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GLEIZES ALBERT (1881-1953)

Initié très jeune à une peinture « classique » par son grand-père et son oncle (grand prix de Rome), Albert Gleizes expose pour la première fois, en 1901, au Salon d'automne. Toutefois, ce n'est qu'en 1909 que le peintre, après avoir rencontré Le Fauconnier, s'oriente vers une analyse de l'espace et de l'objet figuratif inspirée par l'œuvre de Cézanne (Portrait de Jacques Nayral, coll. Gleizes). En 1911, il participe aux réunions du groupe de Puteaux et, à la même époque, fait la connaissance de Picasso qui l'oriente définitivement. L'adhésion de Gleizes au cubisme trouve une consécration en 1915, lors de l'exposition dite de « la Section d'Or » (galerie La Boétie, Paris), exposition à laquelle il participe avec un envoi important. Cette manifestation groupait pour la première fois tous les artistes qui, depuis quelques années, travaillaient dans le sillage de Braque et de Picasso.

En 1912, Gleizes écrit avec Metzinger le fameux traité Du cubisme, qui, avec le livre d'Apollinaire Les Peintres cubistes (1913), constitue un des ouvrages les plus importants pour la compréhension du mouvement. Mais les nombreux passages purement théoriques du livre et les exposés parfois trop dogmatiques susciteront par la suite (vers les années vingt) chez les cubistes mineurs, une certaine tendance à la systématisation des démarches de Braque et de Picasso. Parmi les autres écrits du peintre, citons encore Souvenirs : le cubisme. 1908-1914 (Paris, 1947), témoignage unique sur les deux premières manifestations importantes du groupe.

Les caractères propres à l'œuvre de l'artiste apparaissent déjà dans le portrait de Jacques Nayral. D'abord, contrairement à Picasso, le sujet domine dans cette toile et le peintre se contente de simplifier les formes et de schématiser la silhouette du personnage, tout en demeurant très soucieux du détail. Cette attitude cubisante ressort également dans Paysage avec personnage (1911, Musée national d'art moderne, Paris) où les arbres deviennent des éléments géométriques presque purs, alors que le personnage est traité avec un net souci de réalisme. En effet, Gleizes gardera toujours des attaches très fortes avec le sujet représenté, qui demeure pour lui l'essentiel du travail pictural. L'Homme au balcon (1912, Museum of Art, Philadelphie) illustre parfaitement cette tendance : l'homme se trouve placé au centre de la composition et un grand nombre de repères réalistes guident le regard du spectateur. Quelques tableaux de 1914 semblent plus axés sur une déconstruction de l'objet figuratif (La Dame aux bêtes, 1914, coll. part.). Ces œuvres sont d'ailleurs très proches du travail de Gris et de Picasso (cubisme analytique). Mais, vers la même époque, l'architecture des toiles de Gleizes se modifie sous l'influence du cubisme synthétique et, tout au long de la Première Guerre mondiale, une structuration très géométrique s'impose à ses tableaux (Brooklin Bridge, 1915). Après 1917, l'artiste tente d'associer une formule abstractisante à la tradition de la peinture religieuse, mais sans parvenir à élaborer un langage plastique novateur. Durant les années 1920, le peintre va formuler dans La Peinture et ses lois une véritable discipline scientifique au service d'une idéologie religieuse. La Femme au gant (1920, coll. part., Paris) est un tableau qui nous permet de cerner les limites de l'évolution de Gleizes après 1920. Malgré une division de l'espace très bidimensionnelle, le sujet demeure au centre de la composition, stable et reconnaissable, et les efforts d'assimilation du langage abstrait restent encore timides et inopérants. En 1939, le peintre se retire à Saint-Rémy-de-Provence, mais continue à exercer une influence considérable.

Gleizes est avec Metzinger et Le Fauconnier le créateur[...]

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Écrit par

  • : professeur d'histoire de l'art à l'université de Paris-Ouest-Nanterre-La Défense

Classification

Pour citer cet article

Charles SALA. GLEIZES ALBERT (1881-1953) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • ANTI-ART

    • Écrit par Alain JOUFFROY
    • 3 063 mots
    • 1 média
    ...demeure aujourd'hui, même s'il n'est plus tout à fait clandestin. « Pauvres artistes aliénistes sans passion ni esprit ni charme », disait alors Picabia. Albert Gleizes, lui aussi, malgré son cubisme sérieux (391 l'appelait alors « chef du cubisme »), déclarait, toujours dans 391 : « Il n'y...
  • CUBISME

    • Écrit par Georges T. NOSZLOPY, Paul-Louis RINUY
    • 8 450 mots
    ...à l'atelier de Picasso, au Bateau-Lavoir, jouèrent un grand rôle dans la diffusion des découvertes cubistes. En 1910, Metzinger, Robert Delaunay, Gleizes, Léger et Le Fauconnier fondèrent le premier groupe d'artistes cubistes ; en étroit rapport avec l'avant-garde littéraire, ils se réunissaient...

Voir aussi