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CASTRO FIDEL (1926-2016)

Le leader révolutionnaire

En 1959, Castro affirme à Jules Dubois, journaliste au Chicago Tribune, qu'il n'est pas et n'a jamais été communiste. Mais le 16 avril 1961, il proclame le caractère socialiste de la révolution. Il se dit également marxiste-léniniste et assure qu'il l'a toujours été et le sera jusqu'à sa mort. Reconstruction a posteriori ou vérité cachée par tactique politique, les biographes sont en désaccord. Il semblerait que Fidel Castro ait poussé son frère Raúl à entrer dans les JC en 1953. Enfin, sa rencontre, en 1955, à Mexico, avec Ernesto « Che » Guevara, résolument marxiste, a été essentielle dans son cheminement intellectuel.

Le rapprochement de Fidel Castro avec les communistes cubains n'est pourtant pas évident. Le Parti socialiste populaire (PSP) le trouve « aventuriste » et le programme du groupe d'assaut contre le Moncada n'est pas socialiste. Le fameux pamphlet L'histoire m'absoudra, prononcé lors de son procès en 1953 et publié plus tard, n'est pas conçu en termes marxistes. Castro est révolutionnaire avant tout, il pense, comme Mao Zedong, que la pratique vient avant la théorie. S'il se proclame marxiste-léniniste, il reste un communiste atypique, rebelle aux orientations politiques et stratégiques prônées alors par Moscou. La révolution cubaine est menée par une guérilla de jeunes gens issus des classes moyennes et de la paysannerie et non du prolétariat. Les premières mesures prises par Fidel Castro – redistribution des terres, diminution des loyers, puis nationalisation de grandes compagnies américaines – sont nationalistes et populistes. À Cuba, la transformation sociale ne passe pas par les travailleurs, il n'y a pas de soviets cubains pour contrôler les forces sociales et politiques, et 30 p. 100 des terres restent entre les mains de propriétaires privés après la réforme agraire décrétée en 1959. Le PSP finit, cependant, par rallier la stratégie castriste, ce qui lui vaut de participer au gouvernement. Il se fond ensuite, avec le M26 et le Directoire étudiant (organisation qui a également lutté contre la dictature), dans le PCC en 1965. Mais le centre du pouvoir est autour de Fidel Castro, qui gouverne avec un cercle restreint de proches, dans lequel le seul communiste admis est Carlos Rafael Rodríguez, vieux compagnon de route de Castro depuis l'université.

Fidel Castro - crédits : Bettmann/ Getty

Fidel Castro

Le lídermáximo a peut-être choisi de se tourner vers l'URSS par tactique, car c'est la seule puissance qui peut contrer l'hégémonie américaine sur le sous-continent. De plus, Moscou propose son aide dès 1960, alors que Cuba vit une situation économique désastreuse liée à la fois à la mise en place de la réforme agraire qui provoque la désorganisation des campagnes, à l'exil d'une grande partie des Cubains les plus qualifiés (ingénieurs, médecins, techniciens) et à l'embargo imposé par les États-Unis. Il s'agit d'abord, en juin 1960, d'un accord « sucre contre pétrole » et d'envois d'armes pour les milices populaires cubaines en train de se constituer. Puis ces échanges prennent rapidement des proportions considérables (80 p. 100 du commerce extérieur cubain dépend du CAEM en 1989).

Fidel Castro aux Nations unies, 1975 - crédits : Keystone/ Hulton Archive/ Getty Images

Fidel Castro aux Nations unies, 1975

Le positionnement politique de Fidel Castro, considéré sur le long terme, est ambivalent : il est d'abord proche de l'utopie guévariste qui prône le travail volontaire et la création d'une conscience révolutionnaire des masses ; puis il défend, dans les années 1970, des idées très orthodoxes comme la suprématie du parti et la centralisation planifiée de l'économie avec la distribution de primes pour inciter les travailleurs à être plus productifs. Cet alignement sur l'idéologie soviétique est perceptible dans la Constitution de 1976. Castro est réticent face aux mesures prônées par les Soviétiques au tournant des années 1980[...]

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Écrit par

  • : enseignante ATER de science politique à l'Institut des hautes études de l'Amérique latine, chargée de cours à Sciences Po Poitiers (cycle ibéro-américain de Sciences Po Paris)

Classification

Pour citer cet article

Marie Laure GEOFFRAY. CASTRO FIDEL (1926-2016) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Médias

Fidel Castro, 1960 - crédits : Keystone/ Getty Images

Fidel Castro, 1960

Fulgencio Batista, 1955 - crédits : Keystone/ Hulton Archive/ Getty Images

Fulgencio Batista, 1955

Castro et les <it>barbudos</it>, 1959 - crédits : Keystone/ Hulton Archive/ Getty Images

Castro et les barbudos, 1959

Autres références

  • AMÉRIQUE LATINE - Évolution géopolitique

    • Écrit par Georges COUFFIGNAL
    • 7 514 mots
    ...réunion au sommet de chefs d'État « ibéro-américains » (Espagne, Portugal, Amérique latine) à Guadalajara (Mexique), avec – fait significatif – la présence de Fidel Castro. Cuba avait été, à la demande des États-Unis, exclu de l'O.E.A. (Organisation des États américains) en 1962. Tous les pays...
  • AMÉRIQUE LATINE - Rapports entre Églises et États

    • Écrit par Jean Jacques KOURLIANDSKY
    • 6 741 mots
    • 2 médias
    ...novo, adoptée en 1937, rendit à l'Église certains privilèges : l'enseignement religieux dans les écoles, ou la validité civile du mariage à l'Église. Fidel Castro, ancien élève des jésuites, entreprit sa marche victorieuse, en janvier 1959, avec la médaille de la Vierge du cuivre, patronne de Cuba,...
  • CASTRO RAÚL (1931- )

    • Écrit par Marie Laure GEOFFRAY
    • 1 432 mots
    • 1 média

    Raúl Modesto Castro Ruz, président de Cuba de 2008 à 2018, ne surgit sur la scène politique internationale qu'à partir du 31 juillet 2006, lorsqu'il succède à son frère Fidel, malade, comme chef de l'État par intérim. Numéro deux du régime depuis la révolution cubaine, ministre de la Défense depuis...

  • COMMUNISMES RELIGIEUX

    • Écrit par Henri DESROCHE
    • 3 049 mots
    ...aggiornamentos aux modernités inattendues, sous la forme de christianismes pararévolutionnaires ou révolutionnaires. D'où les paradoxes de l'histoire énoncés par Fidel Castro au Congrès culturel de La Havane en janvier 1968 : « Ce sont les paradoxes de l'histoire. Comment, quand nous voyons des secteurs du...
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Voir aussi