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TRIBUNAL RÉVOLUTIONNAIRE

Entre 1792 et 1794, pendant la Terreur, le Tribunal révolutionnaire de Paris fut l'un des organismes les plus célèbres. Un premier tribunal révolutionnaire, connu sous le titre de tribunal criminel extraordinaire, avait été institué le 17 août 1792. Formé de juges et de jurés, élus par les sections parisiennes, il eut à s'occuper de soixante et une affaires et prononça vingt et une condamnations à mort. Supprimé en novembre 1792, ce tribunal fut reconstitué le 10 mars 1793, avec mission de connaître de tous les « attentats contre la République ». Il comprenait cinq juges, un accusateur public et douze jurés. À sa création, il ne pouvait juger les crimes de conspiration que sur un décret d'accusation rendu par la Convention, mais l'accusateur public du tribunal reçut, par décret du 5 avril 1793, pouvoir de « faire arrêter, poursuivre et juger tout prévenu des dits crimes » sur une simple dénonciation.

Les Montagnards reprochèrent au Tribunal révolutionnaire sa lenteur : jusqu'en septembre 1793, il n'avait examiné que deux cent soixante affaires et prononcé soixante-six condamnations à la peine capitale ; l'intégrité de son accusateur public, Fouquier-Tinville, était mise en doute. Pourtant, en raison de l'extension incessante de la notion de « suspect », les arrestations se multipliaient. Il importait donc d'accroître l'efficacité du tribunal en augmentant le nombre de ses membres et en limitant la durée des débats lorsque les jurés se déclaraient suffisamment éclairés. Le rythme des procès s'accéléra à partir de septembre 1793 : cent soixante-dix-sept condamnations à mort furent prononcées entre octobre et décembre 1793 (Marie-Antoinette, les Girondins...).

Les décrets de ventôse an II ayant encore contribué à accroître le nombre des personnes à traduire devant le Tribunal révolutionnaire (les commissions populaires devaient en effet lui adresser tous les suspects reconnus « traîtres à la patrie »), force fut d'accélérer encore la procédure. La loi du 22 prairial an II (10 juin 1794) supprima tout interrogatoire de l'accusé avant l'audience publique et décida que le tribunal pourrait renoncer à l'audition de témoins. Pour gagner du temps, on écarta défenseurs et plaidoiries. La sentence ne pouvait être que la mort ou l'acquittement. La loi fut accueillie avec réserve par la Convention ; mais il faut observer que les prévenus avaient, en principe, déjà été entendus, ainsi que les témoins, par les commissions populaires. En réalité, il n'en fut rien, l'exécution de la loi ayant été volontairement sabordée par le Comité de sûreté générale pour discréditer Robespierre. Ce fut la Grande Terreur : mille trois cent soixante-seize exécutions du 10 juin au 27 juillet 1794, chiffre à mettre en parallèle avec le total des condamnations à mort prononcées par le Tribunal révolutionnaire (plus de deux mille cinq cents). D'autres juridictions révolutionnaires existaient en dehors du tribunal de Paris. Les représentants en mission furent autorisés par la loi du 22 nivôse an II (11 janv. 1794) à transformer les tribunaux criminels en tribunaux révolutionnaires (ce fut le cas à Toulouse, par exemple) ou à établir directement des tribunaux révolutionnaires (ainsi à Strasbourg où s'illustra Euloge Schneider, à Rochefort et à Brest). Des commissions révolutionnaires furent instituées dans les départements insurgés pour juger les rebelles pris les armes à la main ; elles ne comportaient pas de jury. Ces instances provinciales furent en général plus impitoyables que le Tribunal révolutionnaire de Paris : mille six cent soixante-cinq condamnations à mort à Lyon, trois cent quatre-vingt-douze à Arras, trois cent trente-deux à Orange, deux cent quatre-vingt-dix-neuf à Bordeaux, deux cent quatre-vingt-neuf à Marseille.[...]

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Écrit par

  • : professeur à l'université de Paris-IV-Sorbonne

Classification

Pour citer cet article

Jean TULARD. TRIBUNAL RÉVOLUTIONNAIRE [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • DANTON GEORGES JACQUES (1759-1794)

    • Écrit par Jean MASSIN
    • 1 987 mots
    • 1 média
    Fonceur né, il s'en tire en hurlant plus fort que les Enragés ; c'est lui qui enlève le vote, à la Convention, créant ceTribunal révolutionnaire qui l'enverra à la mort un an plus tard. Le 6 avril 1793, il est élu membre du Comité de salut public nouvellement créé ; il en prend de fait, sans...
  • FOUQUIER-TINVILLE ANTOINE (1746-1795)

    • Écrit par Marcel LE CLÈRE
    • 440 mots

    Magistrat français de l'époque révolutionnaire, Fouquier-Tinville est né en Artois d'une famille paysanne relativement aisée ; il vient faire son droit à Paris et y achète une charge de procureur au Châtelet, qu'il exerce de 1773 à 1783 au 20 de la rue des Jeûneurs. Il doit la résilier moins pour...

  • PRAIRIAL AN II LOI DU 22 (1794)

    • Écrit par Jean TULARD
    • 353 mots

    La loi du 22 prairial an II (10 juin 1794) est restée célèbre dans l'histoire de la Révolution française pour avoir porté la Terreur à son apogée. Deux jours après la fête de l'Être suprême qui a consacré la domination de Robespierre et laissé croire qu'il allait fermer « l'abîme...

  • RÉVOLUTION FRANÇAISE

    • Écrit par Jean-Clément MARTIN, Marc THIVOLET
    • 29 554 mots
    • 3 médias
    ...contre-révolutionnaires à l'intérieur du pays, la Convention décide, le 24 février 1793, d'envoyer trois cent mille hommes de plus aux frontières ; en même temps, elle institue, le 10 mars, le tribunal révolutionnaire, chargé d'accélérer les procédures et envoie des députés, les « représentants en mission », détenteurs...

Voir aussi