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STIRLING JAMES (1926-1992)

Mort le 2 juin 1992, quelques jours après avoir été anobli, James Stirling est l'une des figures les plus captivantes et les plus paradoxales de la scène architecturale britannique.

Né en 1926, fils d'un ingénieur de marine, il fut blessé en Normandie lors du débarquement des forces alliées. Il se forme à Liverpool dans l'atmosphère critique qui était celle de l'école d'architecture locale après la guerre. Le modernisme n'y était déjà plus conçu comme un mouvement monolithique et d'esprit fonctionnaliste, mais comme un courant susceptible d'infléchissements et de particularismes.

Contre la bienséance anglo-saxonne de l'époque, il se singularisa immédiatement par une attitude provocatrice qui, en plus véhément, participait du courant brutaliste théorisé par Reyner Banham. Sa première œuvre (réalisée avec James Gowan, son associé jusqu'en 1963) fut un ensemble de maisons en bande à Ham Common (1956) inspiré des villas Jaoul que Le Corbusier venait de construire à Neuilly : brique nue, à l'intérieur comme à l'extérieur, bandeaux de béton armé, gargouilles en saillie.

Université de Cambridge - crédits :  Bridgeman Images

Université de Cambridge

C'est à l'occasion de trois réalisations universitaires qu'apparaît son style si singulier, qui devait marquer profondément l'esthétique des années 1960. D'abord avec le sculptural bâtiment d'ingénierie de Leicester (1959-1964), édifice violent, saisissant, aux résonances futuristes, où deux tours vitrées sont étrangement posées sur les masses anguleuses des amphithéâtres, dans une composition expressive rappelant le constructivisme soviétique des années 1920 ; puis avec l'édifice du département d'histoire de Cambridge (1964-1967), dont la fameuse bibliothèque-atrium, établie sous une grande verrière en éventail, se déploie dans l'angle d'un bâtiment de verre et de brique, coiffée de gros extracteurs qui en renforcent le caractère machiniste. Objet de scandale, victime de campagnes antimodernistes qui appelaient à sa démolition (surtout au début des années 1980 lorsqu'elle commença à donner de graves signes de fatigue), l'œuvre fut néanmoins conservée et restaurée ; enfin au Queen's College d'Oxford, avec la résidence étudiante du Florey Building (1966-1971), étagée en surplombs, portée par des piliers obliques, et pliée autour d'une cour vitrée, transposition radicale du cloître. Ces trois constructions au ton démonstratif furent élaborées sans grand souci du contexte. Stirling se plaisait d'ailleurs à les représenter sous la forme d'axonométries qui en soulignaient la dimension d'objets autonomes.

L'ensemble de résidences universitaires de Saint Andrew, en Écosse (1964-1968), les complexes de logements collectifs puis de maisons en bande de la ville nouvelle de Runcorn (1967-1977) relèvent d'une recherche constructive à partir de panneaux de béton armé puis de fibre de verre ; ces panneaux à la surface cannelée, soigneusement dessinés, aux couleurs contrastées et parfois criardes, à la géométrie forte, sont percés de fenêtres en forme de hublots ronds qui en accentuent l'apparence industrielle. Le centre de formation Olivetti de Haslemere dans le Surrey (1969-1972) utilise le même registre avec des façades en polyester moulé qui évoquent le design des machines à écrire de la compagnie.

Mais, au début des années 1970, avec la crise économique et la fin du cycle des grands programmes universitaires en Grande-Bretagne, James Stirling se trouve quasi sans travail. Durant cette décennie d'amertume, il s'est surtout consacré au dessin et à l'architecture de papier. Dans cette époque d'émergence du postmodernisme, il accomplit, en collaboration avec le doctrinaire néo-classique Leon Krier (notamment pour le projet du centre-ville de Derby en 1970), puis associé avec Michael Wilford à partir de 1971,[...]

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Pour citer cet article

François CHASLIN. STIRLING JAMES (1926-1992) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Médias

Université de Cambridge - crédits :  Bridgeman Images

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Staatsgalerie, Stuttgart - crédits : Roger Last/  Bridgeman Images

Staatsgalerie, Stuttgart

Autres références

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