CLASSES SOCIALESClasse ouvrière
Carte mentale
Élargissez votre recherche dans Universalis
L'éclatement du groupe ouvrier
Les conditions d'existence d'une classe ouvrière homogène ne sont ensuite plus réunies. Après les secteurs du textile et des mines, touchés dès les années 1950, les grandes restructurations s'accélèrent dans les années 1970 avec la désindustrialisation des vieux bassins d'emploi industriels, en particulier du Nord et de l'Est de la France. Ce sont les places fortes du monde ouvrier organisé, les secteurs économiques de travail industriel stabilisé, ancien et qualifié, qui entrent en déclin. La faillite d'une grande entreprise entraîne la décadence économique de la région qu'elle faisait vivre. Par le jeu des préretraites, certains parviennent à rester sur place, mais la génération de la crise subit le chômage ou un exode forcé, se traduisant notamment par l'allongement des migrations journalières de travail.
L'ampleur de ces modifications a des contrecoups sur l'ensemble du mode de vie ouvrier et entraîne une profonde crise de reproduction. D'abord confrontées au chômage, les familles ouvrières voient parallèlement s'enrayer les systèmes de promotion interne propres à beaucoup d'usines, alors même que les salaires stagnent. Progressivement, au cours des années 1980 et 1990, les réorganisations de l'usine scindent les groupes de travail constitués, délocalisent certaines unités de production pour contourner les résistances ouvrières. Les politiques de l'emploi (sous-traitance, combinaison d'une main-d'œuvre qualifiée et non qualifiée) divisent la communauté productive en travailleurs stabilisés (dépendant juridiquement de l'entreprise) et travailleurs extérieurs précarisés. Les réorganisations contribuent à individualiser le rapport de l'agent à la hiérarchie et permettent de passer outre au collectif ouvrier : la prime rétribue la personne, elle entre mal dans les catégories de revendications de salaire collectives (basées sur un système de qualification et d'ancienneté dans l'entreprise sur lequel chacun se positionne).
Lorsque le renouvellement de la [...]
1
2
3
4
5
…
pour nos abonnés,
l’article se compose de 7 pages
Écrit par :
- Julian MISCHI : chargé de recherche en sociologie, Institut national de la recherche agronomique (Centre d'économie et sociologie appliquées à l'agriculture et aux espaces ruraux), Dijon
- Nicolas RENAHY : chargé de recherche, Institut national de la recherche agronomique, première classe, chercheur associé au C.M.H.- E.T.T.
Classification
Autres références
« CLASSES SOCIALES » est également traité dans :
CLASSES SOCIALES - Vue d'ensemble
Depuis près de deux siècles, il n'est pas une réflexion développée autour de la question des classes sociales qui n'ait repris ou réinterprété la distinction canonique héritée du marxisme selon laquelle les classes sociales existent sous deux formes : la « classe théorique » ou « classe sur le papier », d'une part, et la « classe réelle », classe mobilisée, d'autre part. Karl Marx avait le premier […] Lire la suite
CLASSES SOCIALES - Penser les classes sociales
L'existence des « classes sociales », dont les uns annoncent le retour et d'autres la disparition, reste au centre des polémiques qui divisent non seulement le monde des sciences sociales, mais aussi les univers politique et médiatique, c'est-à-dire tous ceux qui font profession de produire des représentations du monde social. S'il en est ainsi, c'est sans doute parce que les classes et les luttes […] Lire la suite
CLASSES SOCIALES - Classes moyennes
L'expression « classes moyennes » désigne des réalités diffuses, multiples, caractérisées selon les traditions nationales par une grande diversité morphologique, marquées aussi par une profonde instabilité historique. Toutes les tentatives de définition statistique rigides, destinées à enfermer cette réalité complexe dans des limites précises et immuables, ont débouché sur des impasses. En réalité […] Lire la suite
CLASSES SOCIALES - Classe dominante
Dans le lexique des sciences sociales contemporaines, le concept de « classe dominante » se démarque à la fois de celui de « bourgeoisie », associé à la théorie marxiste, et de celui d'« élite(s) », affilié aux théories de la stratification sociale sous leurs diverses formes. Solidaire d'une représentation multidimensionnelle de l'espace socia […] Lire la suite
CLASSES SOCIALES - La théorie de la lutte de classes
Les concepts de classe sociale et de lutte de classes sont les éléments d'un projet politique et non des instruments d'analyse sociologique. Est-ce à dire que les classes sociales n'existent pas ? Certes non. Mais il n'y a de classes sociales que dans la mesure où, pour reprendre la distinction hégélienne, la société moderne sépare la puissance sociale de l' […] Lire la suite
ALTHUSSER LOUIS (1918-1990)
Dans le chapitre « « Je ne suis pas marxiste » » : […] Cette phrase de Marx, Althusser l'applique tout d'abord à son auteur : ce n'est pas parce qu'une œuvre est signée de Karl Marx qu'elle relève nécessairement du marxisme. Pour en décider, un travail d'analyse et d'argumentation se révèle indispensable, afin d'identifier le dispositif théorique et les visées politiques qu'on nomme le marxisme. Les écrits de Marx étant écrits, ils constituent justem […] Lire la suite
ANTHROPOLOGIE POLITIQUE
Dans le chapitre « Stratification sociale et pouvoir » : […] Une des tâches de l'anthropologie politique est de montrer les formes particulières que prennent le pouvoir et les inégalités sur lesquelles il s'appuie dans le cadre des sociétés traditionnelles. On peut évoquer, d'abord, les inégalités primaires fondées sur des critères naturels (sexe et âge) et « traitées » par le milieu culturel au sein duquel elles s'expriment ; elles instaurent une hiérar […] Lire la suite
ANTHROPOLOGIE ÉCONOMIQUE
Dans le chapitre « Développement de l'inégalité » : […] En définitive, le grand problème reste celui du développement de l'inégalité dans les sociétés primitives et des conditions et voies d'apparition de formes primitives d'État et de classes sociales. Il est utile de rappeler que, dès ses formes les plus primitives, la société archaïque comporte déjà, sur la base de la division sexuelle du travail, des statuts inégaux pour les hommes et les femmes e […] Lire la suite
ANTHROPOLOGIE DES CULTURES URBAINES
Dans le chapitre « Controverses américaines sur les « cultures de la pauvreté » » : […] Aux États-Unis, la dégradation des quartiers noirs américains dans les années 1960 et 1970 a suscité un vif débat sur la détermination économique et/ou ethnique des cultures du ghetto. Les analyses qui, à la suite d’Oscar Lewis (1966), ont fait de la pauvreté et de la ségrégation le terreau de ces cultures urbaines, se sont d’abord opposées à des interprétations en termes de spécificités ethnique […] Lire la suite
ARCHITECTURE (Thèmes généraux) - Architecture et société
Dans le chapitre « L'architecture touchée par les Lumières » : […] « On dit en général du goût que c'est un certain je-ne-sais-quoi-qui-plaît », déclare l'architecte Germain Boffrand dans son Livre d'architecture en 1745, en ajoutant que « cette idée est bien vague ». Aussi imprécise soit-elle, la référence des architectes des Lumières au goût n'en témoigne pas moins de leur souci de mieux répondre à la demande sociale des élites, quitte à faire quelques entors […] Lire la suite
Voir aussi
Pour citer l’article
Julian MISCHI, Nicolas RENAHY, « CLASSES SOCIALES - Classe ouvrière », Encyclopædia Universalis [en ligne], consulté le 22 janvier 2021. URL : https://www.universalis.fr/encyclopedie/classes-sociales-classe-ouvriere/