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BOURIATES

Une civilisation

Le bouriate, seule langue mongole de Sibérie, se subdivise en une dizaine de dialectes principaux (spécialement, en Russie, ekhirit-bulagat, khori, alair [ou Alar'], barguzin ; en Mandchourie, bargu), différant par la phonétique et le vocabulaire, mais non par la morphologie et la syntaxe. Jusqu'en 1931, le mongol classique, noté par une écriture verticale, servait de langue écrite. Après un essai de notation en alphabet latin, un alphabet cyrillique, modifié par adjonction de trois lettres supplémentaires, a été adopté en 1939 et le dialecte khori est devenu la langue standard, littéraire et officielle.

La littérature traditionnelle est, avant tout, comme chez tous les peuples mongols, une littérature populaire de tradition orale très riche : longs poèmes épiques (comme l'épopée d'Alamǰi-Mergen ou le cycle de Geser), légendes, contes, chansons, ainsi que des chroniques historiques mises par écrit au xixe siècle.

Plus éloignés que les autres peuples mongols du courant d'influence lamaïque issu du Tibet, les Bouriates y ont gagné de mieux préserver la nature intime de leur culture prélamaïque, surtout dans la Cisbaïkalie, restée chamaniste même après la russification. On commence à s'apercevoir qu'en décryptant leurs épopées et leurs rites chamaniques on est apte à dessiner les structures sous-tendant maints aspects obscurs du lointain passé mongol (recherches de Roberte Hamayon, en France). Le chamanisme apparaît ainsi non plus comme un épiphénomène pathologique, mais comme un ensemble idéologique complexe, régissant la totalité de la vie matérielle et psychique de l'individu et du groupe social. Il en est surtout ainsi dans la société de chasse ekhirit-bulagat, où le chamanisme établit un système de cycles relationnels d'échanges entre nature et surnature, et gère parallèlement le principe des alliances matrimoniales et celui de la chasse. Le chamane, un être investi d'une essence spéciale, est apte à réparer les désordres de l'ordre naturel, au premier rang desquels les maladies, grâce au pouvoir qu'il exerce sur les âmes responsables de ces troubles.

Au sein du monde soviétique, les Bouriates, à l'ouest comme à l'est du lac Baïkal, ont su défendre leur identité et maintenir, en les renouvelant et en les adaptant, des traditions propres. Les auteurs russes, surtout Gorki et Maïakovski, ont exercé une profonde influence sur la formation d'une nouvelle littérature, combinant des réminiscences folkloriques avec une forme occidentale, et dont le pionnier est le poète, romancier et dramaturge Khotsa Namsaraev. De même, les arts plastiques, purement bouddhiques à l'époque prérévolutionnaire, ainsi que la mélodie populaire à gamme pentatonique ont évolué, sous l'influence de l'école russe, vers un style propre.

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Écrit par

  • : directeur de recherche au C.N.R.S. et à la Fondation nationale des sciences politiques (C.E.R.I)

Classification

Pour citer cet article

Françoise AUBIN. BOURIATES [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • AÏMAG

    • Écrit par Françoise AUBIN
    • 120 mots

    À l'origine, chez les peuples turcs, mongols et parfois toungouso-mandchous, l'aïmag (ou aïmak, ou ayimaq) est une unité sociale plus ou moins étendue qui repose sur la parenté patrilinéaire.

    À partir du XIIIe siècle, chez les Mongols, c'est une sous-tribu ayant un territoire de...

  • ÉPOPÉE

    • Écrit par Emmanuèle BAUMGARTNER, Maria COUROUCLI, Jocelyne FERNANDEZ, Pierre-Sylvain FILLIOZAT, Altan GOKALP, Roberte Nicole HAMAYON, François MACÉ, Nicole REVEL, Christiane SEYDOU
    • 11 781 mots
    • 7 médias
    Les Bouriates de la forêt sibérienne ont plusieurs épopées similaires de petite dimension, ceux qui sont proches de la steppe mongole ont une préférence pour Geser, mais n'en ont que des versions orales, divergentes entre elles et ne devant aux versions tibétaine et mongole guère plus que le nom...
  • SIBÉRIE

    • Écrit par Vadime ELISSEEFF, Pascal MARCHAND, Guy MENNESSIER
    • 14 170 mots
    • 6 médias
    Les deux grandes transformations se placent au Baïkal et dans l'Altaï. D'une part, les Bouriates mongolisèrent les populations de Tura et celles de Toungous. D'autre part, les Samoyèdes du haut Ienisseï et les Kottes (Kotty) furent turcisés et assimilés par les Tuviniens (Tuvincy) et les Kharasses....

Voir aussi