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LE GOFF JACQUES (1924-2014)

Jacques Le Goff - crédits : Sophie Bassouls/ Sygma/ Sygma/ Getty Images

Jacques Le Goff

Jacques Le Goff, né à Toulon le 1er janvier 1924 et mort à Paris le 1er avril 2014, est, aux côtés de Marc Bloch et de Georges Duby, l’une des grandes figures de l’histoire médiévale en France et dans le monde. L’importance de son œuvre, qui s’étale sur plus de six décennies, depuis son premier article, publié en 1948, jusqu’à son dernier livre, paru en janvier 2014, quelques semaines avant sa mort, et les nuances de sa trajectoire intellectuelle et institutionnelle sont pourtant paradoxalement difficiles à retracer, tant elles sont déjà figées par ses récits autobiographiques et par la notoriété dont il a joui à partir des années 1970, dans le contexte du rayonnement international de l’école historique française liée à la revue des Annales.

Une œuvre historiographique de grande ampleur

Étudiant à l’École normale supérieure au lendemain de la guerre, agrégé d’histoire en 1950, séjournant à Prague en 1948 puis pensionnaire à l’École française de Rome en 1952-1953, Jacques Le Goff consacre ses premiers travaux aux universités médiévales, qui le conduisent en 1957 à publier Les Intellectuels au Moyen Âge, alors qu’il enseigne à l’université de Lille (1954-1959). Il propose dans ce livre novateur de considérer les maîtres de l’université du Moyen Âge comme des « intellectuels », dans un sens moins politique que sociologique, c’est-à-dire comme des travailleurs urbains gagnant leur vie par leur profession intellectuelle. Il opère ainsi une rupture avec la tradition d’histoire institutionnelle et philosophique des universités, en privilégiant une approche économique et sociale, qui se manifeste également par une série de travaux sur le sel, les marchands et les banquiers, aboutissant à un projet de thèse sur le travail au Moyen Âge, qu’il ne mènera jamais à son terme. À partir de 1960, après son entrée à la VIe section de l’École pratique des hautes études (E.P.H.E.), alors qu’il écrit La Civilisation de l’Occident médiéval (1964), ses travaux s’orientent progressivement vers une histoire plus attentive à la culture médiévale, aux représentations collectives et au rôle de l’Église. Il publie dans les deux décennies suivantes de nombreux articles qui sont repris dans deux recueils, Pour un autre Moyen Âge (1977) et L’Imaginaire médiéval (1985). En 1981, La Naissance du purgatoire retrace l’invention et le développement de ce lieu intermédiaire entre enfer et paradis, qui apparaît à la fin du xiie siècle, et propose une perspective de salut aux pécheurs. À l’orée des années 1980, un nouveau sujet retient son attention, le roi de France Louis IX, dit « Saint Louis », à propos duquel il publie une quinzaine d’articles préparatoires au Saint Louis paru en 1996. Dans ce livre d’un millier de pages, Jacques Le Goff renoue avec l’histoire politique et biographique, mais en transforme la perspective par une volonté de reconstitution totalisante du personnage et par une interrogation sur les rapports entre l’individu, les récits de son temps et le travail de l’historien. Dans les années suivantes, il continue à écrire, rassemblant en 1999 ses travaux sur un autre grand personnage médiéval, saint François d’Assise, se consacrant à des ouvrages destinés au grand public, mais abordant également de nouveaux chantiers, parmi lesquels on peut retenir son livre sur Jacques de Voragine et La Légende dorée, À la recherche du temps sacré (2011), qui rappelle son intérêt pour la manière dont l’Église a façonné la perception du temps au Moyen Âge.

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Écrit par

  • : maître de conférences en histoire du Moyen Âge à l'université de Versailles-Saint-Quentin-en-Yvelines

Classification

Pour citer cet article

Étienne ANHEIM. LE GOFF JACQUES (1924-2014) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Média

Jacques Le Goff - crédits : Sophie Bassouls/ Sygma/ Sygma/ Getty Images

Jacques Le Goff

Autres références

  • SAINT LOUIS (J. Le Goff)

    • Écrit par Catherine VINCENT
    • 1 497 mots

    En rédigeant Le Dimanche de Bouvines, paru en 1973, Georges Duby, l'un des maîtres de la « nouvelle histoire », avait délibérément affronté la présentation d'un événement ; vingt-trois ans plus tard, Jacques Le Goff, éminent représentant de l'école des Annales, proposait...

  • HISTOIRE (Domaines et champs) - Anthropologie historique

    • Écrit par André BURGUIÈRE
    • 3 148 mots
    • 1 média
    ...rechercher systématiquement le miroir originel de notre propre culture comme le voudrait la tradition des humanités (Les Origines de la pensée grecque, 1962). Jacques Le Goff a retenu la leçon de Marc Bloch qui invite à entrer dans l'univers mental de l'homme médiéval pour comprendre son rapport au monde, aux...
  • DÉBAT LE, revue

    • Écrit par Laurent LEMIRE
    • 1 244 mots
    ...comme François Furet pour livrer une autre approche de la Révolution française et du rôle du Parti communiste, tandis que l’historien médiéviste Jacques Le Goff prend ses distances avec l’école des Annales. Pendant quatre décennies, la revue accompagne la vie intellectuelle française en traitant...

Voir aussi