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BÉJART MAURICE JEAN BERGER dit MAURICE (1928-2007)

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Un maître dans l'art protéiforme

Parallèlement à ses ballets, il met en scène des spectacles lyriques : Les Contes d'Hoffmann en 1961, La Veuve joyeuse en 1963, à Bruxelles, notamment. Son attachement à la pédagogie le pousse à fonder l'école Mudra, en 1970, toujours à Bruxelles. Il quittera cette ville en 1987 pour s'établir en Suisse, à Lausanne, avec une structure plus petite, le Béjart Ballet Lausanne dont le danseur et comédien Gil Roman deviendra le directeur adjoint dès 1993. La pédagogie étant essentielle à ses yeux, son école prendra, en 1992, le nom d'école-atelier Rudra avec comme directeur adjoint Michel Gascard. L'enseignement et les rencontres guident sa voie de chorégraphe. Béjart, tel un caméléon, s'adapte. Pour Rudolf Noureev, il crée, à Bruxelles, en 1971, Le Chant du compagnon errant (musique de Mahler) ; pour Jorge Donn, artiste qui lui est indissociablement lié, c'est, notamment Nijinski, clown de Dieu (musique de Tchaïkovski et Pierre Henry) en 1971. Il fait de Maïa Plissetskaïa son Isadora en 1976 ; Sylvie Guillem lui inspire Sissi, l'impératrice anarchiste en 1992 et, plus tard, Racine cubique (musique de Raul Garello, 1997). Il tisse également des relations avec de grandes compagnies : le Tokyo Ballet, la Scala de Milan, l'Opéra de Paris...

Béjart a été fait membre du Soleil levant par Hiro-Hito en 1986, et a été élu à l'Académie des beaux-arts de l'Institut de France en juin 1994. Une reconnaissance pour la danse. Comme Béjart le confiait lui-même au jeune prodige de la danse Sidi Larbi Cherkaoui, lors de la remise de son Nijinski award, en décembre 2002, « c'est important de faire des rencontres ; j'ai toujours fonctionné ainsi ». Une méthode qui a bien porté ses fruits, puisque Maurice Béjart est devenu le monstre sacré de la danse contemporaine.

— Bérengère ALFORT

Après avoir célébré au Grand Palais (Paris) 1789 et nous – pour le bicentenaire de la Révolution française –, puis au Deutsche Oper de Berlin le wagnérien Ring um den Ring (1990), Béjart, entouré de sa famille d'élection (Béjart Ballet Lausanne et Rudra), a évoqué, en 1994, à Montpellier, les avatars de la paternité égoïste ou généreuse dans le shakespearien King Lear-Prospero. Humaniste et prospectif, il a violemment dénoncé, accompagné d'Elton John et des Queen, le drame vital du sida dans Le Presbytère (1997). À Lyon, il mêlait, dans Lumière (2001), son amitié fervente pour Brel et Barbara, et sa passion du cinéma qu'il ravivera en 2003 dans Ciao Fellini (pour les dix ans de la mort du cinéaste). Il recevait alors, des mains de l'ambassadeur de France en Suisse, l'insigne de commandeur des arts et lettres. Parcourant son propre labyrinthe, il assemblait ingénieusement les temps forts de ses œuvres sous le nom de L'Amour-la Danse (2005). Enfin, le chorégraphe a croisé, dans Zarathoustra le chant de la danse (2006), ce Nietzsche si souvent évoqué dans son œuvre et qui, comme lui, ne pouvait croire qu'en « un Dieu qui saurait danser ». C'est ce Dieu que Béjart, décédé à Lausanne le 22 novembre 2007, à la veille d'une ultime création, est allé retrouver sur la plage d'Ostende (Belgique) où ses cendres ont été dispersées.

— Marie-Françoise CHRISTOUT

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Pour citer cet article

Bérengère ALFORT et Marie-Françoise CHRISTOUT. BÉJART MAURICE JEAN BERGER dit MAURICE (1928-2007) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Article mis en ligne le et modifié le 14/03/2009

Autres références

  • SYMPHONIE POUR UN HOMME SEUL (M. Béjart)

    • Écrit par
    • 148 mots

    Lorsqu'il crée, le 26 juillet 1955, Symphonie pour un homme seul, Maurice Béjart, chorégraphe né à Marseille en 1927, n'est pas encore célèbre. Pourtant, sa pièce fera scandale au théâtre de l'Étoile, à Paris. Le sujet certes est dans l'air du temps, marqué par l'existentialisme et l'expression...

  • BALLET

    • Écrit par et
    • 12 613 mots
    • 20 médias
    Maurice Béjart, ouvert à toutes les cultures, bouscule le ballet par le choix des musiques et des sujets. Symphonie pour un homme seul (1955, musique Pierre Schaeffer et Pierre Henry) lui permet de construire un style personnel. Au Théâtre de la Monnaie, à Bruxelles, où il fonde bientôt les Ballets...
  • BORTOLUZZI PAOLO (1938-1993)

    • Écrit par
    • 910 mots

    Décédé à Bruxelles des suites d'une congestion cérébrale dans la nuit du 15 au 16 octobre, le danseur italien Paolo Bortoluzzi avait la faculté rare de pouvoir jouer sur “l'immense octave de la création”, pour rappeler la formule de Paul Claudel. L'un des plus brillants artistes-interprètes de sa...

  • CULLBERG BIRGIT RAGNHILD (1908-1999)

    • Écrit par
    • 920 mots

    De Martha Graham à Pina Bausch, d'Isadora Duncan à Trisha Brown, nombreuses sont les femmes chorégraphes qui ont enrichi le langage gestuel, fouillé les thèmes jusqu'aux découvertes de l'introspection et de la psychanalyse, scruté les horizons nouveaux. Parmi elles, la Suédoise Birgit Ragnhild...

  • DANSE

    • Écrit par et
    • 5 050 mots
    • 17 médias
    Maurice Béjart réunit dans un espace, que l'on imagine facilement circulaire et en plein air, un public qu'il invite à célébrer comme un rite le culte religieux, qui n'a d'autre objet que la danse même. Aussi sa chorégraphie du Sacre du printemps substitue-t-elle au caractère...
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