CAUDILLISME
Carte mentale
Élargissez votre recherche dans Universalis
Bilan du caudillisme en Amérique latine
Dépourvu de toute légitimité, le pouvoir d'un caudillo était toujours menacé par les ambitions d'autres caudillos ; conquis par la violence, il devait tôt ou tard être défendu par la violence ; et le caudillisme, qui a toujours amené des régimes policiers arbitraires, a souvent conduit à de féroces exactions.
Il n'est cependant pas possible de condamner sans réserve l'action du caudillisme en Amérique latine dans la phase préétatique. Certains caudillos ont contribué au morcellement de l'Amérique espagnole pour se tailler des principautés, mais d'autres au contraire ont empêché le morcellement de se poursuivre : Rosas fut le plus absurdement cruel de tous les caudillos, mais la république Argentine lui doit un peu d'être un grand pays. Des caudillos aveuglément conservateurs, Rafael Carrera au Guatemala, Francia au Paraguay, ont retardé l'évolution de leurs pays, mais d'autres l'ont accélérée : ainsi Santa Anna au Mexique, Ramón Castillo (1855-1862) au Pérou ont aboli l'esclavage. Dans l'ensemble, cette forme de césarisme, appuyée sur des clientèles personnelles, devait être démagogique et ceux qui ont souffert de l'arbitraire et des exactions des caudillos ont été bien plus souvent les notables que le peuple ; dans des sociétés oligarchiques, comme le tyran antique, le caudillo s'est attaqué aux privilèges de l'oligarchie plutôt qu'il ne les a défendus.
Mais, justement parce qu'il était démagogique, le caudillisme a laissé de redoutables legs à la vie politique latino-américaine : alors que la notion d'État était encore embryonnaire, le caudillo s'emparait du pouvoir pour l'exploiter à son profit et à celui de sa clientèle ; s'enrichir était un droit et l'enrichir une obligation : la corruption est un legs du caudillisme. Le caudillo devait protéger ses clients même contre la loi, et l'idée que celui qui a une influence politique doit aider à tourner la loi ceux qui lui ont permis de l'acquérir est également un legs du caudillisme. L'Amérique latine souffre encore de ces survivances d'une organisation sociale fondée sur les ra [...]
1
2
3
4
5
…
pour nos abonnés,
l’article se compose de 5 pages
Écrit par :
- Jacques LAMBERT : professeur à la faculté de droit et des sciences économiques de Lyon.
Classification
Autres références
« CAUDILLISME » est également traité dans :
ARGENTINE
Dans le chapitre « L'ouverture politique : l'expérience radicale (1916-1930) » : […] Il faut attendre, en effet, les années 1910-1920 pour que les descendants d'immigrés accèdent au pouvoir politique. Jusque vers 1915, l'élite traditionnelle dirige le mouvement, elle équipe et développe l'Argentine en s'enrichissant individuellement et collectivement. Cependant que les maîtres de la terre vivent leurs plus beaux moments, importent vers l'Argentine les œuvres d'art et attirent les […] Lire la suite
BOLIVIE
Dans le chapitre « La mise sous tutelle politique » : […] Une fois gagnée l'indépendance, les créoles purs ou métissés qui étaient maîtres d'une grande partie des terres, des mines et du commerce, et détenaient de plus le privilège de la culture, pouvaient gouverner à leur guise. Ils se réclamaient en paroles de l'idéologie libérale qui avait donné un sens à la lutte contre la métropole. Ce ne fut guère qu'une apparence, car le vide laissé par l'adminis […] Lire la suite
BRÉSIL - La conquête de l'indépendance nationale
Dans le chapitre « À la recherche d'une doctrine politique » : […] Or l'Église brésilienne est en froid avec le régime. Deux évêques obligent leurs fidèles à quitter la franc-maçonnerie dont beaucoup font partie. Le ministre Rio Branco, lui-même à la fois maçon et bon catholique, fait prononcer par le Conseil d'État l'annulation des décisions épiscopales. Les deux évêques ripostent, sont mis en prison, l'opinion catholique internationale s'émeut. L'empereur perd […] Lire la suite
ÉQUATEUR
Dans le chapitre « Des remous politiques » : […] Une révolution porta au pouvoir, en 1944, José María Velasco Ibarra, dont la personnalité domina la scène politique vingt-cinq ans durant. Représentatif des grandes familles créoles équatoriennes et volontiers autoritaire, il avait été élu une première fois à la tête de l'État en 1933 et déposé en 1935 après s'être proclamé dictateur. Il fut à nouveau chassé du pouvoir en 1948 à la suite d'une ré […] Lire la suite
ESPAGNE (Le territoire et les hommes) - L'ère franquiste
Dans le chapitre « L'édifice institutionnel » : […] La loi du 8 août 1939 concentre tous les pouvoirs sur la personne du chef de l'État, y compris le pouvoir législatif et le pouvoir constituant. Par la suite, une série d'additions vient compléter l'édifice, afin de le rendre plus conforme au langage des démocraties triomphantes sans en modifier la nature autoritaire quant au fond. Dès le 17 juillet 1942, une loi de rang constitutionnel restaure l […] Lire la suite
FRANCO FRANCISCO (1892-1975)
Dans le chapitre « Le vainqueur de la guerre civile » : […] Dès la victoire du Front populaire, le général Emilio Mola, gouverneur de Pampelune, prépara une conspiration militaire. Les conjurés souhaitaient la participation de Franco en raison de son prestige dans les troupes d'Afrique et parmi les jeunes officiers formés à Saragosse. Mais Franco, conscient des risques, hésita, jusqu'à l'assassinat du leader monarchiste José Calvo Sotelo. Lors du Mouvement […] Lire la suite
GARCÍA MÁRQUEZ GABRIEL (1928-2014)
Dans le chapitre « Littérature et politique » : […] La politique est toujours présente chez García Márquez, soit par la fréquente référence au conflit historique entre libéralisme et conservatisme, soit par la critique implicite des rapports sociaux fondés sur l'oppression. Mais L'Automne du patriarche et Le Général dans son labyrinthe (1989) sont des romans de thème explicitement politique. En ce qui concerne le premier, la relation avec la réal […] Lire la suite
MEXIQUE
Dans le chapitre « La dynastie du Sonora : Obregón et Calles » : […] Alvaro Obregón, homme du Sonora, ne songeait pas à renverser Carranza et attendait, sûr de sa force, l'heure de la succession. Mais Carranza voulut imposer son successeur. Cela provoqua le soulèvement d'Obregón rallié par les autres généraux et l'assassinat de Carranza en 1920. Pendant quinze ans, le Mexique allait être le champ de bataille où se déroulait un curieux combat entre ce qui semblait, […] Lire la suite
VILLA FRANCISCO, dit PANCHO (1878-1923)
La légende a longtemps attribué à Pancho Villa, héros du panthéon mexicain, les débuts d'un « bandit social » très populaire. La réalité est plus prosaïque. Né au Rancho de la Coyotada, dans l'État de Durango, de son vrai nom Doroteo Arango, métayer dans un grand domaine, il mène dès son adolescence la vie d'un petit hors-la-loi, ce qui lui vaut d'être versé dans la troupe. Déserteur en 1902, il a […] Lire la suite
Pour citer l’article
Jacques LAMBERT, « CAUDILLISME », Encyclopædia Universalis [en ligne], consulté le 02 février 2021. URL : https://www.universalis.fr/encyclopedie/caudillisme/