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STEIN EDITH (1891-1942)

Philosophe d'origine juive, Edith Stein fit ses premières études universitaires à Breslau, sa ville natale. En 1911, elle rejoint Husserl et son école à Göttingen ; en 1915, elle s'engage comme aide-infirmière dans un hôpital militaire ; en 1916, elle présente sa thèse de doctorat sur l'Einfühlung ou « empathie », et accepte la charge d'assistante privée de Husserl. Dès 1918, ayant renoncé à continuer à travailler avec ce dernier, elle cherche à se faire habiliter dans une université allemande, sans succès.

Entre-temps — et cela est déjà sensible dans sa thèse —, Edith Stein ressent un intérêt croissant pour la religion ; d'abord, sous l'influence de Max Scheler, comme un système de valeurs qui mérite attention, puis (à l'occasion de la mort d'Adolf Reinach en 1917) comme une source de courage, d'espérance et de paix dans le malheur. Cette inclination ainsi que d'autres événements plus personnels la conduisent à se convertir au christianisme et à demander le baptême dans l'Église catholique. La lecture de la Vie de Thérèse d'Ávila semble avoir joué un rôle décisif dans cette démarche.

Renonçant provisoirement à postuler son entrée au Carmel, elle enseigne de 1922 à 1932 dans un lycée de dominicains à Spire. Elle prend contact avec la philosophie de Thomas d'Aquin, entreprend, sur l'invitation du père Erich Przywara, S. J., de traduire les Quaestiones disputatae de veritate, entretient ou poursuit une active correspondance, en particulier avec Roman Ingarden, et se fait connaître comme conférencière, notamment sur des questions touchant le rôle et la vocation spécifiques de la femme. En 1932, elle est appelée à enseigner à l'Institut de pédagogie de Münster, mais, un an plus tard, se voit interdite d'enseignement en qualité de juive.

Plus rien ne la retient d'entrer au Carmel, avec résidence d'abord à Cologne, puis en 1938, par mesure de sécurité, à Echt en Hollande. C'est de là qu'en 1942, à la suite de la protestation des évêques de Hollande contre les persécutions des juifs, elle sera déportée à Auschwitz et gazée. Elle est béatifiée le 1er mai 1987.

La production philosophique d'Edith Stein est étroitement liée aux étapes de sa vie. Parmi ses travaux proprement phénoménologiques, rappelons sa thèse sur l'Einfühlung (1917), c'est-à-dire l'expérience d'autrui ; il faut citer également les Beiträge zur philosophischen Begründung der Geisteswissenschaften (1922), qui épousent, dans une perspective proche de celle de Dilthey, le projet husserlien de donner ses assises définitives à tout l'édifice de la science. Témoignant également de la permanence des préoccupations psychologiques d'Edith Stein, ces Beiträge précèdent une Untersuchung über den Staat (1925) où l'on ressent, entre autres influences, celle de Reinach et de sa théorie de l'essence du droit. À quoi s'ajoute un travail harassant sur les brouillons de Husserl, sans lequel Heidegger n'eût pu mettre au net le texte sur le Inneres Zeitbewusstsein (1928).

Devenue catholique, Edith Stein s'initie à la philosophie chrétienne et à la méthode scolastique, et tente une confrontation entre Husserl et Thomas d'Aquin (1929). Elle s'attaque par ailleurs à un travail sur Akt und Potenz qui sera ultérieurement développé dans une ontologie chrétienne, Endliches und Ewiges Sein. Elle tente d'y réarticuler, à travers une révision « théocentrique » du monde, les apports de la phénoménologie.

Aspirant à la vie religieuse dans un ordre de tradition contemplative et mystique, Edith Stein oriente alors sa réflexion vers ce qui, dans l'analyse de la conscience et de la « vie intérieure » réinventée par Husserl, permet un rapprochement avec la tradition spirituelle chrétienne. De cette[...]

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Philibert SECRETAN. STEIN EDITH (1891-1942) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

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