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TELUGU ou TELOUGOU

Un siècle d'or

La maturité de la littérature telugu se manifeste au xvie siècle dans les prabandha, longs récits en vers et prose, souvent à la manière d'un drame et centrés sur un héros royal ou divin, riches en descriptions et épisodes narratifs, accordant le mètre et le style à tous les modes du sentiment et à toutes les formes de la verve. De cet âge d'or, l'Auguste est Kṛṣṇadēvarāya, empereur de Vijayanagar, protecteur fastueux des artistes, composant lui-même en sanskrit, en kannara et en telugu. Parmi les poètes de sa cour, Peddana a été soupçonné d'avoir écrit sous le nom de son roi. En fait, celui-ci est bien l'auteur de l'Āmuktamālyada, poème difficile à cause de ses ornements archaïsants, mais de grand mérite, sur les poètes viṣṇuites tamouls Viṣṇucitta et Āṇḍāḷ. Auparavant Peddana avait achevé son Manucaritram, le plus important des cinq principaux poèmes telugu ! On en retient l'histoire du jeune brahmane Pravara, transporté miraculeusement dans l'Himalaya où la « nymphe » Varudhini tente en vain de le séduire avant de succomber à un jeune gandharva qui a pris les traits de Pravara. Chaque vers est une figure de style et, comme toujours dans les littératures de l'Inde, le miracle d'équilibre réside dans le naturel conservé sous tant d'effets. Citons pour la douceur de sa poésie le Parijātāpaharaṇam Māhātmyam de Tenāli Rāmakṛṣṇa, et retenons la variété des thèmes du Rājuśekhara caritram de Mallana, histoire d'exploits princiers où les débuts chevaleresques tournent en romance, au Kāḷahasti Māhātmyam de Dhūrjaṭi, somme de mythologie śivaïte. Piṇgaḷi Sūraṇa est le plus éblouissant, avec un roman merveilleux aux multiples épisodes et allégories le Kaḷāpūrṇōḍayam (1550), et le Rāghava Pānḍaviyam (1545), véritable tour de force qui se lit à la fois comme un Rāmāyaṇa ou un Mahābhārata, selon que l'on coupe le texte. S'étonnera-t-on, par contraste, de la popularité des quatrains de Vemana ? Moral, satirique, philosophe religieux mais sans dogmes ni rites, il a le sens de la formule intelligible à tous, et, personnalité mystérieuse (xvie siècle ?), il constitue dans la mémoire de tous les locuteurs telugu une sorte de synthèse de la sagesse la plus universelle.

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Écrit par

  • : agrégé de l'Université, directeur de l'École française d'Extrême-Orient

Classification

Pour citer cet article

François GROS. TELUGU ou TELOUGOU [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Autres références

  • ĀNDHRA PRADESH

    • Écrit par François DURAND-DASTÈS
    • 1 072 mots
    • 1 média

    C'est au cœur de l'actuel Mahārāshtra, qui n'était certainement pas alors aussi aryanisé que maintenant, qu'apparaît, au ~ ier siècle, la dynastie des Sātakani, ou Shātavāhana (« fils du cheval » en mounda ?), ou Āndhrabhritya (« serviteurs des Āndhra »), ou simplement...

  • GRAMMAIRES (HISTOIRE DES) - Grammaire et langage dans l'Inde ancienne

    • Écrit par Pierre-Sylvain FILLIOZAT
    • 3 019 mots
    Les grammaires telugu sont, elles aussi, très dépendantes de la grammaire sanskrite. La plus ancienne, écrite en sanskrit par Nannaya au xie siècle, a été commentée en telugu. La plus marquante est celle de Ketana (xiiie s.).
  • INDE (Le territoire et les hommes) - Histoire

    • Écrit par Universalis, Christophe JAFFRELOT, Jacques POUCHEPADASS
    • 22 936 mots
    • 25 médias
    ...officiellement patronnées, comme aux époques précédentes, mais, à côté des lettres tamoules, les autres langues régionales dravidiennes ( kannara et surtout telugu) accèdent à leur maturité littéraire. L'architecture et la sculpture, dont la période Cōla représentait l'âge classique, s'acheminent vers un baroque...
  • INDE (Arts et culture) - Langues et littératures

    • Écrit par Jean-Pierre DURIX, Jacqueline FILLIOZAT, François GROS
    • 10 472 mots
    • 3 médias
    ..., troisième langue de la Malaisie, parlé en Afrique du Sud, aux Fidji, à l'île Maurice, à la Réunion, etc., par les minorités indiennes), le telugu (55 millions de locuteurs, État d'Āndhra Pradesh ; seconde langue de l'Union indienne après l'hindī), le kannaḍa ou kanara (42 millions de locuteurs,...

Voir aussi