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BEN SALAH AHMED (1926-2020)

Homme politique et syndicaliste tunisien.

Né le 13 janvier 1926 dans une famille de la petite bourgeoisie de Mouknine, dans le Sahel tunisien, Ahmed ben Salah se lance, ses études terminées, dans l'action syndicale. Il se révèle rapidement comme un animateur de l'Union générale des travailleurs tunisiens (UGTT), reconstituée en 1945 par Ferhat Hached : il représente, à Bruxelles, l'UGTT auprès de la puissante Confédération internationale des syndicats libres (CISL), dont il deviendra vice-président ; l'UGTT avait, en effet, après avoir été membre de la Fédération syndicale mondiale (FSM) en 1949-1950, choisi d'adhérer en 1951 à la CISL ; celle-ci constituait une instance privilégiée, car elle permettait aux nationalistes tunisiens de présenter à l'opinion internationale leurs revendications sans les faire taxer de communistes ; l'opinion publique aux États-Unis était plus spécialement visée, par le biais de l'AFL-CIO, membre de la CISL, car elle paraissait en mesure d'influer favorablement sur le gouvernement français. L'audience internationale ainsi acquise par Ben Salah lui permet d'être élu secrétaire général de l'UGTT dans les jours qui précèdent le discours de Carthage du 31 juillet 1954, par lequel Pierre Mendès France reconnaît à la Tunisie le droit à l'autonomie interne. Ahmed Ben Salah remplace à ce poste Ferhat Hached, assassiné le 5 décembre 1952 dans des conditions mystérieuses. Ben Salah n'hésite pas, au cours de l'année 1956, à accuser le gouvernement Tahar Ben Ammar, auquel les néo-destouriens participent, de servir les intérêts de la grande bourgeoisie. Au nom de l'impératif unitaire, Habib Bourguiba, qui vient d'être élu le 8 avril 1956 président de l'Assemblée constituante tunisienne, répond que les revendications égalitaires ne doivent pas se transformer en pression des démunis sur les possédants. La forte personnalité de Ben Salah faisant craindre au Néo-Destour que l'UGTT n'échappe à son contrôle, ou même qu'elle ne suscite la création d'un parti travailliste, un courant néo-destourien se forme rapidement au sein de l'UGTT pour obtenir l'éviction de Ben Salah. Au congrès de septembre 1956, ce courant, animé par Habib Achour, pénètre la commission administrative ; sous l'influence d'Achour, certaines unions régionales refusent de s'affilier à l'UGTT et se groupent en union rivale ; le Néo-Destour, s'appuyant sur les syndicats des patrons de l'industrie, du commerce, de l'artisanat (UTTCA) et de l'agriculture (UNAT), contraint Ben Salah à se démettre en décembre 1956 ; il est remplacé par Ahmed Tlili.

Écarté de l'UGTT, Ben Salah est nommé secrétaire d'État à la Santé publique et aux Affaires sociales. Constatant en 1960 la chute des investissements et la fuite des capitaux et percevant le déclin de l'enthousiasme populaire né avec l'indépendance, Bourguiba, après avoir changé trois fois de ministre de l'Économie en quatre ans, déclare opter pour la planification puis pour le socialisme. Il charge, en 1961, Ben Salah de la planification et des finances. Entré par cooptation au bureau politique du Néo-Destour, ce dernier reprend l'essentiel de son rapport économique du VIe congrès de l'UGTT (1956) et prépare un plan, les Perspectives décennales (1962-1971), puis un plan triennal ayant pour but de mettre en place les structures nouvelles. Les Perspectives décennales, dont le préambule affirme que « ... la Tunisie opte résolument pour le socialisme », visent à décoloniser l'économie nationale par l'intégration du secteur colonial et la « tunisification » des enclaves demeurées étrangères : entendant assurer un autodéveloppement du pays, le plan assigne à l'aide extérieure de rester inférieure à 50 p. 100 des investissements[...]

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Écrit par

  • : chargé de recherche à l'Institut national de la recherche agronomique

Classification

Pour citer cet article

Pierre SPITZ. BEN SALAH AHMED (1926-2020) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • TUNISIE

    • Écrit par Michel CAMAU, Roger COQUE, Universalis, Jean GANIAGE, Claude LEPELLEY, Robert MANTRAN, Khadija MOHSEN-FINAN
    • 19 981 mots
    • 15 médias
    ...la politique de Bourguiba se préoccupe peu d’économie. Pour extraire la Tunisie au sous-développement et à la pauvreté, Bourguiba se laisse séduire par le projet que lui a proposé Ahmed ben Salah, lorsqu’il était secrétaire général de l’UGTT en 1956. Ben Salah a foi dans les théories des économistes...

Voir aussi