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LEYEN URSULA VON DER (1958- )

Une femme allemande

Reprise du dialogue entre l’Union européenne et la Turquie, 2021 - crédits : Turkish Presidency Press Office/ AFP

Reprise du dialogue entre l’Union européenne et la Turquie, 2021

Première femme à occuper le poste de président de la Commission européenne, Ursula von der Leyen n’a pas, sur le papier, la même envergure politique que ses prédécesseurs, tous anciens Premiers ministres depuis le départ de Jacques Delors en 1995. Ministre fédérale de la Famille, des personnes âgées, de la condition féminine et de la jeunesse (2005-2009), du Travail et des affaires sociales (2009-2013), puis de la Défense (2013-2019), elle n’a pas occupé les plus hauts postes du Bundesregierung(gouvernement fédéral allemand),même si son nom fut un temps évoqué pour succéder à Angela Merkel. Elle ne manque cependant pas d’atouts. Cinquante-deux ans après le tout premier président de la Commission de la CEE, Walter Hallstein, elle est la seconde personnalité allemande à occuper le poste de président de la Commission. Citoyenne du plus grand pays de l’Union, pays fondateur qui plus est, elle a été soutenue avec force par plusieurs chefs d’État et de gouvernement, en particulier par la France et son président Emmanuel Macron. Elle dispose d’un fort ancrage national et son parcours lui donne de nombreuses qualités pour incarner l’Europe. Née le 8 octobre 1958 à Ixelles en Belgique, elle est la fille d’un grand commis de l’Europe, Ernst Albrecht, qui a notamment occupé le poste de Directeur général de la concurrence de la CEE, ce qui fait d’elle la première présidente de la Commission issue d’une famille ayant participé d’aussi près à la construction européenne. Elle a vécu à Bruxelles jusqu’à treize ans, a été initiée dans sa jeunesse à la culture et aux langues (le français et l’anglais) de l’eurocratie, dont il est clair qu’elle maîtrise les usages. Docteur en médecine, même si son titre a été contesté (on l’a rétroactivement accusée de plagiat pour sa thèse de doctorat, mais l’université ne lui a finalement pas retiré son titre de docteur), elle dispose d’une solide formation en économie (elle est notamment diplômée de la London School of Economics) longtemps prisée à Bruxelles, avant que ne déferle la vague managériale. Enfin, comme son prédécesseur, elle est issue d’une droite relativement sociale, au carrefour des prises de positions des grands partis européens, ce qui lui permet d’incarner le consensus. Cette proche d’Angela Merkel s’est vu confier un premier portefeuille de ministre fédéral aux Affaires sociales, ce qui l’a conduite à une politique audacieuse en matière de crèches et de salaire parental. Par la suite, elle a défendu la mise en place du salaire minimum en tant que ministre du Travail. Quant à son expérience de ministre de la Défense, si elle a nui à sa popularité en Allemagne et a probablement contribué à déjouer les pronostics de ceux qui la voyaient succéder à Angela Merkel, elle est en phase avec le rapprochement franco-allemand sur la construction d’une défense européenne commune et avec sa volonté d’incarner un tournant géopolitique de l’Europe dans le contexte du Brexit et des turbulences de la politique internationale.

Aussi, le soutien des chefs d’État et de gouvernement et la personnalité d’Ursula von der Leyen pourraient être synonymes d’un changement de pratique du pouvoir, d’un retour à une division du travail politique européen plus classique et d’une plus grande et plus discrète habileté dans la gestion des relations entre les institutions et intérêts en présence. L’équilibre de son programme initial se voulait ainsi une promesse de cohésion et d’intégration. Il lui faudra toutefois combiner son goût du consensus avec le volontarisme que réclame l’action publique européenne, ce qui n’est pas la plus aisée des équations politiques.

(Voir également UNION EUROPÉENNE, chronologie contemporaine)

— Didier GEORGAKAKIS

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Écrit par

  • : professeur de science politique à l'université de Paris-I-Panthéon-Sorbonne et au Collège d'Europe de Bruges, chaire Jean Monnet, Belgique

Classification

Pour citer cet article

Didier GEORGAKAKIS. LEYEN URSULA VON DER (1958- ) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Article mis en ligne le et modifié le 12/04/2024

Médias

Ursula von der Leyen - crédits :  Horacio Villalobos/ Corbis News/ Getty Images

Ursula von der Leyen

Reprise du dialogue entre l’Union européenne et la Turquie, 2021 - crédits : Turkish Presidency Press Office/ AFP

Reprise du dialogue entre l’Union européenne et la Turquie, 2021

Autres références

  • JUNCKER JEAN-CLAUDE (1954- )

    • Écrit par
    • 1 275 mots
    • 1 média
    Dès le début de 2017, il annonce qu’il ne briguera pas un second mandat à la tête de la Commission. Le 1er novembre 2019, il est remplacé par l’Allemande Ursula von der Leyen.