'industrie et a même reculé dans les services marchands (— 0,8 p. 100) et surtout dans le secteur de la construction (— 1,6 p. 100).

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      La politique monétaire expansionniste a certes soutenu le rattrapage de l'économie, mais en engendrant une montée des déséquilibres : alors que l'État faisait le choix du désendettement, les agents privés ont profité de la baisse des taux d'intérêt pour s'endetter au-delà de toute prudence. L'endettement global de l'économie s'est de la sorte accru, ce qui s'est traduit par un creusement du déficit courant (qui est passé de — 0,3 p. 100 en 1995 à  —10 p. 100 en 2007). Par ailleurs, cet endettement n'a que peu profité aux secteurs les plus productifs, finançant en priorité un secteur de la construction où les prix s'emballaient et où la spéculation avait fini par s'installer.

      — Sabine LE BAYON

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      Écrit par

      • : professeure des Universités, agrégée de géographie, habilitée à diriger des recherches
      • : économiste à l'Observatoire français des conjonctures économiques (O.F.C.E.)

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      Espagne : chômage depuis 1970 - crédits : Encyclopædia Universalis France

      Espagne : chômage depuis 1970

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