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QUIÉTISME

Avant la condamnation de 1687

Le quiétisme proprement dit apparut en Italie dans les années 1670-1680, préparé dans la péninsule par une littérature mystique où sont prônés l'annihilation, le sommeil mystique et l'indifférence complète ; des groupes de « parfaits », tels ceux qui se réunissaient en Lombardie et qui furent condamnés en 1657 ou les membres de l'entourage des frères Leoni, laissent deviner en quels milieux ces tendances se répandaient. L'œuvre importante du cardinal Petrucci, les opuscules de V. A. Ripa, évêque de Verceil, développaient en ces années une spiritualité nettement orientée vers la mystique. Mais ces tendances ne se limitaient pas à l'Italie : l'œuvre de l'Espagnol Falconi, celle du Français Malaval, de Marseille, et surtout celle de l'Espagnol Miguel Molinos (1628-1696), qui est venu résider à Rome en 1663, en montrent le caractère international : la Guía espiritual de Molinos, publiée en 1675, fut rapidement traduite en six langues ; l'ouvrage, moins original que le bruit soulevé autour de l'auteur ne le ferait croire, constitue l'aboutissement de la tradition mystique du siècle par son exaltation de la contemplation au-dessus de la méditation, de l'abandon total à Dieu et au directeur spirituel et de l'anéantissement de soi.

Une vive opposition se développa à Rome et en Italie : à cette occasion, en 1682, la dénomination de « quiétistes » fut employée pour la première fois par le cardinal Caracciolo, archevêque de Naples, dénonçant ceux qui vantaient exclusivement l'oraison de pure foi et de repos. Le procès de Molinos aboutit en 1687 à la condamnation de soixante-huit propositions par la constitution Coelestis pastor, et montra l'importance des motifs de discipline et de politique ecclésiastiques à côté des motifs théologiques : si tout n'est pas clair dans cette condamnation, elle n'en marque pas moins le début d'un reflux, d'autant plus que la mystique, en tant qu'expérience du divin, est tributaire d'un support social et de représentations intellectuelles qui ont profondément changé au cours du siècle.

Il est significatif que des piétistes allemands comme A. H. Francke aient admiré Molinos et aient rencontré dans l'Église luthérienne une opposition aussi vive que celle dont les quiétistes étaient l'objet au sein de l'Église romaine.

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Écrit par

  • : agrégé de l'Université, docteur ès lettres, directeur d'études à l'École pratique des hautes études (Ve section, sciences religieuses)

Classification

Pour citer cet article

Jacques LE BRUN. QUIÉTISME [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • BOSSUET JACQUES BÉNIGNE (1627-1704)

    • Écrit par Universalis, Jacques TRUCHET
    • 3 921 mots
    • 1 média
    ...matière de spiritualité comme en matière d'exégèse, le nom de Bossuet reste attaché à une polémique fâcheuse pour sa mémoire : la fameuse querelle du quiétisme. Pour un peu, l'on douterait qu'il eût été lui-même un spirituel. Il en fut un cependant, en ce sens que, chez lui, les attitudes théocentriques...
  • FÉNELON FRANÇOIS DE SALIGNAC DE LA MOTHE- (1651-1715)

    • Écrit par Jeanne-Lydie GORÉ-CARACCIO
    • 3 154 mots
    ...cependant que son directeur de conscience, le P. Lacombe, était incarcéré, la récente condamnation par Innocent XI, en cour de Rome, de la doctrine du quiétiste Molinos, en octobre 1687, ayant particulièrement sensibilisé la hiérarchie (en l'occurrence l'archevêque de Paris Mgr de Harlay),...
  • GUYON DE CHESNOY JEANNE MARIE BOUVIER DE LA MOTTE dite MADAME (1648-1717)

    • Écrit par Jean-Robert ARMOGATHE
    • 714 mots

    Écrivain spirituel qui joua un rôle important dans la querelle du quiétisme francais. Née à Montargis en 1648, Jeanne Marie Bouvier de La Motte épousa à seize ans Jacques Guyon, héritier d'une grosse fortune et de vingt-deux ans son aîné. Sa vie domestique est peu connue : les Guyon eurent cinq...

  • INNOCENT XI, BENEDETTO ODESCALCHI (1611-1689) pape (1676-1689)

    • Écrit par Universalis
    • 540 mots

    Benedetto Odescalchi naît le 19 mai 1611 à Côme, dans le duché de Milan. Il étudie le droit à l'université de Naples et intègre la curie sous le pontificat d'Urbain VIII. Le pape Innocent X le nomme cardinal en 1645, puis légat à Ferrare (Italie) et évêque de Novare (Italie) en 1650....

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Voir aussi