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DILBERDJIN TÉPÉ

Important centre urbain de l'antique Bactriane, dans l'Afghanistan septentrional, sur la rive gauche de l'Oxus (Amou-Daria), Dilberdjin Tépé est situé à 40 kilomètres au nord-ouest de Bactres. Son existence est attestée de la fin du ~ iie siècle au ve siècle et couvre la fin de la période de la colonisation grecque, les époques kouchane (ier-iiie s.) et kouchano-sassanide (iiie-ve s.). La ville, qui contrôlait la zone nord de l'oasis, dont Bactres était la capitale, était située près d'un vaste mur d'enceinte (long de plus de 200 km) qui protégeait le périmètre des terres irriguées des incursions des nomades et de l'envahissement des sables, comme il s'en trouve plusieurs dans les oasis de l'Asie centrale à partir de l'époque hellénistique (Antioche de Margiane-Merv) jusqu'à la période islamique ancienne. L'agglomération urbaine, qu'a fouillée, dans les années 1970, une mission afghano-soviétique, comprend deux zones distinctes : d'une part, une enceinte fortifiée carrée (393 m × 383 m), avec remparts à galeries et tours rectangulaires ; à l'intérieur de cette enceinte se trouvaient les principaux sanctuaires, et, au centre, une puissante citadelle, siège de l'autorité politique, dont le plan circulaire atteste la survivance d'une tradition de l'architecture défensive qui remonte à l'époque du bronze ; d'autre part, un faubourg extérieur avec maisons privées et ateliers artisanaux. L'une de ces maisons (84 m × 57 m), propriété d'une grande famille de la ville, imite le plan type de la demeure des colons grecs de Bactriane tel qu'il se présente à Aï Khanoum : la pièce noble, de réception, se trouve au centre, précédée d'un vestibule qui ouvre sur une avant-cour ; elle est séparée des ailes latérales, qui abritent les appartements privés, par un couloir périphérique. Toutes les constructions, privées et publiques, sont en briques crues et pisé, avec toits plats pour les grandes portées et voûtes pour les portées moindres. Dès le ier siècle, on y trouve le plus ancien exemple d'un type de coupole très élaboré dit Balkhi, qu'on ne connaissait jusqu'à présent que sur des monuments islamiques des xie et xiie siècles.

L'intérêt principal du site tel que nous l'ont fait connaître huit campagnes de fouilles est de nous offrir un panorama étendu et divers d'une vie religieuse intense et de nous révéler l'existence d'une importante école de peinture locale. L'architecture religieuse a toujours été de type oriental, même lorsqu'elle était dédiée à des divinités grecques. Les renseignements les plus précis sur les cultes locaux nous viennent essentiellement des documents figurés, statues modelées en argile crue et peintures murales. Dans le panthéon religieux, fort éclectique, trois composantes se laissent reconnaître : grecque, locale et indienne. C'est en l'honneur de divinités grecques, les Dioscures, dieux secourables, que fut construit le grand temple de la ville, au moment de la fondation de celle-ci (vers ~ 100). Dans ce temple furent découverts les fragments d'une longue inscription en kouchan, langue de la famille iranienne notée à l'aide de l'alphabet grec. Une fresque y représentait les jumeaux divins sous leur aspect traditionnel de jeunes cavaliers, debout contre le flanc de leur monture qu'ils tiennent par la bride, nus à l'exception d'un manteau rejeté dans le dos, et coiffés d'un bonnet pointu. Aux iie et iiie siècles, la défense de la ville était encore placée sous l'égide d'Héraclès, dieu des Combats et de la Vaillance, dont une statue a été retrouvée dans un petit sanctuaire de soldats à la porte principale de la ville : hormis un riche collier qui trahit l'influence[...]

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Écrit par

  • : membre de l'Institut (Académie des inscriptions et belles-lettres), directeur d'études à l'École pratique des hautes études, section sciences historiques et philologiques, directeur de l'U.M.R. 126-5 du C.N.R.S. (hellénisme et civilisations orientales)

Classification

Pour citer cet article

Paul BERNARD. DILBERDJIN TÉPÉ [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • ASIE CENTRALE

    • Écrit par Henri-Paul FRANCFORT, Frantz GRENET
    • 9 700 mots
    • 4 médias
    ...voit aussi l'introduction en Asie centrale de la fresque murale figurée qui devait devenir la forme par excellence du décor monumental : le temple de Dilberdjin, près de Bactres, a fourni une composition représentant les Dioscures selon les canons grecs, nus, les chairs peintes en brun-rouge se détachant...

Voir aussi