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MARSEILLAISE LA

Chant patriotique composé pendant la période révolutionnaire au moment où la France déclarait la guerre à l’Autriche (1792), La Marseillaise divisa les Français au xixe siècle avant de devenir l’hymne national en 1879.

Un chant de guerre révolutionnaire

<em>Rouget de Lisle chantant La Marseillaise</em>, I. Pils - crédits : De Agostini/ Dagli Orti/ Getty Images

Rouget de Lisle chantant La Marseillaise, I. Pils

Le 26 avril 1792, le jeune officier et musicien Claude Rouget de Lisle présente sa nouvelle composition à Philippe-Frédéric de Dietrich, le maire de Strasbourg. Le rythme soutenu, les paroles enthousiastes et martiales envahissent le salon du riche industriel. Le « Chant de guerre pour l’armée du Rhin » n’est alors qu’un chant militaire parmi d’autres, mais il est marqué par le contexte du printemps de 1792 : six jours plus tôt, la France a déclaré la guerre au roi de Bohême et de Hongrie, c’est-à-dire à l’Autriche, alliée à la Prusse.

La France, pays le plus peuplé d’Europe, doit compter sur des volontaires pour défendre les premiers acquis de la Révolution : il faut s’appuyer sur cette richesse humaine et surtout galvaniser ces soldats non professionnels, pour leur insuffler du courage et donner du sens à leur engagement.

Rouget de Lisle l’a bien compris. Au début de la Révolution, ce capitaine du génie avait entamé une carrière de compositeur, tentant déjà d’être en phase avec l’actualité : en 1791, au moment de la proclamation de la nouvelle Constitution, il avait livré un Hymne à la Liberté. En 1792, il reprend du service et se rend à Strasbourg. Proche de la frontière, la ville vit sous la menace. Sensible à l’idée d’encourager les volontaires, le maire passe commande d’un hymne au jeune officier, qui le compose en une nuit. Le chant de guerre fonde le mythe d’une nation en armes.

Partition de <em>La Marseillaise</em> - crédits : AKG-images

Partition de La Marseillaise

Destiné à l’armée du Rhin, dédié à son commandant le maréchal Luckner, le chant est joué dès le 29 avril par la musique de la garde nationale de Strasbourg et se propage ensuite comme une traînée de poudre : on le chante à Lyon, à Montpellier puis, le 22 juin, à Marseille, où il rencontre un tel succès que les fédérés qui partent vers Paris pour la fête du 14 juillet en font leur chant favori. Le « Chant de guerre pour l’armée du Rhin » change de nom : on commence à l’appeler la « Marche des Marseillais », « L’Hymne des Marseillais » et même « La Marseillaise ». Le 26 juillet, il est entonné à Paris sous le titre « Allons enfants de la Patrie ! » lors d’un banquet donné sur l’emplacement même de la Bastille. Le 10 août, lorsque le palais des Tuileries est attaqué par les sans-culottes, il devient le symbole sonore de la chute de la monarchie. Il supplante déjà le Ça ira de Ladré, mais aussi la toute jeune Carmagnole.

Entonné lors des insurrections, des batailles (comme à Valmy) et des fêtes, comme celle de l’Être suprême (8 juin 1794), ce texte porte la marque de la peur de l’invasion : « Entendez-vous dans les campagnes/Mugir ces féroces soldats ?/Ils viennent jusque dans vos bras/Égorger vos fils, vos compagnes ! ». Les paroles appellent à l’engagement total : « Aux armes citoyens/Formez vos bataillons/Marchons, marchons/Qu’un sang impur/Abreuve nos sillons ». Pourtant, La Marseillaise demeure avant tout un chant révolutionnaire, fondé sur la liberté et la solidarité entre les nations. Elle n’encourage à aucune violence aveugle et surtout pas contre les populations civiles ni les simples soldats, présentés comme des victimes à libérer : « Épargnez ces tristes victimes/À regret s’armant contre nous… ». Le « sang impur » n’est donc pas celui des étrangers en général, encore moins celui des soldats français, c’est celui, corrompu par le despotisme, des aristocraties européennes qui, dominant les armées, usent de la violence pour maintenir un ordre ancien, fondé sur la domination des peuples. En face d’elles, la nation française se présente comme une multitude inépuisable et solidaire de frères et de citoyens : «[...]

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Écrit par

  • : maître de conférences en histoire moderne à l'université de Paris-I-Panthéon-Sorbonne

Classification

Pour citer cet article

Guillaume MAZEAU. MARSEILLAISE LA [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Médias

<em>Rouget de Lisle chantant La Marseillaise</em>, I. Pils - crédits : De Agostini/ Dagli Orti/ Getty Images

Rouget de Lisle chantant La Marseillaise, I. Pils

Partition de <em>La Marseillaise</em> - crédits : AKG-images

Partition de La Marseillaise

<em>Le Départ des volontaires en 1792</em>, F. Rude - crédits : Kiev.Victor/ Shutterstock

Le Départ des volontaires en 1792, F. Rude

Autres références

  • RÉVOLUTION FRANÇAISE

    • Écrit par Jean-Clément MARTIN, Marc THIVOLET
    • 29 554 mots
    • 3 médias
    ...s'intronisant défenseurs de la Révolution, ils entreprennent des opérations punitives à l'encontre des adversaires, et notamment des prêtres réfractaires. Les Marseillais se distinguent particulièrement, marchant sur Paris au son du Chant de guerre de l'armée du Rhin, qui prendra le nom de Marseillaise...
  • ROUGET DE LISLE CLAUDE (1760-1836)

    • Écrit par Marc VIGNAL
    • 348 mots

    Officier et compositeur français né à Lons-le-Saunier, mort à Choisy-le-Roi, Rouget de Lisle est en 1791 capitaine en garnison à Strasbourg. En avril de l'année suivante, il y écrit les vers et compose très probablement la mélodie d'un Chant de guerre de l'armée du Rhin...

Voir aussi