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THÉÂTRES DU MONDE La tradition indienne

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Le théâtre moderne

L'Inde est à la recherche d'un théâtre national vivant. L'intérêt pour les activités théâtrales se développe à travers l'Inde entière où de nombreux animateurs suscitent la création de troupes d'amateurs enthousiastes. Mais leurs objectifs sont le plus souvent très divergents, et il est exceptionnel qu'elles prennent entre elles des contacts leur permettant de confronter leurs expériences. Il en résulte une certaine confusion.

À Delhi s'élabore une formule de théâtre contemporain. Capitale politique, Delhi se prête au rôle de capitale artistique, apte à canaliser les efforts dispersés. La Sangeet Natak Akademi, créée en 1953, procède à la recherche méthodique et à l'étude des différentes formes d'art du pays. Des troupes de toutes les provinces, invitées à venir donner dans leurs propres langues des représentations dans la capitale, y attirent un auditoire issu principalement de leurs régions linguistiques. Cependant, c'est dans les années 1960 que la National School of Drama, dirigée par E. Alkazi, ouvrit au théâtre indien de nouvelles dimensions et de nouvelles perspectives. Alkazi réussit notamment à atteindre le réalisme et à réinterpréter le passé en lui rendant sa vitalité. Ainsi, par la représentation de Hori, se trouva recréée, par le costume, les lumières, le jeu des acteurs, l'atmosphère d'un village (région de Delhi) au début du siècle. En outre, il ouvrit le public à la compréhension de Brecht. Les deux meilleures troupes de Delhi, Abhiyan et Dishantar (fondée avec des étudiants de la N.S.D. en 1968), issues de cette nouvelle orientation, se montrent en mesure de faire perdre au théâtre son caractère de simple divertissement en l'élevant à un rôle social. En 1971, la Dishantar collabora à la présentation de Billi Chali Ke Jutta, illustrant une conception neuve de la place que doit occuper le corps de l'acteur dans l'espace et intégrant le public dans le spectacle. Le Naya Theatre, sous l'impulsion de son directeur, Habib Tanvir, multiplie les expériences, choisissant de représenter des satires sociales, transposant des éléments traditionnels dans des réalisations modernes ou dans le théâtre rural, utilisant la pantomime, cherchant à parvenir à un contact direct avec le public. Pour transmettre son message, il eut l'idée ingénieuse de procurer à sa troupe une activité itinérante en utilisant un camion se transformant en scène. Il put offrir ainsi, en quarante jours, trente-deux représentations d'Indra Lok Sabha dans trente-deux localités différentes et réunir d'immenses auditoires.

À Madras, le National Theatre déploie son activité dans un sens traditionnel, et tout autour se multiplient des nuées de groupes d'amateurs. Mais à Calcutta, en dehors de toutes préoccupations commerciales, s'est fondé l'Autre Théâtre, dont la production est intense depuis 1960. C'est un théâtre sociopolitique, accueillant tous les partis et guidé par des disciplines intellectuelles. Il s'est établi sur les ruines de celui qui, à l'instigation d'une association d'écrivains et d'artistes antifascistes du Bengale, avait monté en 1944 Nabanna (La Moisson), de Bijon Bhattacharya, ayant pour thème la vie du paysan durant la famine de 1943 : accueilli avec succès, il s'était de lui-même lentement dégradé en substituant l'idéal marxiste aux valeurs esthétiques.

À Delhi, Alok Roy a formé le groupe de théâtre Jagran, le « théâtre de l'opprimé ». Ses acteurs, vêtus de loques, représentent des personnages grotesques personnifiant les fléaux de l'Inde. Ils plongent dans la foule misérable, l'invitant à les détruire par la moquerie la plus explosive. Ainsi se crée un déchaînement de rires hurlants, libératoires.

Par son langage résolument contemporain,[...]

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Écrit par

  • : membre de l'École française d'Extrême-Orient, diplômée de l'École pratique des hautes études

Classification

Pour citer cet article

Marie-Simone RENOU. THÉÂTRES DU MONDE - La tradition indienne [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Article mis en ligne le et modifié le 14/03/2009

Autres références

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