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DAUPHINÉ

Comme la plupart des autres provinces de l'ancienne France, le Dauphiné doit sa personnalité non pas tant à sa nature physique, malgré les apparences, qu'à la volonté des hommes : cette nature est si hétérogène que l'on pourrait imaginer de tout autres contours, partant un autre passé, à l'entité politique que le Moyen Âge légua à l'âge moderne et qui, simple ressort administratif désormais, disparut en 1790.

Des reliefs infiniment divers compris entre 33 et 4 102 mètres d'altitude avec tous les types de montagnes, de plateaux, de plaines ; un éventail de sols lié au fort compartimentage naturel ; un carrefour de climats dont la variété doit peu à la superficie globale ; d'insuffisantes ressources, n'étaient celles que procurent aujourd'hui l'hydroélectricité, ainsi que l'invitation au voyage et à la pratique massive des sports de l'alpe, tel est ce pays dauphinois dans ses contrastes et sa rudesse, exigeant l'effort humain ; beau, certes, mais dont on ne s'étonnera pas qu'il ait opposé plus d'obstacles que d'autres, et plus longtemps, à l'œuvre unificatrice de ses trois dynasties autochtones et des dauphins de France.

Point de principauté avant le xie siècle, et celle-ci très modeste ; encore le terme Dalphinatus (de dalphinus, « dauphin », surnom porté depuis 1133 par ses dynastes) n'apparaît-il qu'en 1293. Avant 1029, au cours de longs siècles d'incubation, les germes préhistoriques et protohistoriques ont donné naissance à des tribus comme les Caturiges, les Tricastins, les Allobroges, les Voconces, les Ségovellaunes, qui ont tôt joué un rôle dans les grands courants commerciaux et culturels empruntant le Sillon rhodanien ou les cols alpestres ; leurs divisions, source de faiblesse, attirèrent aussi sûrement que leurs routes l'attention des Romains (~ iie s.). La conquête du pays terminée, ceux-ci se gardèrent d'inclure leurs vaincus dans une même circonscription provinciale, et, au ve siècle, le futur Dauphiné relève toujours de quatre provinces différentes ; toutefois, grâce à la colonisation, à l'urbanisation (Vienne), à l'essor des voies de communication, à la prospérité, à un même style de vie, à une culture et à une religion communes (en dernier lieu, le christianisme), l'appartenance romaine exerçait un effet unificateur. Sous les Burgondes (534), la latinité ne recule que lentement ; elle survit pendant les premières décennies de la domination franque, qui dura trois cent cinquante ans. De notables changements, il est vrai, affectent la région : perceptibles dès la décadence mérovingienne, plus encore sous les Carolingiens, liés surtout à la poussée aristocratique, ils aboutissent à la création en 879 de ce royaume de Provence, qui, uni au xe siècle à celui de Bourgogne, transféré au Saint Empire en 1032, manifeste la force d'un tempérament régional.

En 1029, par concession de l'archevêque de Vienne, le comte d'Albon devient maître du sud du Viennois ; joint aux biens épars qu'il possède déjà jusqu'en Briançonnais, ce fief constitue le noyau, arrondi par sa dynastie et les deux suivantes, de la principauté « delphinale ». Parallèlement, en dépit des difficultés rencontrées à Embrun, à Grenoble et à Gap, villes épiscopales, des guerres soutenues contre la Savoie, d'une impécuniosité alarmante au xive siècle, le nouvel État s'organise. Quand, en 1349, la couronne de France le rachète, il suffit à ses représentants, parmi lesquels se détache le dauphin (l'héritier au trône, par ordre de primogéniture, porte désormais le titre de dauphin), le futur Louis XI, de parfaire l'œuvre accomplie tant du point de vue territorial (annexion du Valentinois) que du point de vue administratif. À cette époque (1447-1456), si la principauté n'est plus[...]

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Classification

Pour citer cet article

Bernard BLIGNY. DAUPHINÉ [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • ALPES

    • Écrit par Jean AUBOUIN, Bernard DEBARBIEUX, Paul OZENDA, Thomas SCHEURER
    • 13 214 mots
    • 11 médias
    Les Alpes franco-italiennes regroupent le comté de Nice, la haute Provence, le Dauphiné et une partie de la Savoie du côté français ; une partie de la Ligurie, le Piémont et le Val d’Aoste du côté italien.
  • CHARAVINES, préhistoire

    • Écrit par Aimé BOCQUET
    • 1 624 mots

    Des fouilles subaquatiques au sud du lac de Paladru, dans les collines du bas Dauphiné, à Charavines, ont permis d'exploiter, entre 1972 et 1986, un gisement immergé sous les eaux du lac. Celui-ci a livré les vestiges d'un habitat collectif du Néolithique ; son étude complète permet d'en faire,...

  • FÉDÉRATION DE 1790

    • Écrit par Jean TULARD
    • 346 mots

    La Fédération de 1790 est la conséquence de la formation en France des municipalités et des gardes nationales au moment de la Grande Peur. Dans les villages et les villes se forment en juillet 1789 des gouvernements particuliers qui se substituent aux anciennes autorités. Dans le Dauphiné...

  • FRANCE (Histoire et institutions) - Formation territoriale

    • Écrit par Yves DURAND
    • 12 902 mots
    • 7 médias
    La notion stratégique de frontière offensive se combinait avec l'antique idée de mouvance. Ainsi pour le marquisat de Saluces. Il relevait, dès la fin du xiiie siècle, du Dauphiné de Viennois et du roi de France, héritier des dauphins à partir de l'avènement de Charles V. Une adresse du parlement...
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Voir aussi