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HUMANITÉS NUMÉRIQUES

Les humanités numériques renvoient à un ensemble de pratiques utilisant le numérique – ou, plus précisément, une approche informatisée – pour l’analyse de données dans différents domaines des lettres, des sciences humaines (archéologie, philosophie, histoire…) et des sciences sociales (économie, sociologie, sciences politiques…), c’est-à-dire ce qu’on appelle fréquemment les « SHS » (sciences humaines et sociales). La question du périmètre exact de ce domaine a donné lieu à de nombreux débats (Terras et al., 2013), de même que la question de savoir si les humanités numériques constituent un domaine scientifique en soi, sachant que tous les secteurs des lettres et sciences humaines sont potentiellement concernés (c’est-à-dire l’ensemble de ce que recouvre le terme humanities en anglais, d’où l’expression « humanités numériques » en français, qui est à l’origine un calque de l’anglais Digital Humanities). On s’accorde aujourd’hui à considérer les humanités numériques comme renvoyant avant tout à une communauté de pratiques autour d’approches informatisées pour l’analyse des données en lettres et SHS.

Il peut dès lors être utile de distinguer deux approches. Une partie importante du domaine des humanités numériques consiste à rendre disponible, de préférence grâce à des éditions de référence, des corpus fondamentaux pour la culture d’aujourd’hui. Il peut s’agir aussi bien de corpus de textes littéraires que de manuscrits historiques, de collections d’images ou de partitions de musique. Le choix des documents, leur édition et les modes d’accès disponibles en ligne sont des activités relevant des humanités numériques, mais on peut dire que le numérique y a une part secondaire. Dans ce cadre, l’utilisation de l’informatique vise à favoriser la mise au point d’éditions numériques avancées pour l’enseignement ou la recherche, mais le travail fondamental reste humain, que ce soit pour l’édition, la validation ou la consultation. Ce type de pratiques fait aujourd’hui partie de la formation classique de la plupart des universités (qu’il s’agisse d’histoire, de littérature ou d’économie) et elles sont graduellement intégrées à la formation de base des chercheurs dans ces domaines.

Une autre partie de la communauté des humanités numériques conduit des recherches afin d’utiliser les données massives aujourd’hui disponibles dans les domaines cités (lettres et SHS) pour en faire émerger des tendances et des faits nouveaux, qu’il serait quasiment impossible de découvrir sans ordinateur. Les faits analysés exigent souvent le recours à des algorithmes et des techniques d’analyse inédites pour étudier de façon originale les données, ou pour vérifier des hypothèses qui ne pourraient être que difficilement validées par une analyse humaine des données. Ce courant de recherche est parfois appelé computational humanities pour le distinguer de l’approche précédente, centrée sur l’édition et la mise à disposition des données. Les deux approches sont en fait complémentaires, les analyses fines de type informatique (computational humanities) nécessitant, autant que possible, des corpus soigneusement encodés et annotés.

Histoire du domaine

On l’a dit, les humanités numériques concernent les analyses, dans le domaine des lettres et des SHS, conduites avec des moyens informatiques. Dès le début, l’informatique a été considérée comme un outil extrêmement puissant pour mener à bien des tâches mécaniques et peu intéressantes. Les chercheurs travaillant sur des sources textuelles ont ainsi souvent besoin de « concordances », ce qui consiste à faire un relevé exhaustif de toutes les occurrences d’un mot ou d’une expression donnée, pertinente pour une question de recherche précise, dans un corpus de référence. Il s’agit d’une tâche extrêmement fastidieuse si elle est menée à la main.[...]

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Écrit par

Classification

Pour citer cet article

Thierry POIBEAU. HUMANITÉS NUMÉRIQUES [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Médias

Méthodes de modélisation et de traitement des données : villa de Diomède - crédits : Villa Diomedes Project (http://villadiomede.huma-num.fr/3dproject/). Réalisation Alban-Brice Pimpaud (archeo3d.net).

Méthodes de modélisation et de traitement des données : villa de Diomède

Portrait d’Edmond de Belamy - crédits : obvious-art.com

Portrait d’Edmond de Belamy

Autres références

  • ANTHROPOLOGIE VISUELLE

    • Écrit par Damien MOTTIER
    • 4 464 mots
    ...nombreux précédents (les Archives de la planète constituées par Albert Kahn à Boulogne-Billancourt, l’Encyclopedia Cinematographica de Göttingen, le Human Studies Film Archives à Washington, etc.), celui-ci connaît d’ailleurs un prolongement important avecl’essor des « humanités numériques ».
  • ÉDITION ÉLECTRONIQUE

    • Écrit par Alexandra SAEMMER
    • 4 013 mots
    • 3 médias
    ...les articles à des bases de données dynamiques et de rendre accessible non seulement un état final, mais un processus de recherche. Reliée au domaine des humanités numériques, la publication scientifique en ligne n’en est pourtant qu’au début des explorations possibles. Il en est de même pour beaucoup...
  • LINGUISTIQUE - Le langage au carrefour des disciplines

    • Écrit par Catherine FUCHS
    • 10 063 mots
    • 6 médias
    ...aussi l'étude littéraire des textes, l'analyse historique, la veille technologique, la documentation, etc. C’est là le domaine de ce que l’on appelle les « humanités numériques » (en anglais, digital humanities). Ce domaine concerne l’utilisation et le développement d’outils numériques dans les différentes...

Voir aussi