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DRUIDES

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Conception celtique du temps

Les Celtes n'ignoraient pas l'écriture : les Gaulois ont utilisé l'alphabet grec dans des inscriptions votives ou funéraires. Par ailleurs, les textes irlandais contiennent d'innombrables mentions d'emploi de l'écriture ogamique par les filid, voire par des guerriers. Mais l'écriture était proscrite en tant qu'archive ou moyen de transmission du savoir traditionnel parce que, par rapport à la parole, elle est morte et fixe éternellement ce qu'elle exprime. Tous ses emplois sont magiques ou incantatoires et, pour cette raison, le dieu de l'Écriture, Ogme, est aussi le dieu sombre, le patron de la guerre et de la magie (il a donné son nom à l'écriture irlandaise traditionnelle, les ogam). Le gaulois, langue sacrée et savante, a disparu avec toute sa littérature parce qu'il n'a jamais été une langue écrite et, sans la christianisation qui a propagé l'étude des Écritures, l'irlandais aurait subi le même sort ou au moins n'aurait presque rien laissé de sa littérature mythologique. Le droit irlandais considère encore comme seule preuve concluante « la mémoire concordante de plusieurs personnes ».

La conception celtique du temps s'exprime en premier par la répartition des fêtes dans le calendrier. La fête de Samain (« réunion »), le 1er novembre, marque la fin d'une année et le début de la suivante, la fin de la saison claire et le début de la saison sombre. Elle est la fête de toute la société et se passe en beuveries et banquets somptueux. Elle est la date de presque tous les événements mythiques : n'appartenant ni à l'année qui commence, ni à celle qui se termine, située ainsi en dehors du temps, elle est le moment des relations entre les hommes et les dieux de l'Autre Monde. La fête d'Imbolc (« lustration »), le 1er février, correspond aux Lupercales romaines. Elle est très peu mentionnée, parce qu'elle a été entièrement christianisée au bénéfice de sainte Brigitte. Beltene (« feu de Bel »), le 1er mai, est la fête du feu, celle des druides, qui allumaient de grands bûchers. Lugnasad (« assemblée de Lug »), le 1er août, est la fête du roi en tant que garant de l'abondance et de la prospérité. Fête des fruits et des récoltes, elle marque le commencement de l'automne et elle est l'occasion de réunions de toutes sortes, juridiques, administratives, ainsi que de jeux, de concours littéraires, de courses de chevaux, de compétitions sportives. Elle a beaucoup marqué le folklore irlandais. Son équivalent gaulois, le concilium Galliarum (« assemblée des Gaules »), se tenait à Lyon à la même date et a été tout de suite annexé au culte impérial d'Auguste.

Les fêtes ou assemblées irlandaises se tenaient dans les capitales des rois de province ou à Tara, capitale du roi suprême. Ces résidences étaient, en l'occurrence, des omphaloi, lieux particulièrement sacrés.

Les relations des hommes avec les dieux de l'Autre Monde ont pour caractéristique d'échapper aux normes du temps fini, comme la fête de Samain au cours de laquelle elles se déroulent : les humains qui se rendent dans l'Autre Monde pensent y rester quelques heures ou quelques jours et leur séjour dure plusieurs siècles ; ils ne peuvent plus rentrer dans le temps normal sans en mourir. C'est que l'Autre Monde, le Síd, est à la fois la Paix (sens initial du mot síd), la Perfection et l'Éternité. Les Irlandais le nomment aussi : Tir na mBéo (« Terre des Vivants »), Tir na mBán (« Terre des Femmes »), Mag Meld (« Plaine des Plaisirs »), parce qu'on y est éternellement jeune, sans souffrance, sans maladie ni vieillesse. L'un des thèmes les plus élégants de la littérature insulaire est celui – version celtique du mythe d'Éros et Psyché – de la jeune et jolie femme[...]

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Pour citer cet article

Christian-Joseph GUYONVARC'H. DRUIDES [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Article mis en ligne le et modifié le 14/03/2009

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Druide cueillant du gui - crédits : API/ Gamma-Rapho/ Getty Images

Druide cueillant du gui

Autres références

  • BARDE

    • Écrit par
    • 491 mots

    Suivant l'étymologie, barde signifie « qui pose, qui établit la louange ». Et telle est bien la fonction du barde dans l'Antiquité celtique. Mais le droit ou le devoir de dispenser la louange implique aussi la possibilité contraire, celle du blâme. La meilleure définition antique nous est offerte...

  • CELTES

    • Écrit par , et
    • 15 826 mots
    • 5 médias
    ...développement des sanctuaires va sans doute de pair avec l'organisation d'un corps sacerdotal composé de plusieurs catégories de clercs, parmi lesquels les druides. On sait peu de choses sur ces prêtres présentés par les auteurs anciens comme des philosophes : ils enseignent des préceptes comparables à ceux...
  • DAGDA

    • Écrit par
    • 463 mots

    Le dieu celtique Dagda porte quatre noms ou surnoms dans la mythologie irlandaise : Dagda (« dieu bon »), Eochaid (ivo-katu-s, « qu i combat par l'if », par allusion aux usages magiques de ce bois), Ollathir (« père puissant ») et Ruadh Rofhessa ( « rouge de la grande science »). Il correspond...

  • GAULE

    • Écrit par et
    • 26 438 mots
    • 4 médias
    La classe sacerdotale des druides est une des institutions communes à tous les peuples celtiques. D'après César, les druides, dispensés de service militaire et d'impôts, ont de multiples fonctions : ils président à la vie religieuse et aux sacrifices, rendent la justice et instruisent la jeunesse. En...
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