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GHIRSHMAN ROMAN (1895-1979)

Grand spécialiste de l'antiquité iranienne, Roman Ghirshman connut une vie hors du commun. Ce Français d'élection était né à Kharkov (aujourd’hui Kharkiv en Ukraine) le 3 octobre 1895. Mobilisé durant la Première Guerre mondiale, il combattit dans l'armée blanche qui fut refoulée en Crimée. De là, il passa à Constantinople, puis dans une colonie juive de Palestine dont, seul officier, il organisa la défense en attendant d'être dégagé par les lanciers du Bengale. Il gagna la France en 1923, et dans sa vieillesse, il se plaisait à raconter comment, étudiant pauvre, il gagnait alors sa vie comme caissier d'une boîte de nuit de Montparnasse. Et ses journées étaient consacrées à des études universitaires : Charles Picard lui inculqua une forte culture classique, le père Scheil et C. Virolleaud lui enseignèrent l'assyrien et le sumérien ; R. Dussaud et G. Contenau, l'archéologie.

Ainsi formé, il put être affecté en 1930 à la mission qui fouillait le site sumérien de Tello, en Irak. Or, à cette époque, le plateau iranien n'avait pratiquement pas été exploré autrement qu'en surface ; toute la « préhistoire » antérieure aux Perses achéménides était inconnue. Les fouilleurs clandestins pillaient les tombes du Luristan, au voisinage desquelles le site de Tépé Giyan leur livrait une belle vaisselle peinte. Une expédition de sauvetage fut organisée en 1931 et G. Contenau la confia au jeune archéologue. La fouille d'un site saccagé est difficile : Roman Ghirshman en tira cependant les données décisives d'une classification des époques archaïques de la civilisation du plateau iranien. Deux ans plus tard, le site de Tépé Sialk près de Kashan, en bordure du désert central, fut à son tour livré au pillage ; on déterrait des vases peints sur lesquels les amateurs se jetaient.

Conformément à sa vocation d'institution vouée à la recherche archéologique, ce fut une fois de plus le musée du Louvre qui subventionna les fouilles ; elles se prolongèrent jusqu'en 1937, sous la direction de Roman Ghirshman assisté par sa femme, elle-même restauratrice et dessinatrice. On découvrit qu'il y avait deux nécropoles : l'une des derniers siècles du IIe millénaire, l'autre du début du premier, et on put les attribuer à des immigrants iraniens, apparentés aux Mèdes. La seconde nécropole était apparentée aussi à celles du Luristan auxquelles Roman Ghirshman s'intéressa toujours. Simultanément, il explora le village voisin, qui remontait au Ve millénaire avant J.-C. Il put retracer ainsi les développements d'une culture archaïque pendant de longs siècles, jusqu'à l'irruption de colons marchands élamites, venus de Suse dans l'actuelle plaine du Khuzistan, vers la fin du IVe millénaire. Du coup était révélé l'étonnant dynamisme de la civilisation protoélamite, émule de celle des Sumériens.

Mais Roman Ghirshman ne s'intéressait pas seulement à la haute Antiquité ; il était passionné par les époques réputées « tardives » des Parthes et des Sassanides, trop souvent négligées. De 1935 à 1941, il explora donc le grand site de Bichapour, dans la région de Chiraz, bien connu pour ses reliefs commémorant les victoires du conquérant sassanide Chapour Ier, vainqueur des Romains au iiie siècle après J.-C. Il y dégagea un palais décoré de magnifiques mosaïques et de reliefs de stuc.

En 1939, il aurait voulu s'engager comme combattant, mais il n'était plus mobilisable et repartit donc pour l'Iran. Après la défaite de 1940, il se rallia parmi les premiers au général de Gaulle qui le chargea d'une mission en Afghanistan, après quoi, il vint au Caire pour y préparer la publication de travaux effectués au cours des longues années précédentes.

Ziggourat de Tchoga Zanbil, Iran - crédits :  Bridgeman Images

Ziggourat de Tchoga Zanbil, Iran

Au lendemain de la guerre, et jusqu’en 1967, Roman Ghirshman[...]

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Écrit par

  • : inspecteur général honoraire des Musées de France, ancien conservateur en chef du département des Antiquités orientales du musée du Louvre

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Pour citer cet article

Pierre AMIET. GHIRSHMAN ROMAN (1895-1979) [en ligne]. In Encyclopædia Universalis. Disponible sur : (consulté le )

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Ziggourat de Tchoga Zanbil, Iran - crédits :  Bridgeman Images

Ziggourat de Tchoga Zanbil, Iran

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