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NOETHER EMMY (1882-1935)

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Les deux mémoires principaux

De son œuvre, développée et prolongée après sa mort précoce le 14 avril 1935 à Bryn Mawr (Pennsylvanie) par ses amis et ses élèves, citons deux travaux parmi les plus importants.

Le premier s'intitule Idealtheorie in Ringbereichen. Les notions de base sont celle d'anneau (groupe par rapport à une addition commutative, muni en outre d'une multiplication associative, distributive pour l'addition et, dans ce travail, commutative) et celle d'idéal : un sous-ensemble I de l'anneau A (commutatif) est un sous-groupe additif de A tel que le produit d'un élément quelconque de I par un élément quelconque de A soit un élément de I. Dans l'anneau Z des entiers de signe quelconque, l'ensemble des multiples d'un nombre donné m est un idéal, et il n'y a pas d'autres idéaux que ceux qui sont obtenus ainsi ; le problème est de trouver, sous la forme la plus universelle possible, un théorème qui généralise la décomposition unique de tout entier m (≠ 0, ≠ 1) en facteurs premiers.

Les travaux de Dedekind sur les nombres algébriques constituent un premier jalon. Un autre est donné par un théorème de Lasker sur les polynômes (à coefficients complexes) ; ce théorème constitue un très ingénieux rapprochement entre les idées de Dedekind et un résultat de Max Noether sur les polynômes de la forme Pf +  Qg, où f et g sont deux polynômes donnés, P et Q deux polynômes arbitraires (l'ensemble de ces polynômes est un idéal). Un dernier jalon est un théorème de Hilbert sur le transport de la propriété : tout idéal admet un système générateur fini (« base finie »), dans le passage d'un anneau unitaire A à l'anneau A[X] des polynômes en X à coefficients dans A.

Emmy Noether énonce, sous le nom de Teilerkettensatz (condition de chaîne ascendante), un axiome équivalent à celui de la « base finie » : toute suite croissante d'idéaux I1 ⊆ I2 ⊆ ... ⊆ In ⊆ ... est stationnaire. Elle en déduit la représentation d'un idéal sous forme d'intersection d'idéaux irréductibles, puis, dans ce qui restera une des plus jolies démonstrations de l'algèbre, elle établit que tout idéal d'un anneau vérifiant la condition de chaîne ascendante (appelé maintenant anneau noethérien) est intersection finie d'idéaux primaires. Dégager cette notion d'idéal primaire (I est primaire si ab ∈ I avec a ∉ Q entraîne qu'une puissance de b appartient à I) était une des difficultés. L'étude des propriétés d'unicité était aussi fort ardue : elle est accomplie dans le même élan.

Dans Abstrakter Aufbau der Idealtheorie, l'introduction, à côté de la condition de chaîne ascendante, de la maximalité des idéaux premiers et de la clôture intégrale permet à Emmy Noether d'obtenir des théorèmes plus précis et, notamment, de définir axiomatiquement des anneaux dans lesquels les idéaux ont les propriétés que Dedekind avait obtenues dans la théorie des nombres algébriques.

De 1921 à 1925, toute une école s'est rassemblée autour d'Emmy Noether : avec E. Artin, Krull, B. L. Van der Waerden, Deuring, Fitting, Hasse, Koethe, F. K. Schmidt, l'algèbre connaît en Allemagne un essor extraordinaire qui attire les mathématiciens de tous les endroits du monde. Les conquêtes les plus belles se succèdent, avec les travaux sur les algèbres associatives et leurs applications à la théorie du corps de classes. L'algèbre non commutative, créée par W. R. Hamilton, prend, grâce à Emmy Noether, un élan vigoureux.

Emmy Noether avait reçu en 1932, avec un autre mathématicien, le prix Alfred Ackermann-Teubner pour l'avancement de la connaissance mathématique. En son honneur ont été nommés : le cratère Noether, cratère lunaire de 67 kilomètres de diamètre, en[...]

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Pour citer cet article

Paul DUBREIL. NOETHER EMMY (1882-1935) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Article mis en ligne le et modifié le 14/03/2009

Autres références

  • ANNEAUX COMMUTATIFS

    • Écrit par
    • 6 217 mots
    • 1 média
    La définition abstraite des anneaux de Dedekind que nous formulons ici a été donnée pour la première fois, en 1927, par la mathématicienne allemande Emmy Noether.
  • CHROMODYNAMIQUE QUANTIQUE

    • Écrit par
    • 6 420 mots
    • 6 médias
    Les  théories de jauge reposent sur le théorème démontré en 1918 par la mathématicienne allemande Emmy Noether (1882-1935) : si une théorie physique est invariante dans une transformation continue, il existe alors une quantité conservée au long de la transformation. L’exemple le plus connu est...
  • CORPS, mathématiques

    • Écrit par et
    • 6 190 mots
    ...commutatives finies d'un corps commutatif conduit à ce qu'on appelle la théorie de Galois. Mais il existe une théorie de Galois non commutative due à E. Noether et T. Skolem (1928), dont on donne ci-dessous quelques résultats. Si K est un corps non commutatif de centre Z, il est facile de mettre en évidence...
  • ÉNERGIE - La notion

    • Écrit par
    • 7 543 mots
    • 4 médias
    ...mathématique, cette affirmation se traduit en disant que la translation dans le temps est une opération de symétrie. En 1918, la mathématicienne allemande Emmy Noether prouve qu'une telle symétrie continue implique l'existence d'une quantité conservée, qu'on identifie à l'énergie ; ce théorème lie donc la...
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