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KALF WILLEM (1619-1693)

Élève selon Houbraken du peintre de Haarlem, Hendrick Pot, dont l'influence ne se laisse guère remarquer chez lui, paysagiste d'occasion en 1639 dans le goût de Van Goyen (unicum apparu sur le marché d'art en 1886), Willem Kalf semble s'être très vite spécialisé dans la nature morte (les plus anciennes remontant à 1643 au moins) et sans doute a-t-il fréquenté l'atelier ou vu des œuvres de Frans Ryckhals (mort en 1647), peintre remarquable par sa facture grasse et luisante (cf. son tableau d'orfèvrerie à Budapest), actif à Dordrecht puis à Middelburg et plus proche des splendeurs flamandes (Boel, Fyt, Heem) que des fines monochromies mises à la mode en Hollande par Claesz et Heda. De même, les granges et intérieurs rustiques de Ryckhals comme ceux de Cornelis Saftleven, Pieter de Bloot, Sorgh, Van der Poel définissent tout un milieu « flamandisant » de Rotterdam (la tradition Brouwer-Teniers) qui a certainement marqué Kalf lorsqu'il représente, principalement au début de sa carrière, des Cuisine et des amoncellements pittoresques d'objets agricoles ou de victuailles, plongés dans une chaude pénombre. Aussi bien sont-ce de tels sujets rustiques et familiers qu'il peint à Paris, où il séjourna entre 1642 et 1646 dans l'active colonie flamande des artistes de Saint-Germain-des-Prés (cf. dans Michel Faré, La Nature morte en France, t. I, Genève, 1962, le fameux récit de l'arrivée de Wleughels père à Paris, en 1643, où le jeune Flamand arrive dans une taverne et y retrouve Fouquières, Van Boucle, Nicasius et Kalf), et qui participent à la même vogue des bambochades que les thèmes abordés par Bourdon, Michelin et les Le Nain — ainsi prépare-t-on la venue d'un Chardin au xviiie siècle ! La Grange du Louvre, l'Intérieur rustique du musée de Strasbourg qui, par ailleurs, possède une curieuse Récureuse de cuivres de Watteau, véritable pastiche d'un Kalf de la période française, les tableaux d'Amiens, du Mans, Lyon, Metz, Tours, Montpellier et Berlin illustrent cette première spécialité de Kalf qui semble avoir eu beaucoup de succès. Mais déjà les Pièces d'orfèvrerie de Rouen (1645 ?), de Francfort (1643), du Mans (1643 — il y a trois tableaux de Kalf au musée du Mans, et c'est un tableau de taille moyenne qui est daté 1643 et non pas, contrairement à ce qui est souvent rapporté, l'immense et superbe toile de la collection du maréchal de Tessé qu'il faut cependant classer dans la période française de l'artiste, et qui constitue le chef-d'œuvre absolu de Kalf, en dimensions comme en qualité picturale), peintes avant même le retour de Kalf dans les Pays-Bas (sa présence y est attestée de façon certaine en 1651), montrent l'essentiel de son esthétique de peintre de natures mortes : scintillements dans une pénombre pleine de mystère, ostentation baroquisante exaltant la beauté des objets et la mouvance de la lumière, riches granulations colorées dans les parties mises en évidence par les coups de lumière, tons saturés et chauds, science de la mise en scène qui traite la nature morte comme une action théâtrale ponctuée d'apparitions (la pulpe d'un citron doré se déroulant dans le vide, la moelleuse texture d'un tapis oriental, la fragilité d'une flûte de verre, etc.).

Fixé à Amsterdam à partir de 1653, Kalf n'a pu, au contact de Rembrandt et du « rembranisme » diffus qui envahit alors Amsterdam, que se conforter dans la voie riche et poétique qui est aussi celle de Van Beyren et de Weenix, de Willem van Aelst, Juriæn van Streeck, Barend van der Meer, Samuel van Hoogstraten. Kalf apparaît ainsi comme l'un des meilleurs représentants de la grande phase baroque caractéristique de l'art néerlandais à partir de 1650. Parmi ses chefs-d'œuvre, on citera, outre la magnifique toile du Mans, le [...]

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Pour citer cet article

J. BOUTON. KALF WILLEM (1619-1693) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • SÉBASTIEN STOSKOPFF (exposition)

    • Écrit par X.-Y. LANDER
    • 1 497 mots

    À l'occasion du quatre centième anniversaire de la naissance de Sébastien Stoskopff, le musée de l'Œuvre Notre-Dame de Strasbourg – relayé par le Suermont-Ludwig Museum d'Aix-la-Chapelle – a organisé en 1997 une grande exposition de l'œuvre de ce peintre strasbourgeois,...

Voir aussi