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THÉRÈSE D'ÁVILA (1515-1582)

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Les œuvres et la doctrine spirituelle

La fondation de dix-sept monastères de carmélites et sa participation à l'extension de la branche masculine n'épuisent pas toute l'activité de cette femme étonnante. Thérèse d'Ávila a aussi laissé une œuvre écrite qui lui assure une place de choix non seulement dans la spiritualité, mais dans la littérature universelle. Elle n'avait préparé pour l'impression que Le Chemin de la perfection (Camino de perfección), qui, commencé en 1562, parut à Evora après sa mort, en 1583. Son premier ouvrage, Le Livre de la vie(Libro de la vida), n'était destiné qu'à ses confesseurs ; il fut néanmoins publié en 1588 à Salamanque, ainsi que Le Livre des demeures (Libro de moradas), ou Château intérieur (Castillo interior), rédigé en 1577, qui traite de l'ensemble de la vie spirituelle. Quant à l'activité de la fondatrice, il faut en chercher le récit dans Le Livre des fondations (Libro de fundaciones), écrit à partir de 1577 et publié à Bruxelles en 1610. On ne peut que mentionner d'autres écrits de moindre étendue, des poésies, un nombre considérable de lettres, dont plus de quatre cents ont été retrouvées et publiées, et les Constitutions des Carmélites déchaussées. La plupart de ces ouvrages ont été fort souvent réédités et traduits.

Pour Thérèse d'Ávila, Dieu est tout et l'homme doit connaître et reconnaître « la profondeur de son néant et l'incomparable Majesté de Dieu » (Camino, chap. xxxii). Cette transcendance de Dieu le rend inconnaissable pour l'homme : « Nous ne sommes ici-bas que de pauvres petits bergers, nous sommes ignorants et nous croyons connaître quelque chose de vous » (IVeDem., chap. ii). Mais, si personne n'a jamais vu Dieu, « le Fils unique, qui est dans le sein du Père, nous l'a fait connaître » (Jean, i, 18). C'est donc, après une courte période d'hésitation, dans la fréquentation de l'Évangile et l'effort quotidien pour imiter le Christ en tout que Thérèse va chercher le contact avec Dieu. Ce Dieu est amour. « Il a tant aimé le monde qu'il a donné son Fils unique » (Jean, iii, 16), lequel disait : « Je suis descendu du ciel non pas pour faire ma volonté, mais la volonté de celui qui m'a envoyé » (Jean, vi, 38). C'est de cette façon que par le Christ on entre en contact avec Dieu : « N'allez pas vous imaginer qu'il y a ici d'autres mystères, des choses que vous ne savez pas ou ne comprenez pas : tout notre bien consiste à nous conformer à la volonté de Dieu » (IIe Dem.). Dieu veut par-dessus tout que tous les hommes soient sauvés et donc éternellement heureux. Beaucoup n'en prennent pas le chemin. Thérèse se sent responsable de leur salut éternel. Prier pour les âmes en risque de se perdre, dit-elle à ses religieuses, « ... c'est là votre vocation, telles doivent être vos affaires... » (Camino, chap. i). Elle ne leur propose pas une vie très austère pour mieux assurer leur propre salut, mais, dit-elle, « meilleures vous serez, plus vos louanges seront agréables au Seigneur et plus votre oraison sera utile au prochain » (VIIe Dem., chap. iv).

De l'oraison, qui est le maître mot de sa doctrine spirituelle, sainte Thérèse fut aux Temps modernes, et reste, un maître incontesté. L'oraison, ou plus simplement la prière silencieuse, l'amoureuse attention aux choses de Dieu, est pour elle le centre de la vie, le grand moyen d'exprimer l'amour qu'on a pour Dieu et de grandir en cet amour, le meilleur moyen enfin d'exprimer et d'accroître l'amour du prochain, à qui l'on donne par l'oraison plus que soi-même. Thérèse d'Ávila a d'abord découvert dans les aspirations de son propre cœur le désir de s'entretenir avec Dieu, et dans l'Écriture le désir de Dieu de s'entretenir avec sa créature : « L'oraison mentale, dit-elle, n'est[...]

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Écrit par

  • : docteur ès lettres, prieur du couvent des Carmes de Paris

Classification

Pour citer cet article

Pierre SÉROUET. THÉRÈSE D'ÁVILA (1515-1582) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Article mis en ligne le et modifié le 14/03/2009

Autres références

  • CARMEL

    • Écrit par
    • 1 539 mots
    Thérèsed'Avila et Jean de la Croix, l'un et l'autre en raison de la qualité de leur expérience et d'un sens psychologique très aigu, sont devenus les guides de générations de contemplatifs. C'est en partie grâce à leurs écrits que les Carmes restent fidèles à la tradition du Mont-Carmel. Thérèse d'Avila...
  • ESPAGNE (Arts et culture) - La littérature

    • Écrit par , et
    • 13 749 mots
    • 4 médias
    C'est là aussi le pouvoir dont était douée sainte Thérèse d'Ávila (1515-1582), femme profondément attachée à la nature et à l'action, véritablement maternelle et dont le peuple espagnol a fait l'image de la Mère. Dans une prose directe, touchante, effusive, concrète elle raconte avec une égale...
  • JEAN DE LA CROIX (1542-1591)

    • Écrit par et
    • 3 738 mots
    ...acquit une solide formation scolastique. Déçu par la vie trop extérieure des Carmes, il songeait à entrer à la Chartreuse, lorsqu'en 1567 il rencontra Thérèse d'Ávila qui l'avait intéressé à son projet de fonder une branche masculine de Carmel réformé analogue à celle qu'elle venait d'organiser...
  • LIVRE DE LA VIE, Thérèse d'Ávila - Fiche de lecture

    • Écrit par
    • 867 mots
    • 1 média

    « On m'a donné l'ordre d'écrire ma manière d'oraison et les grâces dont le Seigneur m'a favorisée, en me laissant pour cela toute latitude. » C'est par ces mots que commence le Livre de la vie, que Thérèse d'Ávila (1515-1582) appelait aussi Le Livre des...