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ASSASSINS, secte

Membres d'une secte musulmane, célèbre par la manière dont elle se faisait un devoir sacré de mettre à mort les ennemis de la Vérité. Les assassins recherchaient, croit-on, l'extase dans la drogue, ce pourquoi on les appelle en arabe ḥashshāshīn ou ḥashīshiyya, nom qui est communément rapporté au mot ḥashīsh : herbe séchée, hachisch. Les assassins étaient une branche iranienne des ismā‘īliens qui s'était séparée des Fāṭimides d'Égypte en refusant leur allégeance à Musta‘lī, fils cadet du calife Mustanṣir bi'llah, à qui son père avait transféré l'investiture de l'imāmat en la retirant à l'aîné Niẓār. Les ismaéliens d'Iran reconnurent Niẓār, retenu prisonnier en Égypte ; ils prirent ainsi le nom de niẓārites, sous lequel on désigne aussi les assassins. Les niẓārites se distinguent des Fatimides, qui s'étaient constitués en État temporel, par la pureté de leur idéal religieux tout spirituel et hostile à toute forme de légalisme et d'institutionnalisme. Mais ils n'hésitaient pas à défendre ou à propager cet idéal par la terreur. Leurs ennemis étaient les Turcs saldjūqides sunnites ; ce furent aussi les croisés.

En 1090, Ḥasan al-Ṣabbāh, le « Vieux de la Montagne », s'empara de la forteresse d'Alamūt, qui allait devenir le centre imprenable de toutes les activités guerrières ou de propagande de la secte. Niẓār et son fils furent mis à mort en Égypte. Ḥasan al-Ṣabbāh mourut en 1124, laissant le pouvoir à Buzurg-ummīd, qui fut chargé de la da‘wā (propagande). Son fils Muḥammad lui succéda. C'est le fils de Muḥammad, Ḥasan II, dit Ḥasan‘alā dhikrihi' l-salām (1162-1166), qui se proclama non seulement dā‘ī (chef de la propagande) mais khalīfa, représentant de l'imām caché. Minorski pense qu'il voulait probablement insinuer qu'il était lui-même cet imām. Cependant B. Lewis va plus loin et dit qu'il se proclama fils de l'infant qui avait été ramené d'Égypte, et chef d'une nouvelle lignée d'imāms visibles, de qui descend l'Aga Khān. Il abolit la Loi et annonça la Grande Résurrection (Qiyāmat al-qiyāmāt). H. Corbin a montré qu'il en résultait que désormais il ne s'agissait plus, comme dans d'autres gnoses shī‘ites, d'équilibrer l'exotérique et l'ésotérique, mais de considérer l'exotérique de la Loi comme « une coquille qu'il faut briser une fois pour toutes ». L'imām qui révèle les Vérités ésotériques est la manifestation du Commandement (amr) et du Verbe (kalima) de Dieu.

Au début du xiie siècle, les assassins s'étendirent d'Iran en Syrie et furent en rapport avec les croisés. En 1256, Alamūt fut pris et démantelé par les Mongols, mais l'esprit de la secte survécut.

— Roger ARNALDEZ

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Écrit par

  • : membre de l'Institut, professeur émérite à l'université de Paris-IV-Sorbonne

Classification

Pour citer cet article

Roger ARNALDEZ. ASSASSINS, secte [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • DJOVAYNĪ (1226-1283)

    • Écrit par Michèle ÉPINETTE
    • 306 mots

    Né dans le petit village de Azādvār du district de Djovayn (à l'ouest du Khurasān) et mort à Arrān. ‘Alā al-Dīn ‘Aṭā Malik Djovaynī (ou Djuwaynī) est l'un des plus grands historiens de l'époque mongole.

    Son ouvrage principal, Tārikh-e Djahān Goshāy, donne des indications...

  • GHAZĀLĪ AL- (1058-1111)

    • Écrit par Roger ARNALDEZ
    • 3 434 mots
    ...son empire est partagé entre son frère et ses fils dont les discordes annoncent le déclin de la dynastie. La même année, Niẓām al-Mulk périt victime des Assassins, adeptes d'une secte shī‘ite ismā‘īlienne qui avaient réussi à s'installer dans les montagnes de l'Elbourz et menaçaient le pouvoir établi. On...
  • ISMAÉLISME

    • Écrit par Michel BOIVIN, Osman YAHIA
    • 6 924 mots
    • 1 média
    ...de guerre seldjoukide en trouvant une forme de violence adaptée à sa situation : l'assassinat de personnages importants. Il est probable que le terme «  assassins », qu'ont utilisé les auteurs occidentaux dès l'époque des croisades, provienne du sobriquet « ḥashīshiyyīn » dont les...

Voir aussi