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ABBADIDES

Avant d'être une famille souveraine, les Abbadides furent illustrés par un homme de loi, Ismaïl ibn Aḃbad, puis par son fils, juriste lui aussi devenu cadi de Séville : Abou-l-Qasim Mohammed. Peu après la dislocation du califat omeyyade de Cordoue (1010), ce cadi s'attribua le pouvoir à Séville, y prenant en 1023 (414 de l'hégire) le titre de hadjib (« chambellan », c'est-à-dire maire du palais). Il devint ainsi un prince indépendant de facto, tout en reconnaissant encore une suprématie à la dynastie de souche arabo-marocaine des Hammoudides, qui s'attribuait à Cordoue l'autorité califale. Mais, bientôt, il rejeta cette suzeraineté, devenant un émir de rang royal, d'autant que le califat hammoudide de Cordoue se résorba dès 1031 en un émirat. C'était l'époque où al-Andalus, c'est-à-dire l'Espagne musulmane, se fractionnait en royaumes dits de taïfas.

Après des luttes obscures contre les taïfas voisines, l'Abbadide Abou-l-Qasim mourut en 1042, ayant bien assis son émirat sévillan. Son fils Abou Amr Abbad, alors âgé de vingt-six ans, lui succéda, prenant le nom d' al-Motadid billah (« Celui qui compte sur Dieu »). Autoritaire, ambitieux, rusé, cruel, sans scrupules, homme de cabinet plus que chef militaire, ce prince fut jusqu'à sa mort, en 1069, le plus en vue des rois de taïfas du groupe hispano-arabe comprenant les chefs berbères qui avaient constitué des États, notamment l'émir ziride de Grenade. Durant un temps, afin de faciliter sa politique, al-Motadid feignit d'avoir retrouvé et restauré le dernier souverain omeyyade de Cordoue, le calife Hicham II (renversé en 1009, rétabli en 1010, disparu en 1013) qu'il prétendait maintenir à l'abri de tous contacts, pour lui éviter une nouvelle disparition. Par la suite, il n'en fut plus question.

Ce politique impitoyable fit périr asphyxiés dans des thermes dont il avait fait boucher les issues de petits princes berbères d'Andalousie qu'il avait invités à un banquet : ceux-ci venaient de se rallier à lui, mais il doutait de leur sincérité. Il n'hésita pas davantage à tuer son fils Ismaïl, qui avait tenté de se tailler une principauté indépendante. Philosophe, fataliste par certains côtés, il était aussi raffiné, épicurien ; poète, il parlait et écrivait un arabe très élégant et entretenait à sa cour un cénacle de versificateurs et de rhétoriciens. Mais, plus heureux ou plus habile contre les princes musulmans, ses rivaux, que contre les chrétiens, il avait dû « acheter » la paix à Ferdinand le Grand, le roi qui régnait sur la Castille, le León et la Galice, lui versant chaque année un tribut de plusieurs milliers de pièces d'or. Respectueux de la foi chrétienne, il autorisa en 1063 le transfert, de Séville à León, des restes de saint Isidore, le grand docteur de l'Église wisigothique des vie et viie siècles.

Le fils et successeur d'al-Motadid, Mohammed, né en 1040, régna de 1069 à 1091, sous le nom d' al-Motamid billah (« Celui qui s'appuie sur Dieu »). Son père lui avait fait apprendre l'art de gouverner, en le plaçant très jeune à la tête de la province de Silves. Il y avait connu un jeune poète, Ibn Ammar, avec qui il se lia d'une grande amitié ; devenu roi, il en fit son conseiller et son vizir. Il poursuivit, avec les mêmes méthodes que son père, la même politique d'expansion. Poète lui aussi, protecteur des musiciens et des médecins, créateur d'un jardin botanique, il n'était pas dépourvu de noblesse. Lorsque le roi García de Galice fut vaincu et détrôné en 1071 par ses frères Sanche de Castille et Alphonse VI de León (ces trois princes s'étant partagé en 1065 l'héritage de leur père Ferdinand le Grand), al-Motamid hébergea plusieurs mois le monarque chrétien fugitif, à qui il avait antérieurement payé tribut (car c'est le roi de Galice qui avait hérité en[...]

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Pour citer cet article

Charles-Emmanuel DUFOURCQ. ABBADIDES [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • TALAS (BATAILLE DU), en bref

    • Écrit par Pascal BURESI
    • 210 mots

    En 751, les armées musulmanes auraient, selon les chroniques arabes, écrasé les troupes chinoises du général Kao Sien-tche dans la plaine du Talas, près de la localité éponyme, dans le sud de l'actuelle république du Kazakhstan. Profitant des divisions entre Tibétains et Chinois pour...

Voir aussi