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ALBERS ANNI (1899-1994)

Anni Albers, dont l’œuvre a parfois été occulté par celui de Josef Albers (1888-1976), son époux, est une artiste majeure de l’art textile du xxe siècle.

Née à Berlin le 12 juin 1899, Annelise Fleischmann étudie au Studienateliers für Malerei und Plastik (1916-1918) auprès du peintre postimpressionniste Martin Brandenburg, avant d’intégrer en 1922 l'école du Bauhaus. Elle est en effet attirée par l’ambition avant-gardiste de l’établissement fondé par Walter Gropius. Après une année de cours préliminaire, elle poursuit le cursus réservé aux étudiantes en rejoignant l’atelier de tissage piloté par Georg Muche, puis par Gunta Stölzl (elle le dirigera à son tour durant quelques mois en 1931). Cet atelier devient un laboratoire de recherche pour l’abstraction et, grâce aux bénéfices tirés de la vente de sa production, participe très largement au financement de l’école. Anni Albers trouve dans la création textile un champ d’expérimentation des plus stimulants, par-delà la hiérarchie traditionnellement établie entre art et artisanat. S’y épanouit son remarquable sens du rythme et de la couleur. Bientôt, elle réalise des tentures murales abstraites (Wallhanging, 1924, Bethany CT, The Josef and Anni Albers Foundation), un mode d’expression qu’elle explorera durant plusieurs décennies. Elle rédige aussi des articles théoriques, les premiers d’une longue série et dont certains seront réunis en volume (On Weaving, 1965). En 1925, elle épouse Josef Albers, peintre et enseignant au Bauhaus. Ils ne cesseront, au cours d'une vie consacrée à l’art, à l’harmonie quotidienne et à la pédagogie, de dialoguer et d’échanger.

Dès 1926-1927, Anni Albers reçoit ses premières commandes. Sa tenture murale pour l’auditorium de la Bundesschule des Allgemeinen Deutschen Gewerkschaftsbundes à Bernau (1929) révèle ses capacités d’innovation : pour ses qualités réfléchissantes et phoniques, elle intègre au coton et à la chenille de la Cellophane. Cette pièce, qui suscite l’admiration du conservateur d’Architecture et de Design du Museum of Modern Art (New York), permettra aux Albers, désireux de fuir l’Allemagne nazie en 1933, d’obtenir sur sa recommandation des postes d’enseignants au Black Mountain College. Au cours des années suivantes, cette faculté progressiste située en Caroline du Nord attirera plusieurs anciens professeurs ou élèves du Bauhaus en exil.

L’installation aux États-Unis offre l’opportunité à Anni et Josef Albers de voyager régulièrement en Amérique latine, guidés par leur fascination pour l’art précolombien qu’ils collectionnent. Cette approche primitiviste, propre à de nombreux artistes modernes en quête d’authenticité, inspire à Anni Albers des textiles à motifs de méandre (Red Meander, 1954, coll. part.), mais aussi, en collaboration avec Alexander Reed, un de ses étudiants, des bijoux fantaisie faits d’assemblages d’objets manufacturés (épingles à cheveux, bondes et chaînes d’évier, trombones, etc.). Elle conçoit dans les années 1940 et 1950 de nombreux tissages, toujours abstraits, à partir de fibres naturelles (coton, lin, laine, soie, fils métalliques, crin) et synthétiques (Cellophane, Nylon, plastique, rayonne, polyester), dans lesquels elle joue avec les effets de cadence, de couleur, de texture, souvent complexes. En digne héritière de la pensée fonctionnaliste du Bauhaus, elle dote certains de ses tissages d’une destination usuelle, à l’exemple de tissus créés pour le magasin new-yorkais Rena Rosenthal ou de rideaux séparateurs (vers 1949, New York, The Museum of Modern Art). D’autres, les pictorialweavings (« tissages picturaux ») notamment, sont destinés à être accrochés au mur comme des tableaux, pour leur seule valeur esthétique. Ils feront l’objet en 1959 d’une rétrospective itinérante à l’initiative du prestigieux Massachusetts Institute[...]

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Écrit par

  • : docteure en histoire de l'art contemporain, historienne de l'art, auteure

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Pour citer cet article

Camille VIÉVILLE. ALBERS ANNI (1899-1994) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

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