Abonnez-vous à Universalis pour 1 euro

CRAIG EDWARD GORDON (1872-1966)

À la recherche de la théâtralité

Élaborées au cours d'une lutte incessante, les opinions de Craig, souvent paradoxales, changeantes et parfois agressives, peuvent difficilement faire l'objet d'un résumé schématique. Parmi les plus marquantes, il faut retenir son antiréalisme : l'art n'est pas imitation de la nature ou reconstitution archéologique, mais création ; sa volonté de rendre au théâtre sa dignité d'art véritable, en en faisant admettre l'autonomie artistique qu'il fonde, à la lumière des grands modèles fournis par l'Orient, sur le mouvement, sur la danse, sur la nature même du théâtre, spectacle et non art de littérature ; son souci de l'équilibre et de l'harmonie des parties qui composent l'œuvre théâtrale et la nécessité organique de leur jeu combiné. Mais, selon Craig, assurer et maintenir cet équilibre, cette harmonie, implique d'exclure l'accaparement du théâtre par l'un de ses artisans : que ce soit l'auteur dramatique (d'où l'alternative préconisée par Craig : l'éliminer, ou l'admettre s'il consent à devenir un véritable dramaturge) ; ou l'acteur (imitateur, fauteur de réalisme et non créateur ; d'où l'alternative : le remplacer par une « surmarionnette », ou obtenir qu'il devienne cette « surmarionnette », sorte d'élément mobile du décor) ; ou enfin le peintre (le décor n'est pas un ornement ou une toile de chevalet agrandie ; par ses lignes et ses couleurs le décor fait partie intégrante de l'action dramatique).

Mais l'unité de l'œuvre théâtrale et l'indépendance du théâtre tout entier ne seront assurées que par celui qui, dominant l'ensemble, sera également capable de composer lui-même toutes les parties de l'œuvre et de faire respecter les lois du théâtre : ce sera le metteur en scène, seul artiste authentique du théâtre.

Ces principes, joints aux applications que Craig en a données lui-même par ses esquisses et ses maquettes de décor, empreintes de pureté et de « simplicité grandiose » (Jacques Rouché), ont marqué profondément le théâtre contemporain, ainsi qu'en témoignent tant les grands ouvrages appartenant à l'histoire et à l'esthétique du spectacle que les manifestes et les réalisations des jeunes animateurs de l'avant-garde.

— André VEINSTEIN

La suite de cet article est accessible aux abonnés

  • Des contenus variés, complets et fiables
  • Accessible sur tous les écrans
  • Pas de publicité

Découvrez nos offres

Déjà abonné ? Se connecter

Écrit par

Classification

Pour citer cet article

André VEINSTEIN. CRAIG EDWARD GORDON (1872-1966) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Média

Edward Gordon Craig, vers 1960 - crédits : Hulton Archive/ Getty Images

Edward Gordon Craig, vers 1960

Autres références

  • SCÉNOGRAPHIE

    • Écrit par Jean CHOLLET
    • 6 524 mots
    • 3 médias
    Les avancées d'Appia ne peuvent être dissociées des apports de son cadet de dix ans, Edward Gordon Craig (1872-1966), metteur en scène et théoricien anglais. Celui-ci définit le théâtre comme un art du mouvement dans un espace symbolique fondé sur la rencontre géométrique des lignes et des plans,...
  • THÉÂTRE OCCIDENTAL - La scène

    • Écrit par Alfred SIMON
    • 10 045 mots
    • 7 médias
    Les deux prophètes de la mise en scène moderne, inspirateurs de la grande révolution scénographique, le Suisse Adolphe Appia (1862-1928) et l'Anglais Gordon Craig (1872-1966), ont, pour des raisons diverses, créé eux-mêmes très peu de spectacles. D'où le côté radical de leurs thèses et la suspicion...

Voir aussi