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SPIN ou MOMENT CINÉTIQUE ou ANGULAIRE INTRINSÈQUE

Spin et relativités

Le spin, s'il est, comme tout moment angulaire quantique, étroitement lié au groupe des rotations spatiales, prend un sens encore plus spécifique et plus profond dans un cadre spatio-temporel plus large. Les rotations ne forment en effet qu'un sous-groupe d'un ensemble plus large : le groupe de toutes les symétries cinématiques, c'est-à-dire toutes les transformations spatio-temporelles laissant invariantes les lois de la physique. Ce groupe (en laissant de côté les symétries discrètes, telle la réflexion d'espace, ou parité) comprend les translations d'espace, de temps, les rotations spatiales et enfin les transformations inertielles, c'est-à-dire celles qui existent entre référentiels en mouvement relatif uniforme. Ces dernières sont les transformations dites de Lorentz, qui forment le cœur de la relativité einsteinienne. Elles peuvent, pour des mouvements à faible vitesse devant la vitesse limite, dite « de la lumière », être remplacées par les transformations classiques de Galilée qui en offrent, dans ces conditions, une bonne approximation. Le groupe de relativité complet ainsi composé est appelé « groupe de Poincaré » ou « groupe de Lorentz inhomogène », qui, à petite vitesse, dans les conditions de validité de la mécanique newtonienne classique, peut être remplacé par le « groupe de Galilée », inhomogène.

Ce groupe de relativité régit la cinématique des systèmes physiques. En théorie quantique, l'invariance des lois physiques se traduit par l'existence d'une représentation unitaire du groupe agissant dans l'espace de Hilbert des états du système. Il est donc naturel d'associer les représentations irréductibles du groupe, celles à partir desquelles n'importe quelle autre peut être construite, aux systèmes physiques les plus simples, disons élémentaires, en ne donnant ici à ce mot qu'un sens cinématique indépendant de toute considération sur la dynamique interne du système. On aura donc une description intrinsèque et un répertoire systématique des quantons « élémentaires » en procédant à une classification des représentations unitaires irréductibles du groupe de relativité. C'est Wigner, en 1939, qui a proposé ce point de vue, et procédé à la construction des représentations unitaires irréductibles du groupe de Poincaré. Le résultat est aussi profond que naturel : une telle représentation est entièrement caractérisée par un nombre positif M et un nombre entier ou demi-entier s, qui s'interprètent tout naturellement comme la masse et le spin du quanton décrit par cette représentation. Il faut insister sur l'apparition naturelle de ces grandeurs physiques comme les caractéristiques propres d'un quanton à partir de la seule structure de son environnement spatio-temporel. Les (2s + 1) degrés de liberté d'un quanton de spin s sont donc bien une propriété spécifique et intrinsèque d'un tel objet, de nature géométrique. La situation est absolument similaire, en ce qui concerne le spin, si l'on considère l'approximation galiléenne. Les représentations du groupe de Galilée (Wightman 1962, Lévy-Leblond 1963), si elles exhibent une assez subtile différence avec celles du groupe de Poincaré concernant la signification de la masse, donnent par contre au spin un rôle tout à fait similaire. Il est donc complètement erroné d'affirmer, comme on le fait parfois encore, que le spin est « un effet relativiste ». Certaines propriétés particulières du spin, cependant, sont spécifiquement liées à la relativité einsteinienne et n'apparaissent pas à l'approximation galiléenne. Ainsi, le spin d'un quanton reste invariant dans son propre référentiel où il est « immobile » ; si ce quanton décrit un circuit fermé du point de vue d'un autre référentiel, la relation nécessairement non inertielle de ces deux référentiels entraîne[...]

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Pour citer cet article

Jean-Marc LÉVY-LEBLOND. SPIN ou MOMENT CINÉTIQUE ou ANGULAIRE INTRINSÈQUE [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

Média

Appareil de Stern et Gerlach - crédits : Encyclopædia Universalis France

Appareil de Stern et Gerlach

Autres références

  • HADRONS

    • Écrit par Bernard PIRE
    • 4 223 mots
    • 2 médias
    Les baryons sont par définition les hadrons qui ont un spin demi-entier. On leur associe un « nombre baryonique » B égal à 1 ou à — 1 selon qu'il s'agit d'une particule ou d'une antiparticule et on constate que toutes les réactions conservent ce nombre, c'est-à-dire que dans toute réaction observée...
  • PARTICULES ÉLÉMENTAIRES

    • Écrit par Maurice JACOB, Bernard PIRE
    • 8 172 mots
    • 12 médias
    Le spin est le moment angulaire du constituant : celui-ci tourne sur lui-même. Il s'agit d'un mouvement quantique, le moment angulaire se mesurant en unités de (où est la constante de Planck h, divisée par 2π). Quarks et leptons ont tous un spin 1/2, ou un moment angulaire ℏ...
  • ATOME

    • Écrit par José LEITE LOPES
    • 9 140 mots
    • 13 médias
    ...dans lesquels les quatre nombres quantiques de deux électrons coïncident n'existent pas. Et il a alors donné comme un postulat fondamental pour les électrons, et toutes les particules à spin 1/2, l'énoncé suivant : deux électrons quelconques ne peuvent jamais occuper le même état quantique.
  • ATOMIQUE PHYSIQUE

    • Écrit par Philippe BOUYER, Georges LÉVI
    • 6 651 mots
    • 1 média
    ...vers le noyau. Il y a également des corrections dues à ce que l'électron possède comme propriété intrinsèque, en plus de sa masse et de sa charge, un spin s = 1/2. Cette propriété correspond au fait que le moment magnétique de l'électron ne peut prendre que deux orientations possibles dans un champ magnétique....
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Voir aussi