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ARCHÉOLOGIE (Archéologie et société) Histoire de l'archéologie

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Chronologies et typologies

Après l'accumulation, la tâche suivante des archéologues sera, dans le sillage de Winckelmann, mais aussi de Linné, de mettre en ordre leurs objets en les classant, par forme mais aussi dans le temps et l'espace. Pour ce qui regarde la chronologie, un conservateur du musée de Copenhague, Christian Thomsen, définit les trois âges successifs de la préhistoire, respectivement « de la pierre », « du bronze » et « du fer ». L'Anglais John Lubbock subdivisera le premier en « paléolithique » (« âge de la pierre taillée » ou « de la pierre ancienne ») et « néolithique » (« âge de la pierre polie » ou « de la pierre nouvelle »). Les savants allemands introduiront ensuite de nouvelles subdivisions au sein des autres âges. Chaque âge est défini par des objets considérés comme « typiques » ou, en référence à la géologie, comme des « fossiles directeurs ». Cette notion de « type » sera formalisée en 1885 par le Suédois Oscar Montelius, pour qui l'archéologue doit savoir définir ses « types » avec la même précision que botanistes et zoologues le font pour les espèces végétales et animales.

L'ordonnancement spatial consiste pour l'historien de l'art à identifier des écoles ou styles régionaux. L'archéologue définira des « cultures » ou des « civilisations » en observant la répartition géographique d'un certain nombre de « types » caractéristiques. Purement descriptive en apparence, cette approche peut constituer une utile mise en ordre préalable. Mais elle adopte aussi implicitement le modèle de l'État-nation pour se représenter ses « cultures » anciennes et vient donc, comme on l'évoquait plus haut, conforter concrètement les identités nationales.

Le pas sera alors souvent franchi, lorsqu'on prétendra identifier par l'archéologie les « peuples » du passé et en suivre l'évolution jusqu'aux nations modernes – comme le systématisera l'archéologue berlinois Gustav Kossinna au début du xxe siècle. Dans le même temps, l'émergence de la notion de « race » poussera un certain nombre d'archéologues, dès le milieu du siècle, à identifier « culture », « peuple » et « race ». Ainsi, l'archéologie va venir à l'appui des mouvements nationalistes et de revendications territoriales, voire de suprématie raciale – Kossinna lui-même sera un inspirateur direct des théories nationales-socialistes. Ces détournements nationalistes se poursuivront, à des degrés divers, jusqu'à nos jours, dans de nombreuses parties du monde, des Balkans à l'Inde ou au Proche-Orient.

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Écrit par

  • : professeur émérite à l'université Paris-I-Panthéon-Sorbonne et à l'Institut universitaire de France

Classification

Pour citer cet article

Jean-Paul DEMOULE. ARCHÉOLOGIE (Archéologie et société) - Histoire de l'archéologie [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Article mis en ligne le et modifié le 13/03/2012

Médias

Tablette cunéiforme, royaume d'Ougarit - crédits : De Agostini

Tablette cunéiforme, royaume d'Ougarit

Laocoon - crédits :  Bridgeman Images

Laocoon

Fresques mythologiques, sacellum des Augustales, Herculanum - crédits : Kated/ Shutterstock

Fresques mythologiques, sacellum des Augustales, Herculanum

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